Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2015 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français, ensemble la décision de la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi du 8 janvier 2015.
Par un jugement n° 1500671 du 18 juin 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 17 juillet 2015, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 juin 2015 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 13 janvier 2015 et la décision de la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi du 8 janvier 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de procéder à nouveau à l'instruction de sa demande et, dans l'attente, de lui délivrer l'autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est entaché d'un vice de procédure pour incompétence négative dès lors que la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi s'est abstenue de procéder à l'instruction de sa demande et que le préfet a analysé le contrat de travail comme une simple promesse d'embauche ne comportant pas le visa des services de cette direction ;
- le préfet a commis une erreur de droit en rejetant la demande sur la circonstance qu'il ne remplirait pas les conditions des dispositions de l'article L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il a présenté sa demande sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain ;
- les premiers juges ont fait droit à tort au moyen de substitution de base légale, le privant ainsi des garanties dont est assorti l'accord franco-marocain ;
- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen de la demande réellement présentée et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire encourt l'annulation ;
- cette dernière décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 9 octobre 1987 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
A été entendu, au cours de l'audience publique le rapport de Mme Carotenuto.
1. Considérant que M. A..., ressortissant marocain, relève appel du jugement du 18 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 janvier 2015 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français, ensemble la décision du directeur de la direction régionale des entreprises de la concurrence et de la consommation, du travail et de l'emploi en date du 8 janvier 2015 ;
Sur la légalité de la décision de refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 dudit code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles " ; qu'enfin, l'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ;
3. Considérant que portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titre de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; qu'il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, ces stipulations font obstacle à l'application aux ressortissants marocains des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant qu'elles prévoient la délivrance d'un titre de séjour salarié ; qu'il suit de là que, pour rejeter la demande de carte de séjour temporaire " salarié " de M. C... A..., le préfet des Alpes-Maritimes, qui a examiné la demande tant au regard de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que de l'article L. 313-14 du même code, ne pouvait, sans commettre une erreur de droit, opposer au requérant lesdites dispositions ;
4. Considérant, toutefois, que les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 sont équivalentes aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par suite c'est à bon droit que les premiers juges ont accepté sur demande du préfet de substituer à ces dispositions lesdites stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain, dès lors que cette substitution de base légale n'a pas eu pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et que l'administration disposait du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces stipulations et dispositions ; que si, en outre, les dispositions de l'article L. 313-14, en tant qu'elles permettent l'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié d'un ressortissant étranger justifiant de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires, n'ont pas d'équivalent dans l'accord franco-marocain et ne sont donc pas applicables aux ressortissants marocains souhaitant exercer une activité professionnelle salariée, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes aurait pris la même décision en examinant la demande de M. A... sur le seul fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain ; qu'en effet, le préfet s'est notamment fondé, dans l'arrêté litigieux, sur la circonstance, non contestée, que l'intéressé ne disposait pas d'un visa long séjour, la délivrance à un ressortissant marocain du titre de séjour " salarié " prévu à l'article 3 de l'accord étant subordonnée, en vertu de son article 9, à la condition, prévue à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la production par ce ressortissant d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; que par suite, le moyen tiré de l'absence de bien-fondé de la substitution de base légale doit être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A... soutient que le préfet ne pouvait lui opposer l'absence de contrat de travail visé, l'intéressé, comme il a été dit précédemment, ne disposait pas d'un visa long séjour ; que par suite, même s'il a produit à l'appui de sa demande de titre de séjour " salarié " un contrat de travail pour un emploi de " vendeur non-cadre " établi par la société Les Deux Frères ainsi qu'une demande d'autorisation de travail rédigée sur l'imprimé réglementaire Cerfa par le responsable de cette entreprise, cette demande a pu être rejetée par le préfet des Alpes-Maritimes au seul motif, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, que le requérant ne justifiait pas de la détention d'un visa de long séjour ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des termes de l'arrêté en litige que le préfet a bien examiné la demande présentée par M. A... ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la circonstance que le préfet a opposé à l'intéressé le fait qu'il n'aurait produit qu'une promesse d'embauche et non un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 5221-2 précité du code du travail est sans incidence ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient M. A..., l'appréciation portée par le préfet sur l'absence de visa de long séjour n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; que l'article R. 313-21 du même code précise que : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré dans l'espace Schengen via l'Espagne le 24 mai 2012 sous couvert d'un visa C valable du 19 mai au 19 juin 2012 ; qu'il est célibataire et sans enfant et a vécu dans son pays d'origine au moins jusqu'à l'âge de trente et un ans ; qu'il n'établit pas qu'il serait dépourvu de tout lien privé ou familial dans son pays d'origine ; que si l'intéressé fait valoir qu'il vit avec son frère, titulaire d'une carte de résident, qui serait malade et qu'il l'assisterait quotidiennement compte tenu de la pathologie dont celui-ci souffre, il ne démontre pas qu'il serait la seule personne à même de lui apporter une telle assistance ; que les circonstances qu'il bénéficierait d'un contrat de travail et d'un logement et qu'il serait parfaitement intégré ne suffisent pas à établir que le refus de titre de séjour opposé par le préfet porte au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet aurait entaché son appréciation des conséquences de la décision litigieuse sur la situation personnelle de M. A... d'une erreur manifeste ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ; qu'il ne peut par suite se prévaloir de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions en annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
10. Considérant d'autre part, ainsi qu'il a été dit précédemment et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, la décision prononçant l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 13 janvier 2015, ensemble la décision de la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi du 8 janvier 2015 ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience 28 juin 2016, où siégeaient :
- M. Martin, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code justice administrative,
- Mme Massé-Degois, premier conseiller,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2016.
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N° 15MA02951 3
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