Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL SEC Immobilier a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 12 août 2016 par lequel le maire de Saint-Etienne-du-Grès a opposé un sursis à statuer sur sa déclaration préalable.
Par un jugement n°1607622 du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 15 février, 14 juin et 24 juin 2019, la commune de Saint-Etienne-du-Grès, représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 décembre 2018 ;
2°) de rejeter la requête présentée par la SARL SEC Immobilier devant le tribunal administratif de Marseille ;
3°) de mettre à la charge de la SARL SEC Immobilier la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune soutient que :
- la délibération prescrivant l'élaboration et la révision du plan local d'urbanisme a fait l'objet des mesures de publicité requises ;
- l'arrêté a été pris par une autorité compétente ;
- l'état d'avancement du plan local d'urbanisme était suffisant pour opposer un sursis à statuer ;
- le sursis à statuer était légalement fondé dès lors que le futur plan local d'urbanisme classait la parcelle en zone inconstructible ;
- il n'existait aucune décision tacite de non opposition à déclaration préalable.
Par des mémoires en défense enregistrés les 12 avril et 11 septembre 2019, la SARL SEC Immobilier, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, à l'annulation de la décision du 12 août 2016 portant sursis à statuer, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Saint-Etienne-du-Grès de lui délivrer une attestation de non opposition tacite sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, à ce qu'il soit enjoint à la commune de lui délivrer la déclaration préalable sollicitée dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Etienne-du-Grès la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la délibération prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme n'a pas été régulièrement publiée ;
- la décision a été prise par une autorité incompétente ;
- le projet de plan local d'urbanisme n'était pas suffisamment avancé ;
- le projet ne méconnait pas le futur plan local d'urbanisme dès lors qu'un classement en zone naturelle serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle était titulaire d'une décision tacite, en raison de l'illégalité de la demande de pièces complémentaires, et la décision en litige, qui doit être requalifiée en une décision de retrait d'une décision tacite de non opposition, a été prise sans que ne soit mise en oeuvre une procédure contradictoire ;
- l'illégalité de la demande de pièce entraîne l'illégalité de la décision de sursis à statuer.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
- et les observations de Me C... représentant la commune de Saint-Etienne-du-Grès et de Me F... substituant Me A..., représentant la SARL SEC Immobilier.
Une note en délibéré a été présentée pour la SARL SEC Immobilier le 4 février 2021.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Saint-Etienne-du-Grès relève appel du jugement du 21 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 12 août 2016 par lequel le maire de ladite commune a opposé un sursis à statuer sur la déclaration préalable de lotissement de la SARL SEC Immobilier.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " (...) A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan ". Aux termes de l'article R. 123-25 du même code dans sa version applicable au litige : " Tout acte mentionné à l'article R. 123-24 est affiché pendant un mois en mairie ou au siège de l'établissement public compétent et, dans ce cas, dans les mairies des communes membres concernées. Mention de cet affichage est insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la délibération du 16 décembre 2009 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Etienne-du-Grès, transmise en sous-préfecture d'Arles, a été affichée en mairie pendant un délai d'un mois à compter du 10 février 2010, tel qu'il ressort des mentions du certificat d'affichage du maire produit en appel, et mention de cet affichage a été publié dans la rubrique " annonces légales, Marchés Publics " du journal La Provence, qui est un journal départemental. Dans ces conditions, la société SEC Immobilier n'apportant aucun élément de nature à établir comme elle l'allègue que la délibération n'aurait pas été régulièrement publiée, le maire pouvait légalement opposer un sursis à statuer sur les demandes d'autorisations d'occupation ou d'utilisation des sols. La commune de Saint-Etienne-du-Grès est donc fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 12 août 2016 portant sursis à statuer.
4. Il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SARL SEC Immobilier en première instance.
5. En premier lieu, la décision portant sursis à statuer a été signée par M. B... E..., adjoint chargé de l'urbanisme, ayant reçu le 22 avril 2014 délégation du maire de Saint-Etienne-du-Grès à l'effet de suivre l'ensemble des questions relatives au droit de préemption et au plan d'occupation des sols, au pilotage des travaux destinés à l'élaboration du plan local d'urbanisme, à l'instruction et la délivrance des autorisations d'occupations des sols et demandes de certificats et de renseignements d'urbanisme, ou encore au suivi des contentieux de l'urbanisme, délégation régulièrement transmise en sous-préfecture d'Arles le même jour et publiée le 28 avril 2014. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit donc être écarté.
6. En deuxième lieu, la possibilité prévue par les dispositions de l'article L. 153-11 précité vise à permettre à l'autorité administrative de ne pas délivrer des autorisations pour des travaux, constructions ou installations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme. Il appartient à l'autorité compétente de prendre notamment en compte les orientations du projet d'aménagement et de développement durables dès lors qu'elles traduisent un état suffisamment avancé du futur plan local d'urbanisme pour apprécier si un projet serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuses l'exécution de ce plan.
7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Saint-Etienne-du-Grès a prescrit, par délibération du 16 décembre 2009, l'élaboration du plan local d'urbanisme. Le conseil municipal a débattu des orientations du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) le 30 juillet 2015. Le projet de règlement et les documents graphiques, classant le terrain de la société pétitionnaire en zone naturelle, étaient déjà adoptés en juin 2016. Par suite, l'état d'avancement des travaux d'élaboration de ce nouveau document d'urbanisme permettait, à la date de la décision attaquée, de préciser la portée exacte des modifications projetées.
8. D'autre part, le projet d'aménagement et de développement durables prévoyait notamment la requalification des entrées de ville et la prise en compte des risques en évitant d'exposer davantage de populations aux aléas et en limitant l'urbanisation sur les zones sensibles. Le projet de planche graphique A adopté en juin 2016 prévoyait de classer la parcelle de la société pétitionnaire en zone Ns, secteur naturel de services. La version n° 11 du projet de règlement, adoptée le 23 juin 2016, interdisait, pour les zones naturelles, tout aménagement et toute construction ou installation nouvelle, à l'exception, pour la zone Ns, des aires de stationnement paysagères et perméables. Le projet de la société pétitionnaire, consistant en un lotissement de deux lots à bâtir, nécessitant d'implanter de nouvelles constructions en zone naturelle, était donc de nature à compromettre l'exécution du plan local d'urbanisme. La société pétitionnaire soutient que le futur classement projeté en zone Ns était entaché d'erreur manifeste d'appréciation et n'aurait donc pu fonder un sursis à statuer. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la parcelle en litige, située en entrée de ville, est à l'état naturel, bordée au nord et à l'est par un secteur à l'état naturel et par des parcelles agricoles, et est séparée d'une zone construite par une vaste parcelle agricole. En outre, la parcelle en litige est soumise à un risque inondation fort à modéré, tel qu'il ressort du classement en niveau de risque réalisé en juin 2016 par la commune sur la base du porter à connaissance du préfet d'avril 2015. Dans ces conditions, le maire de Saint-Etienne-du-Grès pouvait légalement opposer un sursis à statuer à la déclaration préalable de lotissement de la société SEC Immobilier.
9. En troisième lieu, l'illégalité d'une décision de l'administration sollicitant du pétitionnaire la production de pièces complémentaires ne saurait avoir pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d'un permis de construire tacite ou d'une décision tacite de non opposition à déclaration préalable. Dans ces conditions, les moyens invoqués par la société SEC Immobilier, tirés de ce qu'en raison de l'illégalité de la demande de pièces complémentaires, une décision tacite de non opposition à déclaration préalable serait née, de ce que l'arrêté portant sursis à statuer en litige aurait retiré cette décision tacite, et de ce que ce retrait serait intervenu sans que ne soit mise en oeuvre une procédure contradictoire préalable, sont inopérants et doivent être écartés.
10. En quatrième lieu, l'illégalité d'une demande de l'administration au pétitionnaire tendant à la production d'une pièce complémentaire qui ne peut être requise est uniquement de nature à entacher d'illégalité la décision tacite d'opposition prise en application de l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme, c'est-à-dire la décision tacite d'opposition fondée sur l'absence de production des pièces demandées. Or, la décision en litige étant une décision de sursis à statuer, et non une décision tacite d'opposition prise en application de l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme, la société SEC Immobilier n'est pas fondée à soutenir que l'illégalité de la demande de pièce entrainerait l'illégalité de la décision de sursis.
11. Il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Etienne-du-Grès est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 décembre 2018, ainsi que le rejet de la requête présentée par la société SEC Immobilier devant ce tribunal.
Sur les frais exposés dans l'instance :
12. La commune de Saint-Etienne-du-Grès n'étant pas partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions de la SARL SEC Immobilier présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SARL SEC Immobilier la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Saint-Etienne-du-Grès au titre des frais exposés sur le même fondement.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 décembre 2018 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la SARL SEC Immobilier devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : La SARL SEC Immobilier versera la somme de 1 500 euros à la commune de Saint-Etienne-du-Grès sur le fondement de L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Etienne-du-Grès et à la SARL SEC Immobilier.
Délibéré après l'audience du 4 février 2021 où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 février 2021.
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N° 19MA00867
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