Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2018 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.
Par un jugement n° 1805362 du 11 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 mars 2019, Mme B... A... épouse D..., représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 février 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2018 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer une carte de séjour en qualité de ressortissante d'un pays membre de l'Union européenne.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué ne fait nullement mention de sa vie privée avec son époux et ses enfants ;
- elle satisfait aux conditions posées par les dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle subvient avec son époux aux besoins de leur couple et de leurs quatre enfants ;
- le préfet de l'Aude a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle a établi en France, où son époux de nationalité italienne et leurs quatre enfants résident, le centre de ses intérêts privés et familiaux ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2019, le préfet de l'Aude conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme A... épouse D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 30 avril 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
- Le rapport de M. F... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... épouse D..., ressortissante italienne née le 2 juillet 1982, déclarant être entrée en France au mois de juillet 2016, a sollicité le 10 juillet 2018 le renouvellement d'un titre de séjour portant la mention " Union européenne - toutes activités professionnelles ". Cette demande a fait l'objet d'un arrêté du 8 octobre 2018 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer ce titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination. Par un jugement du 11 février 2019 dont l'intéressée relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient l'intéressée, l'arrêté en cause fait mention de sa vie privée et familiale puisqu'il est précisé qu'elle a trois enfants à charge de quatre à douze ans. Par suite, et alors que le préfet n'est pas tenu de décrire de façon exhaustive la situation de la requérante, le moyen tiré du défaut de motivation de cet arrêté doit être écarté.
3. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) ". Selon l'article R. 121-4 du même code : " (...) Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles (...) La charge pour le système d'assistance sociale que peut constituer le ressortissant mentionné à l'article L. 121-1 est évaluée en prenant notamment en compte le montant des prestations sociales non contributives qui lui ont été accordées, la durée de ses difficultés et de son séjour. (...) ".
4. D'autre part, les dispositions précitées des articles L. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, issues de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006, doivent être interprétées conformément aux objectifs de la directive du 29 avril 2004, dont elles assurent la transposition et qui visent à la reconnaissance d'un droit au séjour en France des citoyens de l'Union européenne remplissant certaines conditions, dont celle d'exercer une activité professionnelle en France ou de disposer de ressources suffisantes pour ne pas être à la charge du système d'assistance sociale de l'État, ainsi qu'à uniformiser la définition de la notion d'activité professionnelle prise en compte à cette fin. Il résulte, à cet égard, de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que si le travail à temps partiel n'est pas exclu du champ d'application des règles relatives à la libre circulation des travailleurs même s'il procure des revenus inférieurs au minimum d'existence tel qu'il est entendu par l'Etat membre, celles-ci ne couvrent que l'exercice d'activités réelles et effectives, à l'exclusion d'activités tellement réduites qu'elles se présentent comme purement marginales et accessoires. Les dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'exercice d'une activité professionnelle en France doivent, dès lors, être interprétées comme excluant la prise en compte d'une activité professionnelle marginale et accessoire.
5. En l'espèce, l'intéressée qui est inscrite au répertoire des métiers pour une activité d'achat et de vente de produits finis, a déclaré un revenu imposable de 6 181 euros pour l'année 2017, soit 515 euros par mois, et n'a déclaré à l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) n'avoir réalisé au titre de l'année 2017 aucun chiffre d'affaires à raison de son activité individuelle. Ainsi, Mme A... épouse D... ne justifie pas, par les éléments qu'elle produit, de l'exercice d'activités professionnelles réelles et effectives autres que marginales et accessoires. Par ailleurs, si l'intéressée dispose, en sa qualité de ressortissante communautaire, de la possibilité de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois, c'est à la condition de pouvoir disposer, pour elle et pour les membres de sa famille, de ressources suffisantes pour ne pas devenir une charge pour le système d'assurance sociale, ainsi que d'une assurance maladie. Si l'appelante a perçu de la part de la caisse d'allocations familiales une somme mensuelle de 924,97 euros sous forme d'allocations familiales, d'allocation logement et de complément familial, ces sommes, qui constituent la plus grosse part de ses revenus familiaux, proviennent du système de protection sociale français. Il résulte de ce qui précède que Mme A... épouse D... ne dispose elle-même d'aucun droit au séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Enfin, aux termes du 1° de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". L'intéressée est entrée récemment en France, selon ses déclarations, au mois de juillet 2016 à l'âge 34 ans. Rien ne fait obstacle à ce que son époux, de même nationalité et en situation irrégulière, ainsi que ses quatre enfants mineurs, dont trois sont nés en Italie, l'accompagnent dans ce pays afin de reconstituer sa cellule familiale. Par suite, Mme A... épouse D... n'est pas fondée à soutenir que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues. Pour les mêmes motifs, le préfet de l'Aude n'a pas entaché son arrêté attaqué d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... épouse D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... épouse D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... épouse D..., au ministre de l'intérieur et à Me C... E....
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2019, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- Mme G..., première conseillère,
- M. F..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 octobre 2019.
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N° 19MA01096