Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet du Var a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2016 par lequel le maire de la commune de La Môle a accordé à la SCI Espérance un permis de construire portant sur la construction d'un bâtiment professionnel.
Par un jugement n° 1601442 du 12 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulon a annulé ledit arrêté.
Procédure devant la Cour :
I°) Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés sous le numéro 18MA00377 les 25 janvier 2018 et 27 mai 2019, la commune de La Môle, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 12 décembre 2017 ;
2°) de constater l'inexistence matérielle et juridique de la carte de zonage du PPRI utilisée par le préfet, de déclarer la carte de zonage utilisée comme nulle et de non effet, de constater l'illégalité de la carte de zonage et de la déclarer illégale ;
3°) de rejeter la requête du préfet du Var ;
4°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise ;
5°) de mettre à la charge du préfet du Var, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de de 3 000 euros.
La commune soutient que :
- la requête du préfet était irrecevable ;
- le projet n'est pas situé en zone rouge du plan de prévention des risques inondation ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- le plan de zonage utilisé par le préfet est nul et inexistant et est entaché d'incompétence et d'irrégularité de procédure ;
- le zonage retenu par le plan de prévention des risques inondation est entaché d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en intervention enregistré le 26 mai 2019, la SCI Espérance, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 12 décembre 2017 ;
2°) de rejeter la demande d'annulation du préfet du Var ;
3°) de mettre à la charge du préfet du Var, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 5 000 euros.
La SCI Esperance soutient que :
- le projet n'est pas situé en zone rouge du plan de prévention des risques inondation ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
II°) Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés sous le numéro 18MA00579 les 12 février 2018 et 24 avril 2019, la SCI Espérance, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 12 décembre 2017 ;
2°) de rejeter la demande d'annulation du préfet du Var ;
3°) de mettre à la charge du préfet du Var, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 5 000 euros.
La SCI Esperance soutient que :
- le projet n'est pas situé en zone rouge du plan de prévention des risques inondation ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2018, le préfet du Var conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens sont infondés.
Par un mémoire en intervention enregistré le 27 mai 2019, la commune de La Môle, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 12 décembre 2017 ;
2°) de constater l'inexistence matérielle et juridique de la carte de zonage du PPRI utilisée par le préfet, de déclarer la carte de zonage utilisée comme nulle et de non effet, de constater l'illégalité de la carte de zonage et de la déclarer illégale ;
3°) de rejeter la requête du préfet du Var ;
4°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise ;
5°) de mettre à la charge du préfet du Var, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de de 3 000 euros.
La commune soutient que :
- le plan de zonage utilisé par le préfet est nul et inexistant et est entaché d'incompétence et d'irrégularité de procédure ;
- le zonage retenu par le plan de prévention des risques inondation est entaché d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation.
Par lettres du 1er octobre 2019, les parties ont été informées, dans chacune des instances, en application de l'article R 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions aux fins de constat, conclusions qui n'entrent pas dans les pouvoirs du juge.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Baizet, premier conseiller;
- les conclusions de Mme Gougot, rapporteur public,
- les observations de Me C..., substituant Me A..., pour la commune de La Môle et de Me B... pour la SCI Espérance.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de La Môle et la SCI Espérance relèvent appel du jugement du 12 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 6 janvier 2016 par lequel le maire de la commune de La Môle a accordé à la SCI Espérance un permis de construire portant sur la construction d'un bâtiment professionnel.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 18MA00377 et 18MA00579 sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la recevabilité des interventions volontaires de la commune de La Môle et de la SCI Espérance :
3. La commune de La Môle, ayant accordé le permis de construire en litige, et la SCI Espérance, pétitionnaire, avaient la qualité de parties en première instance. Dès lors que la commune et la SCI Espérance ont toutes deux la qualité pour faire appel, leur intervention respective en demande dans les instances 18MA00377 et 18MA00579 ne sont, dès lors, pas recevables.
Sur les conclusions aux fins de constat :
4. Il n'appartient pas au juge administratif de réaliser des constats. Dans ces conditions, les conclusions de la commune de La Môle tendant à ce que la Cour constate l'inexistence matérielle et juridique de la carte de zonage du PPRI utilisée par le préfet, déclare la carte de zonage utilisée comme nulle et de non effet, constate l'illégalité de la carte de zonage et déclare cette carte illégale sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
5. En premier lieu, aux termes des dispositions du règlement du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation (PPRI) liés à la présence des rivières La Môle et La Verne sur le territoire de la commune de La Môle approuvé par le préfet du Var le 2 août 2001 et valant servitude d'utilité publique : " I Zonage - Zone rouge : zone estimée très exposée et dans laquelle il ne peut y avoir de mesure de protection efficace (...) VI - Zones rouges. La zone rouge comporte une (...) zone R2 - Zone d'expansion des crues - Zone où la hauteur d'eau est comprise entre 1 et 2 m avec des vitesses inférieures à 0,50m/s ou une hauteur d'eau comprise entre 0,5m et 1 m et des vitesses comprises entre 0,5m/s et 1 m/s ". Aux termes de l'article VI-1 B des mêmes dispositions : " Sont seuls autorisés (...) en zone R 2, à conditions qu'ils ne fassent pas obstacle à l'écoulement des eaux et n'aggravent pas les risques et leurs effets : les cultures (...) la création de hangar (...) ; les infrastructures publiques (...), les installations et travaux divers destinés à améliorer l'écoulement ou le stockage des eaux (...), les carrières (...), les aménagements de terrain de plein air (...), les plantations permanentes (...) les réseaux d'irrigation (...) les clôtures (...) les piscine (...) ".
6. Si le préfet du Var a produit plusieurs cartes et reproductions graphiques en première instance afin de situer le terrain d'assiette en zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation sur le territoire de la commune de La Môle, l'agrandissement produit à partir d'un extrait géo portail n'a aucune valeur règlementaire. Il ressort de la comparaison de la carte de zonage règlementaire du PPRI produite par le préfet, de l'annexe 2 à la carte réglementaire reproduite par la commune, ainsi que du plan de masse du permis de construire que, si la partie sud du terrain d'assiette est située en zone rouge du plan de prévention, le bâtiment est quant à lui situé en zone blanche. Dans ces conditions, la SCI Espérance et la commune de La Môle sont fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la construction du bâtiment en litige méconnaissait les dispositions de la zone rouge du PPRI de La Môle.
7. En second lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
8. Comme il a été dit précédemment, le bâtiment en litige est situé en zone blanche du plan de prévention des risques d'inondation de la commune de La Môle et seule la partie sud du terrain est située en zone rouge. Le préfet du Var ne présente aucun autre élément de nature à démontrer l'existence et l'intensité du risque d'inondation. La SCI Espérance et la commune font valoir au contraire que l'atlas des zones inondables ne classe le terrain que dans le lit majeur de la rivière La Môle. Dans ces conditions, la SCI Espérance et la commune de La Môle sont fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le projet méconnaissait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête de première instance, que la SCI Espérance et la commune de La Môle sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé le permis de construire délivré par la commune de La Môle à la SCI Espérance le 6 janvier 2016.
Sur les conclusions aux fins d'expertise :
10. Compte tenu de l'annulation prononcée par le présent arrêt, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions aux fins d'expertise présentées par la commune de La Môle.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à la commune de La Môle dans la requête n° 18MA00377 et la somme de 1 000 euros à verser à la SCI Espérance dans la requête n° 18MA00579 sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : L'intervention volontaire de la commune de La Môle dans l'instance 18MA00579 et l'intervention volontaire de la SCI Espérance dans l'instance 18MA00377 sont rejetées.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 12 décembre 2017 est annulé.
Article 3 : Les conclusions du préfet du Var tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de La Môle du 6 janvier 2016 sont rejetées.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à la commune de La Môle dans la requête n° 18MA00377 et la somme de 1 000 euros à la SCI Espérance dans la requête n° 18MA00579 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Môle, à la SCI Espérance et à la ministre de la cohésion sociale et des relations avec les collectivités territoriales.
Copie en sera adressée au préfet du Var et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Toulon.
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N° 18MA00377, 18MA00579
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