Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A..., épouse D..., a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 février 2018 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale".
Par jugement n° 1801513 du 28 juin 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2018, Mme D..., représentée par la société d'avocats Lacombe-C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 28 juin 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 février 2018 du préfet de l'Aude ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, qui sera versée à Me C... en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Elle soutient que :
- Sur le refus de titre de séjour :
- la décision en litige est signée par une autorité incompétente ;
- il y a "confusion des pouvoirs" dès lors que c'est la même personne administrative qui instruit les dossiers de demande et qui signe les décisions ;
- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de respect de la procédure préalable contradictoire prévue par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la décision en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
- Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2018, le préfet de l'Aude conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
La demande d'aide juridictionnelle de Mme D... a été rejetée par décision du 26 octobre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle, confirmée par une décision du 27 février 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., de nationalité tunisienne, a demandé au préfet de l'Aude la délivrance d'un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale". Par l'arrêté en litige du 28 février 2018, le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer ce titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le tribunal administratif de Montpellier, par le jugement attaqué dont la requérante relève appel, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 28 février 2018.
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, les trois moyens tirés de l'incompétence du signataire de la décision en litige, de ce que le secrétaire général de la préfecture ne pourrait pas à la fois instruire un dossier de demande de titre de séjour et statuer sur sa demande sans qu'il y ait "confusion des pouvoirs" et de l'irrégularité de la procédure suivie par l'administration à défaut d'avoir respecté la procédure préalable contradictoire prévue par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Montpellier par Mme D.... Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges respectivement aux points 2, 4, 5 et 6 du jugement attaqué.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " .
4. Mme D... est entrée en France en septembre 2001 pour rejoindre son époux titulaire d'un titre de séjour et a obtenu, en cette qualité, un titre de résident de dix ans valable du 23 septembre 2001 au 22 septembre 2011. Elle n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour à l'expiration de sa validité. Si elle soutient résider habituellement en France depuis 2001, elle ne produit aucune pièce de nature à établir sa présence en France entre le 2ème semestre de l'année 2012 et novembre 2017, date à laquelle son mari a demandé pour elle au préfet de l'Aude la régularisation de sa situation. Invitée par le préfet à comparaître personnellement dans les services de la préfecture pour justifier de sa présence en France depuis 2012, elle n'a apporté aucun élément de nature à établir sa présence en France pendant cette période de cinq années. Il ressort des pièces du dossier que son mari, de même nationalité, a vu sa carte de résident de 10 ans, valable du 24 juillet 2012 au 23 juillet 2022 qui lui avait été délivrée le 24 juillet 2012 par le préfet de la Seine-Saint-Denis, retirée par arrêté du 2 mai 2018 du préfet de l'Aude. Les moyens tirés de l'illégalité de cet arrêté de retrait de la carte de résident délivrée à son mari sont sans incidence sur la légalité du refus de titre de séjour qui a été opposé à Mme D..., seule en cause dans le présent litige. Son enfant majeur Zinedine D..., né le 8 octobre 1999 en Tunisie, fait aussi l'objet, par arrêté du 11 avril 2018, d'une obligation de quitter le territoire français à la fin de l'année solaire 2017-2018. La scolarisation des quatre autres enfants du couple en France ne fait pas obstacle à ce que la famille se reconstitue dans son pays d'origine et que ces enfants poursuivent leur scolarité en Tunisie. Les dispositions précitées ne consacrent pas un droit aux étrangers de choisir librement le pays où établir leur vie familiale. La requérante n'est pas dépourvue d'attache en Tunisie où elle a vécu selon ses propres dires jusqu'à l'âge de 24 ans. La requérante ne fait valoir aucune intégration socio-professionnelle en France. Dans ces conditions, Mme D... n'établit pas avoir constitué le centre de ses intérêts privés et familiaux en France. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant de l'admettre au séjour au titre de sa vie privée et familiale.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
5. En l'absence d'une argumentation spécifique dirigée contre l'obligation de quitter le territoire français, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les mêmes motifs que ceux indiqués au point 4 du présent arrêt concernant le refus de titre de séjour.
6. La requérante n'apporte au juge aucune précision permettant d'apprécier le bien fondé de son moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui doit, dès lors et en tout état de cause, être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., au ministre de l'intérieur et à Me C....
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, où siégeaient :
- Mme F..., présidente,
- Mme E..., première conseillère,
- Mme G..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 17 septembre 2019.
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N°18MA03578