Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Sarl GSM Services et M. D... A... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la décision du 17 février 2016 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à leur charge la somme de 17 600 euros au titre de la contribution spéciale et forfaitaire prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail et la somme de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative de frais de réacheminement prévue par l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, les deux titres exécutoires émis les 11 et 22 avril 2016 à son encontre en vue du recouvrement de ces sanctions et de la décharger de l'obligation de payer les sommes mises à sa charge.
Par un jugement n° 1602750 du 30 janvier 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 mars 2018, sous le n° 18MA01358, la Sarl GSM Services, représentée par Me B... demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 janvier 2018 ;
2°) d'annuler la décision du 17 février 2016 ;
3°) de la décharger de l'obligation de payer les sommes de 17 600 euros et de 2 124 euros mises à sa charge ;
4°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- par un jugement du 10 mars 2016, le tribunal de grande instance de Perpignan l'a relaxé du chef d'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail et de l'exécution d'un travail dissimulé ;
- ce jugement est revêtu de l'autorité de la chose jugée ;
- la réalité de l'emploi d'un travailleur démuni d'une autorisation de travail n'est pas établie ;
- les constatations effectuées par les services de police sont partiales.
Un courrier du 28 mars 2018 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
Un avis d'audience portant clôture immédiate de l'instruction a été émis le 25 septembre 2019 à 11h33.
Un mémoire présenté pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été enregistré le 25 septembre 2019 à 18h10, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La Sarl GSM Services relève appel du jugement du 30 janvier 2018 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 17 février 2016 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge la somme de 17 600 euros au titre de la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail et la somme de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative de frais de réacheminement prévue par l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, des deux titres exécutoires émis les 11 et 22 avril 2016 à son encontre en vue du recouvrement de ces sanctions et à la décharge de l'obligation de payer les sommes mises à sa charge. En appel, la Sarl GSM demande l'annulation de la décision du 17 février 2016 et de la décharger de l'obligation de payer les sommes de 17 600 euros et de 2 124 euros mises à sa charge.
Sur les conclusions à fin de décharge de l'obligation de payer :
2. Il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que les conclusions de la requête tendant à l'annulation des deux titres exécutoires émis à l'encontre de la société GSM services étaient irrecevables dès lors que la requérante n'avait pas introduit de réclamation préalable à l'encontre de ces titres. Cette irrecevabilité n'est pas contestée devant la Cour. Par ailleurs, il n'appartient pas au juge d'appel, devant lequel l'appelant ne conteste pas la fin de non-recevoir opposée à ses conclusions par le juge de premier ressort, de rechercher d'office si cette fin de non-recevoir a été soulevée à bon droit. En conséquence, les conclusions à fin de décharge de l'obligation de payer ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail dispose que : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) ". L'article L. 5221-8 du même code dispose que : " L'employeur s'assure auprès des administrations territorialement compétentes de l'existence du titre autorisant l'étranger à exercer une activité salariée en France, sauf si cet étranger est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi tenue par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ". Aux termes de l'article L. 8253-1 du code précité, dans sa rédaction applicable à la date des manquements relevés à l'encontre de la Sarl GSM Services : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger sans titre de travail, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger sans titre mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. (...) ". Aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. (...). "
4. La contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail est due du seul fait de l'emploi de travailleurs étrangers démunis de titre les autorisant à exercer une activité salariée sur le territoire français. Il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre une décision mettant à la charge d'un employeur la contribution spéciale prévue par les dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail, pour avoir méconnu celles de l'article L. 8251-1 du même code, de vérifier la matérialité des faits reprochés à l'employeur et leur qualification juridique au regard de ces dispositions. Il lui appartient également de décider, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir la sanction prononcée, soit d'en diminuer le montant jusqu'au minimum prévu par les dispositions applicables au litige, soit d'en décharger l'employeur.
5. Il résulte des énonciations du procès-verbal établi le 10 avril 2015 que lors du contrôle effectué le même jour au sein de la Sarl GSM Services, les services de police ont constaté, dans une pièce consacrée à la réparation des téléphones portables et ordinateurs, la présence de M. C... A..., de nationalité marocaine et frère du gérant, se tenant assis devant un bureau établi sur lequel se trouvait notamment un téléphone portable ouvert, apparemment en cours de réparation et un fer à souder. Celui-ci s'est levé brusquement de son siège pour se diriger vers la porte lors de l'entrée des services de police. Par ailleurs, lors de son audition par les services de police, M. C... A... a déclaré qu'il se trouvait dans une pièce dans laquelle se trouve une partie de l'atelier près de la cuisine, qu'il préparait du thé et ne travaillait pas. Il résulte des photographies des lieux versés au débat que l'atelier de réparation est pourvu des équipements nécessaires à la préparation du thé. Il résulte également des procès-verbaux d'audition du gérant et de son frère que ce dernier passe régulièrement au magasin de la société dès lors que son épouse travaille dans un hôtel de Perpignan situé à proximité. Si le procès-verbal d'infraction fait foi jusqu'à preuve contraire, il ne mentionne pas que M. C... A... était en train de travailler mais seulement qu'il était assis devant un bureau sur lequel était posé un téléphone portable " apparemment en cours de réparation ". Ce seul élément, qui n'est pas incompatible avec la préparation du thé, ne nous parait pas de nature à justifier que l'intéressé était en train de travailler pour le compte de son frère. Dans ces conditions, la matérialité des faits n'est pas établie.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la Sarl GSM Services est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 17 février 2016 du directeur général de l'OFII.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la Sarl GSM Services et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 30 janvier 2018 du tribunal administratif de Montpellier, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la SARL GSM dirigées contre la décision du 17 février 2016 du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, ensemble cette décision, sont annulés.
Article 2 : L'Office français de l'immigration et de l'intégration versera à la Sarl GSM Services une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la Sarl GSM Services est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl GSM Services et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2019, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme F..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 4 novembre 2019.
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N° 18MA01358
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