Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 mai 2019 par lequel le préfet de l'Aude lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 1902456 du 21 mai 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 septembre 2019, M. C..., représenté par Me G..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 mai 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 mai 2019 du préfet de l'Aude ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à Me G... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- en lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, le préfet de l'Aude a commis une erreur d'appréciation.
La requête de M. C... a été communiquée au préfet de l'Aude, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par une ordonnance du 13 février 2020, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 2 mars 2020.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 juillet 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme E... F..., présidente assesseure, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de
M. Guy Fédou, président de la 6ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Entré pour la première fois en France en 2014 selon ses déclarations, M. C..., né le 6 décembre 1989 et de nationalité algérienne, a été interpellé le 14 mai 2019 à Narbonne et n'a pas été en mesure de présenter un document l'autorisant au séjour en France. Le 15 mai 2019, le préfet de l'Aude l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., entré en France en 2014 en vue de demander l'asile, a vu sa demande rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 2 novembre 2016 et s'est maintenu en situation irrégulière sur le territoire français en dépit de l'édiction d'une obligation de quitter le territoire français à son encontre le 7 mars 2017. Il a ensuite été l'objet d'une nouvelle décision d'obligation de quitter le territoire français sans délai le 24 avril 2018, qui a été annulée par un jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il lui refusait l'octroi d'un délai de départ volontaire. Ayant quitté le territoire français à une date indéterminée, M. C... y a de nouveau pénétré de manière irrégulière le 14 mai 2019 après s'être vu opposer un refus de visa. Si l'intéressé a épousé une ressortissante française le 30 mars 2018, laquelle était enceinte de ses oeuvres à la date de l'arrêté attaqué, il ressort des pièces du dossier que la vie commune du couple et le mariage étaient, à cette date, récents. Par ailleurs, il ressort également des pièces du dossier que M. C... a usé d'une identité d'emprunt et a menti sur son âge en vue de bénéficier des prestations de l'aide sociale à l'enfance. Enfin, il a violemment menacé à deux reprises des agents de services publics dont il était l'usager et a, notamment, proféré des menaces de mort à l'encontre du premier d'entre eux. S'il n'a jamais été poursuivi pour ces faits, il n'en conteste cependant pas la réalité. Eu égard à leur gravité, au caractère récent des attaches familiales de M. C... en France, à son absence d'insertion et à la circonstance que toute sa famille réside en Algérie, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans au moins, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit dès lors être écarté.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
4. Aux termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...).".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. C... était, à la date de l'arrêté attaqué, marié depuis treize mois à une ressortissante française qui était en état de grossesse. Toutefois, outre que ces attaches étaient très récentes, il ressort des pièces du dossier que M. C... avait fait l'objet de deux décisions d'éloignement avant l'arrêté attaqué et avait adopté à deux reprises un comportement menaçant l'ordre public. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Aude aurait commis une erreur d'appréciation en lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de
l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée par Me G... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me G... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2020, où siégeaient :
- Mme E... F..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. D... B..., premier conseiller,
- M. François Point, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 octobre 2020.
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N° 19MA04431
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