Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G... A... et Mme D... E... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2016 par lequel le maire de la commune de Boujan-sur-Libron a délivré à la SCEA Domaine Haute Condamine un permis de construire.
Par un jugement n° 1604521 du 1er février 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 mars et 26 juin 2018, M. et Mme A..., représentés par la SCP Cyrielle Bonomo Fay, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er février 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2016 du maire de Boujan-sur-Libron ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Boujan-sur-Libron une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils ont intérêt pour agir à l'encontre de l'arrêté du 6 juillet 2016 ;
- en méconnaissance de l'arrêté n° 2014324-0021 du 20 novembre 2014, le préfet de Région n'a pas été consulté ; cette absence de consultation constitue une violation de la procédure prévue par l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme ; il résulte des visas de l'arrêté du 21 novembre 2016 que la consultation du préfet de Région est intervenue plus de deux mois après la délivrance du permis de construire contesté ;
- les informations relatives à l'assainissement sont relatives au projet précédent et refusé et sont, dès lors, erronées ;
- le permis a été obtenu par fraude ;
- l'autorité compétente a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'aucun élément ne justifie de la potabilité de l'eau issue du forage prévu, ce qui constitue une violation de l'article A 4 du plan local d'urbanisme (PLU) et l'avis rendue par l'Autorité Régionale de Santé ne prive pas la pétitionnaire de respecter les prescriptions du PLU ;
- le terrain n'est pas desservi par le réseau public d'électricité ;
- en outre, la construction ne répond pas aux exigences de l'article A 11 du PLU ;
- a été méconnu l'article 8 des dispositions générales du PLU ;
- ont été méconnues les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2018, la commune de Boujan-sur-Libron, représentée par la SELARL C...-Berthelsen conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme A... d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal, la demande était irrecevable faute pour les époux A... de justifier d'un intérêt pour agir ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2018, la SCEA Domaine Haute Condamine, représentée par la SCP SVA, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des époux A... d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal, la demande était irrecevable faute pour les époux A... de justifier d'un intérêt pour agir ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Boujan-sur-Libron, et de Me F..., représentant la SCEA Domaine Haute Condamine.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... font appel du jugement du 1er février 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juillet 2016 par lequel le maire de Boujan-sur-Libron a délivré à la SCEA Domaine Haute Condamine un permis de construire une cave particulière viticole.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
4. D'une part, le terrain d'assiette du projet en litige est situé à plus de 700 mètres du terrain d'assiette sur lequel est construite la maison des requérants, les deux terrains étant séparés par la voie communale n° 2 qui permet l'accès au domaine Sauvageot appartenant à M. et Mme A..., la route départementale 15E2 et un chemin rural, voie d'accès aux parcelles d'assiette du projet en litige. Par suite, la voie d'accès audit projet n'est pas celle qui dessert la propriété des requérants. Dans ces conditions, et alors que les époux A... ne peuvent utilement se prévaloir des caractéristiques de la route départementale 15E2 dès lors qu'elle ne constitue pas la voie de desserte de leur propriété et supporte un trafic qui n'est pas que local, il n'est pas établi que le projet en litige pourrait être de nature à affecter les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leur bien.
5. D'autre part, compte tenu des mesures techniques dont est assorti le projet et de la distance séparant la propriété des requérants et le lieu d'implantation du projet, il n'est pas établi que le projet est susceptible de générer des nuisances olfactives de nature à affecter directement les conditions de jouissance de leur bien.
6. Il résulte de ce qui précède que les époux A... n'ont pas intérêt pour agir à l'encontre de l'arrêté du 6 juillet 2016 par lequel un permis de construire une cave viticole a été délivré à la SCEA Domaine Haute Condamine et ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande d'annulation dudit arrêté.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Boujan-sur-Libron, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, verse à M. et Mme A..., la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants, le versement d'une part, à la commune de Boujan-sur-Libron et d'autre part, à la SCEA Domaine Haute Condamine, d'une somme de 1 500 euros chacun au titre des mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme A... verseront d'une part, à la commune de Boujan-sur-Libron et d'autre part, à la SCEA Domaine Haute Condamine une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A..., à Mme D... E... épouse A..., à la commune de Boujan-sur-Libron et à la SCEA Domaine Haute Condamine.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020, où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme B..., président assesseur,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2020.
N° 18MA01325 4