Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler la décision du 28 juin 2017 par laquelle le recteur de l'académie de Nice a rejeté sa demande tendant au retrait de l'arrêté du 21 novembre 2016 le plaçant en retraite et à l'obtention d'une prolongation de son activité professionnelle ainsi que la décision du 5 septembre 2017 rejetant son recours gracieux contre cette décision et, d'autre part, d'enjoindre au recteur de l'académie de Nice de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1704056 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2019, M. C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ;
2°) d'annuler les décisions du recteur de l'académie de Nice en date des 28 juin 2017 et 5 septembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Nice de procéder à sa réintégration et de reconstituer sa carrière dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire car sa note en délibéré n'a pas été communiquée au recteur ;
- le jugement est insuffisamment motivé car il ne répond pas aux moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, du défaut de motivation, de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation articulés contre les deux décisions attaquées ;
- la décision du 28 juin 2017 est insuffisamment motivée ;
- en édictant cette décision, le recteur a commis une erreur de droit dans l'application des dispositions des articles L. 242-3 et L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration car la décision du 21 novembre 2016 étant illégale, elle pouvait et devait être retirée ;
- le recteur a commis une erreur de droit en sollicitant l'avis du chef d'établissement sur l'opportunité de son maintien en fonctions et s'est cru tenu de le suivre ;
- cette décision est entachée d'erreur d'appréciation eu égard au vice du consentement entachant sa demande et à l'intérêt qu'il y avait à le maintenir en fonctions ;
- la décision du 5 septembre 2017 est insuffisamment motivée ;
- le recteur a commis une erreur de droit en sollicitant l'avis du chef d'établissement sur l'opportunité de le maintenir en fonctions et s'est cru tenu de le suivre ;
- cette décision est entachée d'erreur d'appréciation eu égard au vice du consentement entachant sa demande et à l'intérêt qu'il y avait à le maintenir en fonctions ;
- cette décision méconnaît son droit constitutionnel à l'emploi.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2020, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 7 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 octobre 2020.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 25 octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. G... Grimaud, rapporteur ;
- les conclusions de M. D... Thielé, rapporteur public ;
- et les observations de Me B..., substituant Me E..., représentant M. C....
Vu la note en délibéré produite pour M. C..., enregistrée le 7 décembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du recteur de l'académie de Nice en date du 21 novembre 2016, M. C... a été admis, sur sa demande, à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er octobre 2017. Par un courrier daté du 5 avril 2017, M. C... a sollicité le retrait de cet arrêté ainsi que son maintien en fonctions. Cette demande a été rejetée le 28 juin 2017 par le recteur de l'académie de Nice, qui a confirmé cette décision le 5 septembre 2017 à la suite d'un recours gracieux présenté par M. C... le 19 juillet 2017.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire ". En vertu des dispositions de l'article R. 731-3 de ce code : " A l'issue de l'audience, toute partie à l'instance peut adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré ".
3. Dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge administratif a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision.
4. En l'espèce, si M. C... a produit une note en délibéré le 29 mai 2019, celle-ci se bornait à réitérer l'un des moyens soulevés par le requérant dans ses précédentes écritures et ne contenait donc l'exposé d'aucune circonstance de fait ou élément de droit dont le requérant n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction. Par ailleurs, et en tout état de cause, le tribunal n'a pas fait droit à ce moyen, qui n'a dès lors eu aucune influence sur le jugement de l'affaire. Le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de l'instruction doit dès lors être écarté.
5. En second lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
6. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué répond en son point 2 au moyen tiré de l'incompétence des auteurs des décisions attaquées, en son point 3 au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions et en ses points 8 et 9 aux moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation entachant la décision du 28 juin 2017. Enfin, le jugement, en son point 13, écarte comme inopérants les moyens de l'illégalité de la décision du 5 septembre 2017 en ce qu'elle rejette la prolongation d'activité présentée par M. C..., en estimant que le recteur de l'académie de Nice était en situation de compétence liée pour rejeter cette demande. M. C... n'est donc pas fondé à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision du 28 juin 2017 :
7. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. /A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / 2° Infligent une sanction ; / 3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; / 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; / 5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ".
8. La décision du 28 juin 2017, qui rejette la demande de retrait de l'arrêté du 21 novembre 2016 admettant M. C... en retraite, n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en application de ces dispositions, ni d'aucun autre principe ou disposition. Le moyen tiré de l'insuffisance de cette motivation de cette décision doit dès lors être écarté comment manquant en droit.
9. En deuxième lieu, il était loisible au recteur de solliciter l'avis du chef d'établissement sur l'intérêt pour le service à revenir sur la décision plaçant M. C... en retraite. Cette autorité, qui ne s'est pas crue tenue de suivre l'avis du chef d'établissement, n'a donc commis aucune erreur de droit en sollicitant cet avis.
10. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 242-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration est tenue de procéder, selon le cas, à l'abrogation ou au retrait d'une décision créatrice de droits si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait peut intervenir dans le délai de quatre mois suivant l'édiction de la décision ".
11. L'arrêté du 21 novembre 2016 dont M. C... sollicitait le retrait était intervenu depuis plus de quatre mois lorsque celui-ci a demandé au recteur de l'académie de Nice de le retirer. Il s'ensuit que cette autorité n'était pas tenue de retirer cette décision et n'a dès lors commis aucune erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 242-3 du code des relations entre le public et l'administration en s'abstenant de faire droit à la demande de retrait présentée par M. C....
12. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 242-4 du même code : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration peut, selon le cas et sans condition de délai, abroger ou retirer une décision créatrice de droits, même légale, si son retrait ou son abrogation n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers et s'il s'agit de la remplacer par une décision plus favorable au bénéficiaire ". Si, lorsque les conditions prévues par ces dispositions sont réunies, l'auteur d'une décision peut, sans condition de délai, faire droit à une demande de retrait présentée par son bénéficiaire, il n'est toutefois pas tenu de procéder à un tel retrait, alors même que la décision serait entachée d'illégalité. Il appartient ainsi à l'auteur de la décision d'apprécier, sous le contrôle du juge, s'il peut procéder ou non au retrait, compte tenu tant de l'intérêt de celui qui l'a saisi que de celui du service.
13. Si M. C... soutient, d'une part, qu'il n'a pas renseigné lui-même la demande de mise à la retraite sur le fondement de laquelle le recteur de l'académie de Nice a décidé de l'admettre à faire valoir ses droits à la retraite et, d'autre part, qu'il n'était pas en mesure de discerner les effets de cette demande eu égard à sa maîtrise insuffisante de l'écrit et au traitement médicamenteux qu'il suivait alors, il ne conteste pas avoir signé cette demande et il n'établit nullement qu'elle ferait suite à une erreur de sa part ou à une information inexacte de l'administration quant à l'impossibilité de percevoir une pension à taux plein. Par ailleurs, si l'attestation de Mme F..., collègue du requérant, fait état de difficultés de l'intéressé à s'exprimer à l'écrit, et si le certificat du Dr Caillaud, médecin de traitant de M. C..., indique que celui-ci était " perturbé psychologiquement l'été et l'automne 2016 " en raison d'un traitement psychotrope, il ne ressort ni de ces pièces, dont la seconde est imprécise et a été rédigée près de trois ans après les faits, ni des autres pièces du dossier que le requérant aurait été, à la date où il a signé sa demande de mise à la retraite, dans l'incapacité de comprendre son objet et ses effets. M. C... n'a d'ailleurs jamais fait état d'une telle erreur ou incapacité dans les recours gracieux ensuite adressés à l'administration, par lesquels il se bornait à émettre le voeu de poursuivre sa carrière, sans remettre en cause la validité de sa demande de mise en retraite. Enfin, si M. C... fait valoir que cette demande a été présentée dans un contexte de tension professionnelle liée à l'affectation d'un nouveau supérieur hiérarchique, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé avait déjà fait l'objet d'un rappel à l'ordre lors de l'entretien d'évaluation professionnelle pour 2013 et il n'apparaît pas que le conflit professionnel apparu en septembre 2015 aurait été de nature à amoindrir sa capacité de discernement ou à engendrer un sentiment de contrainte le conduisant à formuler sa demande de départ en retraite. La mise à la retraite de M. C... n'était dès lors pas entachée de l'illégalité que celui-ci lui impute. Par ailleurs, si le requérant se prévaut d'attestations d'enseignants faisant état de la qualité de son travail, il ressort par ailleurs des pièces du dossier que ses entretiens d'évaluation pour 2013, 2015 et 2016 faisaient état d'un comportement perfectible ayant conduit ses supérieurs hiérarchiques à alerter l'autorité territoriale sur son comportement. M. C... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision du 28 juin 2017 refusant de retirer l'arrêté du 21 novembre 2016 le plaçant en retraite serait entachée d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration.
En ce qui concerne la décision du 5 septembre 2017 :
14. En premier lieu, il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative.
15. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du 5 septembre 2017 ne peut être utilement soulevé par M. C....
16. En deuxième lieu, il était loisible au recteur de solliciter l'avis du chef d'établissement sur l'intérêt pour le service à revenir sur la décision plaçant M. C... en retraite. Cette autorité, qui ne s'est pas crue tenue par cet avis, n'a donc commis aucune erreur de droit en sollicitant cet avis.
17. En troisième lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit au point 13 ci-dessus, d'une part, que la demande de l'intéressé n'était entachée d'aucun vice du consentement et, d'autre part, que le recteur de l'académie de Nice n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation en rejetant la demande de prolongation d'activité de M. C....
18. En dernier lieu, si M. C... soutient que cette décision porte une atteinte disproportionnée au principe constitutionnel du droit à l'emploi, garanti par le cinquième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, cette décision n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire à l'intéressé de reprendre un emploi mais apprécie, respectivement, l'intérêt pour le requérant de conserver son emploi et l'intérêt, pour le service, de retirer ou non la décision admettant M. C... à la retraite sur sa demande, sans que cette appréciation soit entachée d'erreur, ainsi qu'il vient d'être dit. Elle ne porte donc pas une atteinte disproportionnée au droit à l'emploi de M. C....
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont, par leur jugement, rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 28 juin 2017 et 5 septembre 2017. Sa requête doit donc être rejetée.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
20. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par M. C... sur leur fondement soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Nice.
Délibéré après l'audience du 7 décembre 2020, où siégeaient :
- M. Guy Fédou, président,
- Mme H... I..., présidente assesseure,
- M. G... Grimaud, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 décembre 2020.
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N° 19MA04000