Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 1506399 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 18 décembre 2015 sous le n° 15MA04947, et un mémoire enregistré le 27 janvier 2016, Mme A... épouseB..., représentée par Me Leturcq, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 novembre 2015 ;
2°) d'annuler les décisions du 15 juillet 2015 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, où, à défaut d'une décision lui attribuant l'aide juridictionnelle, sur le seul fondement de l'article L. 761-du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement s'agissant de l'atteinte à la vie privée et familiale ;
- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;
- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- la décision lui refusant le droit au séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a méconnu l'instruction NOR IOCLI1124524 C du 9 septembre 2011 relative au droit au séjour des personnes victimes de violences conjugales ;
- en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de séjour a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...épouse B...ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 18 décembre 2015 sous le n° 15MA04948, et un mémoire enregistré le 27 janvier 2016, Mme A... épouseB..., représentée par Me Leturcq, demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement du 19 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, où, à défaut d'une décision lui attribuant l'aide juridictionnelle, sur le seul fondement de l'article L. 761-du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens d'annulation sur lesquels est fondée sa requête au fond présentent un caractère sérieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...épouse B...ne sont pas fondés.
Mme A... épouse B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 29 février 2016 et du 26 mai 2016.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- et les observations de Me Leturcq, représentant Mme A...épouseB....
Sur la jonction :
1. Considérant que les requêtes n° 15MA04947 et 15MA04948 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;
2. Considérant que par un arrêté en date du 15 juillet 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour présentée par Mme A...épouseB..., née en 1972, de nationalité sénégalaise, et a obligé l'intéressée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que par requête enregistrée sous le n° 15MA04947, Mme A... épouse B...relève appel du jugement du 19 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ; que par requête enregistrée sous le n° 15MA04948, elle demande qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation et d'injonction :
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté contesté :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12, dans sa rédaction applicable : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences conjugales de la part de son conjoint et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " (...) " ;
4. Considérant que les pièces du dossier, en particulier le jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 13 janvier 2015 produit devant la Cour, condamnant M.B..., de nationalité française, pour des faits de violences volontaires commis le 13 octobre 2014 sur la personne de son épouse, sont de nature à établir que Mme A...épouse B...a subi des violences conjugales ayant entraîné la rupture de la communauté de vie ; qu'ainsi, la requérante est fondée à se prévaloir des dispositions ci-dessus reproduites de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévoyant qu'en cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; que, dès lors, l'arrêté du 15 juillet 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a opposé un refus de séjour à l'intéressée notamment au motif qu'elle ne justifiait plus d'une communauté de vie avec son époux de nationalité française a été pris en méconnaissance de ces dispositions ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...épouse B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2015 ;
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à Mme A... épouse B...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
7. Considérant que, dès lors qu'il est statué par le présent arrêt sur la requête de Mme A... épouse B...tendant à l'annulation du jugement n° 1506399 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de Marseille, la requête n° 15MA04948, tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement, est devenue sans objet ; qu'il n'y a, par suite, plus lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant que Mme A...épouse B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Leturcq, avocat de Mme A... épouseB..., au titre des frais exposés dans les présentes instances et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Leturcq renonce à la perception de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15MA04948.
Article 2 : Le jugement n° 1506399 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 15 juillet 2015 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à Mme A... épouse B...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me Leturcq, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête n° 15MA04947 est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à MmeC... A... épouseB..., au ministre de l'intérieur et à Me Leturcq.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 31 mai 2016 où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- M. Martin, président-assesseur,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 juin 2016.
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N° 15MA04947, 15MA04948 3
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