Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 25 avril 2016 par lequel le maire de Grosseto-Prugna a accordé à M. C...un permis de construire portant sur la parcelle cadastrée A 2386 et la décision par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux.
Par une ordonnance n° 1601112 du 30 août 2017, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 octobre 2017 et le 25 septembre 2018, le syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio, représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 30 août 2017 du tribunal administratif de Bastia ;
2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Bastia et à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 25 avril 2016 ainsi que le rejet implicite de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de M. C...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- faute pour M. C...d'avoir procédé à l'affichage du permis qui lui a été accordé, l'irrecevabilité du recours contentieux qu'il n'a pas notifié à la commune ne peut lui être opposée ;
- sa requête est recevable ;
- M. C...n'a pas qualité pour déposer une demande de permis de construire ;
- il n'a jamais autorisé M. C...à exécuter des travaux sur la parcelle ;
- le permis délivré a été frauduleusement obtenu ;
- M. C...n'a pas informé la commune que sa demande portait sur une parcelle située dans un lotissement et n'a donc pas joint à sa demande les documents requis ;
- l'autorisation de construction délivrée à M. C...excède les droits à bâtir qu'il détient, dépasse la superficie du terrain sur laquelle il dispose d'un droit de jouissance privative et empiète sur les parties communes de la copropriété ;
- il existe un doute quant à la destination des constructions projetées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2018, M. C...représenté par Me A... de la SCP MORELLI MAUREL et associés, demande à la Cour:
1°) à titre principal, de rejeter la requête et à titre subsidiaire, de rejeter la demande présentée par le syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio devant le tribunal administratif de Bastia ;
2°) de mettre à la charge du syndicat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le syndicat n'ayant pas démontré avoir notifié le recours contentieux à la commune, sa requête était manifestement irrecevable ;
- le dossier de permis de construire comprend l'ensemble des éléments visés à l'article R. 431-55 du code de l'urbanisme ;
- ayant fourni l'attestation prévue à l'article R. 431-35 selon laquelle il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 du même code pour déposer une demande de permis, le maire pouvait estimer qu'il avait qualité pour présenter la déclaration et n'avait pas à exiger des justificatifs supplémentaires ;
- il est propriétaire des lots n°s 39, 41, 42 et 43 sur la partie cadastrée n° A 2386 sur lesquels il bénéficie d'un droit à construire ;
- la mention selon laquelle la parcelle concernée par la demande d'autorisation d'urbanisme appartiendrait à un lotissement est facultative ;
- en outre, l'absence de cette mention n'a pas exercé d'influence sur l'appréciation portée par l'administration ;
- aucune manoeuvre frauduleuse en vue d'obtenir l'autorisation n'est démontrée ;
- le syndicat reconnaît qu'il dispose de droits à bâtir sur une surface de 350 m² et le permis contesté porte sur une surface de plancher de 348 m².
Par courrier du 6 septembre 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de ce que l'affaire était susceptible d'être appelée à une audience à partir du dernier trimestre de l'année 2018 et de ce qu'une clôture d'instruction à effet immédiat pourrait intervenir à partir du 24 septembre de cette même année.
Par ordonnance du 19 novembre 2018, une clôture d'instruction à effet immédiat a été prononcée.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité de l'ordonnance contestée, la requête ne pouvant être rejetée pour irrecevabilité que par une décision prise après audience publique en l'absence d'invitation à régulariser adressée à l'auteur de la requête.
Un mémoire, présenté pour M.C..., a été enregistré le 13 décembre 2018, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de Grosseto-Prugna a accordé à M.C..., par arrêté du 25 avril 2016, un permis de construire en vue de l'édification de cinq logements sur la parcelle cadastrée A 2386, propriété du syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio. Ce syndicat relève appel de l'ordonnance du 30 août 2017 par lequel le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête comme étant manifestement irrecevable.
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours ". Aux termes de l'article R. 612-1 du code de justice administrative : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / (...) / La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 222-1 du même code : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) ".
3. Les requêtes manifestement irrecevables qui peuvent être rejetées par ordonnance en application des dispositions du code de justice administrative citées au point 2 sont, d'une part, celles dont l'irrecevabilité ne peut en aucun cas être couverte, d'autre part, celles qui ne peuvent être régularisées que jusqu'à l'expiration du délai de recours, si ce délai est expiré et, enfin, celles qui ont donné lieu à une invitation à régulariser, si le délai que la juridiction avait imparti au requérant à cette fin, en l'informant des conséquences qu'emporte un défaut de régularisation comme l'exige l'article R. 612-1 du code de justice administrative, est expiré. En revanche, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre un rejet par ordonnance lorsque la juridiction s'est bornée à communiquer au requérant, en lui indiquant le délai dans lequel il lui serait loisible de répondre, le mémoire dans lequel une partie adverse a opposé une fin de non-recevoir. En pareil cas, à moins que son auteur n'ait été invité à la régulariser dans les conditions prévues à l'article R. 612-1 du code de justice administrative, la requête ne peut être rejetée pour irrecevabilité que par une décision prise après audience publique.
4. Il ressort des pièces du dossier que la juridiction n'a pas invité le requérant à justifier de l'accomplissement de la formalité prévue à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme et s'est bornée à lui communiquer le mémoire du défendeur dans lequel était opposée une fin de non-recevoir. Dans ces conditions, la requête ne pouvait être rejetée par ordonnance. Ainsi, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio devant le tribunal administratif de Bastia.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 25 avril 2016 et de la décision implicite par laquelle le maire a rejeté le recours gracieux du syndicat requérant :
5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique ". Selon l'article R. 431-5 du même code : " La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ".
6. Il résulte de ces dispositions que les permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 précité. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une déclaration ou d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Les tiers ne sauraient donc utilement, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, faire grief à l'administration de ne pas en avoir vérifié l'exactitude.
7. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle déclaration ou d'une demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de s'opposer à la déclaration ou de refuser la demande de permis pour ce motif.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a rempli l'attestation prévue à l'article R. 431-5. Il a précisé que la parcelle concernée par le projet appartenait aux copropriétaires de la résidence du Parc de Porticcio et qu'il était lui-même également copropriétaire de la résidence en tant que copropriétaire de droits à bâtir. S'il a indiqué en outre dans sa demande que la parcelle n'était pas située dans un lotissement, le syndicat requérant, qui se borne à affirmer que sur la parcelle en cause ont été délivrés plusieurs permis de construire relatifs à la création d'un ensemble immobilier de 60 maisons individuelles, ne démontre pas l'existence d'un lotissement sur la parcelle d'assiette du projet tel que défini par les dispositions de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, le maire ne disposait pas, à la date de délivrance du permis, d'éléments de nature à établir que l'attestation souscrite aurait revêtu un caractère frauduleux ou que le pétitionnaire n'aurait pas eu qualité pour demander le permis.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article A. 424-8 du code de l'urbanisme : " (...) Le permis est délivré sous réserve du droit des tiers : il vérifie la conformité du projet aux règles et servitudes d'urbanisme. Il ne vérifie pas si le projet respecte les autres réglementations et les règles de droit privé. Toute personne s'estimant lésée par la méconnaissance du droit de propriété ou d'autres dispositions de droit privé peut donc faire valoir ses droits en saisissant les tribunaux civils, même si le permis respecte les règles d'urbanisme ".
10. Il résulte de ces dispositions que le syndicat requérant ne peut utilement se prévaloir devant le juge administratif d'un empiètement du projet sur les parties communes de la copropriété, de ce que le permis accorderait à M. C...des droits à bâtir qui excéderaient ceux qu'il détient en vertu du règlement de copropriété et que la superficie concernée par le projet dépasserait celle sur laquelle le pétitionnaire dispose d'un droit de jouissance privative.
11. En troisième et dernier lieu, en se bornant à constater que le projet fait apparaître un espace couvert attenant à la construction de 164,65 m², que la surface de la partie surplombée par la toiture terrasse est identique à celles des appartements qui la jouxterait et en s'étonnant que les logements projetés sont constitués de deux pièces et qu'il existe cinq places de stationnement par logement, le syndicat requérant, qui n'invoque aucune méconnaissance par le projet de règles de droit, ne démontre pas, par une argumentation dépourvue de précisions permettant d'en apprécier le bienfondé, que la construction projetée ne serait pas conforme à sa destination.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance et de la requête d'appel, que le syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du maire de Grosseto-Prugna du 25 avril 2016 et de la décision de rejet de son recours gracieux.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de ce syndicat la somme de 2 000 euros à verser à M. C...sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 30 août 2017 du tribunal administratif de Bastia est annulée.
Article 2 : La demande présentée par le syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de sa requête est rejeté.
Article 3 : Le syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio versera à M. C...une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires le Parc de Porticcio, à M. D... C...et à la commune de Grosseto-Prugna.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pecchioli, premier conseiller,
- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.
Lu en audience publique, le 7 janvier 2019.
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N° 17MA04259