Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision en date du 17 août 2011 par laquelle le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône lui a infligé une pénalité financière de 50 640,59 euros.
Par un jugement n° 1106551 du 21 avril 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 juin 2015, M. F..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 avril 2015 ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a estimé à tort qu'étaient en cause des actes non réalisés alors que seules sont contestées les conditions de leur facturation et a confondu le montant de l'indu avec celui de la pénalité ;
- les agissements qui lui sont reprochés ne peuvent être qualifiés de frauduleux ou de fautifs ;
- il était en droit de facturer les autres actes pratiqués au cours des mêmes examens médicaux, si bien que le préjudice de la caisse ne dépasse pas 74 463,27 euros et ne peut justifier une pénalité aussi élevée que celle infligée ;
- le tribunal des affaires sanitaires et sociales ne s'est pas encore prononcé sur le montant de l'indu.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2015, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, représentée par la SCP Vinsonneau-Paliès Noy Gauer et associés, conclut au rejet de la requête, à la condamnation du requérant à payer la pénalité contestée et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête, qui ne contient aucun moyen d'appel, est irrecevable ;
- aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une lettre du 7 janvier 2016, la Cour a informé les parties que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône tendant à ce que le requérant soit condamné à payer la pénalité contestée, en application du principe selon lequel une demande reconventionnelle n'est pas recevable dans un litige d'excès de pouvoir.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...'hôte, premier conseiller,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., pour la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.
1. Considérant que, par une décision en date du 17 août 2011, le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône a infligé à M. F..., en sa qualité de médecin, une pénalité financière de 50 640,59 euros sur le fondement de l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale ; que M. F... fait appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 avril 2015 ayant rejeté sa demande d'annulation de cette décision ;
Sur l'appel de M. F... :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " I. - Peuvent faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou de la caisse mentionnée aux articles L. 215-1 ou L. 215-3 : (...) / 3° Les professionnels et établissements de santé (...). II. - La pénalité mentionnée au I est due pour : / 1° Toute inobservation des règles du présent code, du code de la santé publique, du code rural et de la pêche maritime ou du code de l'action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation en nature ou en espèces par l'organisme local d'assurance maladie (...) / III. - Le montant de la pénalité mentionnée au I est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, soit proportionnellement aux sommes concernées dans la limite de 50 % de celles-ci, soit, à défaut de sommes déterminées ou clairement déterminables, réserve faite de l'application de l'article L. 162-1-14-2, forfaitairement dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale (...) " ; qu'en vertu du a) du 2° de l'article R. 147-8 du même code, peuvent faire l'objet de cette pénalité les professionnels de santé libéraux n'ayant pas respecté les conditions de prise en charge ou prescription prévues lors de l'inscription au remboursement par l'assurance maladie des actes, produits ou prestations qu'ils accomplissent ; que le I de l'article R. 147-8-1 de ce code précise que la pénalité est fixée en fonction de la gravité des faits reprochés et, s'ils ne relèvent pas d'une fraude au sens des articles R. 147-11 et R. 147-12, à un montant maximum égal à 50 % des sommes indûment présentées au remboursement ou indûment prises en charge, pour les faits relevant, notamment, du 2° de l'article R. 147-8 ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la constatation objective d'une inobservation des règles régissant les conditions de prise en charge par l'assurance maladie des actes ou prestations effectués par un médecin libéral suffit à justifier l'application de la pénalité financière prévue à l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale, indépendamment du caractère intentionnel du manquement ; que, par suite, M. F..., qui ne conteste pas avoir facturé, pour deux cent cinquante et un patients, plus de deux actes cotés ALQP003 par an en méconnaissance des conditions de prise en charge par l'assurance maladie de ce type d'actes, ne peut utilement faire valoir que son comportement ne pouvait être qualifié de frauduleux ni même de fautif ;
4. Considérant que la procédure à l'issue de laquelle a été infligée la pénalité financière en litige est distincte et indépendante de celle par laquelle la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône réclame à M. F... le remboursement des sommes qu'elle estime indûment perçues ; que, par suite, le directeur de la caisse a pu légalement infliger cette pénalité sans attendre l'aboutissement d'un éventuel recours formé devant les juridictions judiciaires en vue de contester l'action en restitution de l'indu engagée à l'encontre du requérant ;
5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du code de la sécurité sociale que la pénalité infligée à M. F... ne sanctionne pas une erreur de cotation mais le non-respect des conditions de prise en charge par l'assurance maladie des actes effectués par l'intéressé, compte tenu de la cotation sous laquelle il les a présentés ; que, dès lors, la circonstance, au demeurant non établie, que M. F... aurait pu prétendre à la prise en charge des actes litigieux sous une autre cotation ou à la prise en charge d'autres actes pratiqués au cours du même examen est sans incidence sur la matérialité des manquements ayant justifié l'application de la pénalité ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions reconventionnelles de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône :
7. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône demande à la Cour de condamner M. F... à verser la pénalité financière contestée ; que si l'exécution du présent arrêt implique nécessairement le paiement par M. F... de cette pénalité, il n'appartient pas à la juridiction administrative de prononcer la condamnation de l'intéressé à ce paiement, dès lors que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône dispose à l'égard de ce dernier des voies de droit habituelles pour assurer le recouvrement de sa créance ; que, par suite, de telles conclusions sont irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. F... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : M. F... versera à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 (deux mille euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F...et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2016, où siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. C... et M. A...'hôte, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 16 février 2016.
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N° 15MA02538
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