Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société en nom collectif (SNC) Hôtelière Manosque a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des impositions à la cotisation foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement et à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2017 à raison de l'établissement " Campanile " qu'elle exploite, situé rue du Temple à Manosque.
Par une ordonnance n° 1810811 du 29 mai 2019, la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2019, la SNC Hôtelière Manosque, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 29 mai 2019 ;
2°) de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017 à hauteur de 4 440 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la cotisation foncière des entreprises (CFE) de l'année 2017 doit être calculée par application des différentes mesures de neutralisation des effets de la réforme des valeurs locatives des locaux professionnels, en prenant en compte la valeur locative 2016 telle qu'elle ressort de sa contestation pendante devant le tribunal administratif de Marseille au titre de la CFE 2016 (dossier n° 1804160), à savoir une valeur locative de 15 745 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par lettre du 2 mars 2020, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré de l'irrégularité de l'ordonnance contestée, qui n'entre pas dans le champ d'application du 5° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dès lors que la requête ne présentait pas à juger la seule question de la condamnation prévue à l'article L. 761-1 du même code.
La SNC Hôtelière Manosque a produit un nouveau mémoire le 11 mars 2020, qui n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par réclamation du 12 juin 2018, la SNC Hôtelière Manosque a contesté les impositions à la cotisation foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement et à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017. Elle relève appel de l'ordonnance du 29 mai 2019 par laquelle la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur la régularité de l'ordonnance contestée :
2. Aux termes de l'article R. 222-1 du même code : " Les présidents de tribunal administratif (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ; (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance qu'à l'appui de sa requête, la SNC Hôtelière Manosque a indiqué qu'elle entendait déposer ultérieurement un mémoire tendant à la transmission au Conseil d'Etat d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions du premier alinéa du II et du XV de l'article 34 de la loi du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010. Elle a déposé ce mémoire le 14 janvier 2019, l'administration fiscale y ayant répondu le 23 janvier suivant. Par ordonnance du 5 février 2019, la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Marseille a refusé de transmettre cette question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat, avant de rejeter, le 29 mai 2019, la requête de la SNC Hôtelière Manosque sur le fondement des dispositions précitées du 5° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
4. Toutefois, si, comme le relève l'ordonnance contestée, la société requérante n'avait présenté, à l'appui de sa demande en décharge, aucun moyen autre que celui tiré de l'inconstitutionnalité des dispositions ayant fondé les impositions contestées, dont le tribunal était dessaisi en conséquence de l'ordonnance de refus de transmission prise le 5 février 2019, la requête de la SNC Hôtelière Manosque, qui contenait des conclusions à fin de décharge sur lesquelles il n'avait pas été statué, ne présentait pas à juger uniquement de la condamnation prévue à l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans ces conditions, elle n'entrait pas dans le champ d'application du 5° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, ni d'ailleurs dans celui d'aucune des autres dispositions de cet article, et relevait d'une formation collégiale du tribunal administratif. Par suite, l'ordonnance par laquelle la présidente de la 6ème chambre a rejeté la requête de la SNC Hôtelière Manosque tendant à la décharge des impositions à la cotisation foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement et à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2017 est irrégulière et doit, pour ce motif, être annulée.
5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Marseille afin qu'il y soit statué.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la SNC Hôtelière Manosque et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 1810811 de la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 29 mai 2019 est annulée.
Article 2 : La SNC Hôtelière Manosque est renvoyée devant le tribunal administratif de Marseille pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : L'Etat versera à la SNC Hôtelière Manosque la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SNC Hôtelière Manosque est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Hôtelière Manosque et au ministre de l'économie, des finances et de relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 3 juillet 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lascar, président,
- Mme C..., présidente assesseure,
- Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 juillet 2020.
2
N° 19MA03590