Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 2 août 2017 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.
Par un jugement n° 1702524 du 10 novembre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 7 décembre 2017, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Var du 2 août 2017.
Elle soutient que :
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle justifie d'une bonne intégration sur le territoire français et que sa pathologie ne peut être traitée dans son pays d'origine ;
- le préfet a méconnu l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle justifie de circonstances exceptionnelles ou humanitaires permettant son admission au séjour au titre des articles L. 313-14 et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... Steinmetz-Schies, président-assesseur ;
- et les observations de Me B..., représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., née le 9 avril 1961, de nationalité tunisienne, est entrée en France le 5 novembre 2016, sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 15 avril 2017. Le 27 avril 2017, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 2 août 2017 le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. La requérante fait valoir que sa mère, invalide et âgée de 97 ans, ainsi que plusieurs de ses frères vivent en France et que son père a obtenu, en tant qu'ancien combattant, des certificats de reconnaissance de la nation française. Toutefois, Mme A..., célibataire et sans enfant, a vécu jusqu'à l'âge de 56 ans en Tunisie, pays dans lequel réside encore un de ses frères, et n'est entrée en France que récemment, le 5 novembre 2016. Elle ne justifie pas, par les pièces versées aux débats, d'une particulière insertion dans la société française. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, le préfet du Var, en lui refusant un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, aurait porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
4. En deuxième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants tunisiens, l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail stipule : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord./ Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation ". L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7.(...) ". Si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
5. Mme A... soutient qu'elle présente une pathologie psychiatrique qui nécessite la présence d'une tierce personne. Toutefois, lors de son entrée en France, elle soutenait que sa présence était indispensable auprès de sa mère, sans évoquer sa propre pathologie. Par ailleurs, les ordonnances et certificats médicaux des 1er février 2017, 16 juin 2017, 1er septembre 2017, 11 décembre 2017 dont elle se prévaut, s'ils attestent de troubles psychologiques, notent également que sa pathologie est stabilisée grâce au traitement qui lui a été administré et nécessite désormais seulement un suivi médical et une aide sociale, dont rien n'indique qu'ils ne pourraient être mis en place dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet du Var n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre de la décision contestée, qui statue sur une demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 7° du même article.
7. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 3 et 5, le préfet du Var n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 août 2017.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2018, où siégeaient :
- M. David Zupan, président,
- Mme C... Steinmetz-Schies, président-assesseur,
- M. Allan Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique le 26 novembre 2018.
N° 17MA04743 4