Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 juillet 2018 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office en cas d'inexécution de cette mesure d'éloignement et, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour dès la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1901850 du 24 juin 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 juillet 2019, Mme E..., représentée par Me Candon, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 juin 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 juillet 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant de l'existence de soins adaptés à son état de santé dans son pays d'origine ;
- la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur d'appréciation au regard du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français contrevient aux dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le délai qui lui est accordé pour quitter volontairement le territoire français est insuffisant.
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sanson,
- et les observations de Me Candon, représentant Mme E....
Considérant ce qui suit :
1. Mme E..., ressortissante ukrainienne entrée en France au cours de l'année 2014, relève appel du jugement du 24 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 juillet 2018 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office en cas d'inexécution de cette mesure d'éloignement.
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme E... est astreinte à la prise de glucocorticoïdes depuis l'année 1998, au cours de laquelle elle a subi une surrénalectomie bilatérale pour le traitement de la pathologie de Cushing dont elle souffrait. Pour contredire l'avis du collège de médecins de l'OFII du 26 mai 2018, selon lequel elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, Mme E... produit, d'une part, une attestation du ministère de la santé d'Ukraine du 15 août 2018 certifiant que l'hydrocortisone 10mg qui lui est prescrite en France n'est pas autorisée sur le marché ukrainien et, d'autre part, un certificat de son médecin ukrainien, étayé de descriptions précises, indiquant que les corticoïdes génériques qui lui ont été administrés lorsqu'elle était soignée en Ukraine ont entraîné des effets secondaires particulièrement handicapants, notamment des oedèmes du genoux et des ulcères stéroïdes. Il s'ensuit qu'en refusant de renouveler le titre de séjour de Mme E... et en prenant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, le préfet des BouchesduRhône a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 31311 et du 10 ° de l'article L. 5114 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
3. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme E... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 juillet 2018.
4. L'annulation de l'arrêté contesté implique nécessairement, au vu des motifs qui la fondent, sous réserve de l'absence de changement dans les circonstances de droit et de fait concernant la situation de l'intéressée, la délivrance à Mme E... d'un titre de séjour portant la mention " étranger malade ". Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer ce titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Mme E... d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1901850 du 24 juin 2019 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 juillet 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône, sous réserve de l'absence de changement dans les circonstances de droit et de fait, de délivrer à Mme E... un titre de séjour portant la mention " étranger malade " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à Mme E... une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente assesseure,
- M. Sanson, conseiller.
Lu en audience publique le 12 novembre 2020.
Le rapporteur,
signé
P. SansonLe président,
signé
J.-F. ALFONSI
La greffière,
signé
M. DE VELLIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 19MA03501
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