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08/04/2021 | FRANCE | N°19MA03018

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 08 avril 2021, 19MA03018


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des droits supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1800936 du 6 mai 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 juillet 2019, le 14 février 2020 et le 2

5 février 2021, M. et Mme E..., représentés par la société d'exercice libéral à responsabilité lim...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des droits supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1800936 du 6 mai 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 juillet 2019, le 14 février 2020 et le 25 février 2021, M. et Mme E..., représentés par la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Juris Vendôme, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 mai 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions litigieuses ;

3°) de prononcer la restitution de toutes les sommes acquittées à ce titre, outre le paiement des intérêts moratoires ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 856 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne permet pas de comprendre les motifs pour lesquels les éléments de preuve produits ont été écartés ;

- la somme de 400 000 euros créditée sur le compte bancaire détenu à la banque BNP-Paribas provient d'un prêt consenti par la banque HSBC de Zurich ;

- la jurisprudence n'impose aucune obligation de justification de l'origine de fonds ayant servi au remboursement d'une avance bancaire ;

- refuser le caractère probant des pièces produites revient à méconnaître le principe d'égalité des armes dans la procédure juridictionnelle.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 novembre 2019 et le 16 mars 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête présentée par M. et Mme E....

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a désigné, par décision du 19 mars 2021, Mme Mylène Bernabeu, présidente, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 3ème chambre à compter du 20 mars 2021, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme C...,

- et les observations de Me A... du cabinet Juris Vendôme représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle douanier effectué le 18 mars 2010 sur le territoire de la commune d'Annemasse (Haute-Savoie) ayant donné lieu à la découverte d'une somme de 10 100 euros en espèces en la possession de M. E..., qui revenait de Suisse, l'administration fiscale a procédé à l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme E... au titre des années 2009 et 2010. A l'issue de ce contrôle, l'administration a notamment réintégré au titre de la déclaration d'ensemble de leurs revenus de l'année 2009, la somme de 400 000 euros en base, virée le 4 mars 2009 par la banque HSBC de Zurich (Suisse) sur le compte bancaire de M. E... ouvert auprès de la banque BNP-Paribas sur le fondement initial des dispositions de l'article 1649 quater A4 du code général des impôts, auxquelles l'administration fiscale a substitué celles du 3ème alinéa de l'article 1649 A lors du rejet de leur seconde réclamation. Par proposition de rectification du 11 décembre 2012 établie selon la procédure contradictoire, l'administration a assujetti M. et Mme E... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2009, assorties des pénalités de retard et de la majoration de 40 % prévue à l'article 1758 du code général des impôts. Après avoir contesté en vain devant l'administration, les suppléments d'impôt sur le revenu qui leur ont été réclamés, M. et Mme E... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Montpellier. Par un jugement du 6 mai 2019, le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des droits supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2009. M. et Mme E... relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Montpellier, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments des parties, a répondu aux moyens dont il était saisi, en particulier à celui tiré du caractère non imposable de la somme de 400 000 euros portée le 4 mars 2009 au crédit du compte de M. E... ouvert à la BNP-Paribas, au point 4 de ce jugement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article 1649 A du code général des impôts, applicable au présent litige : " (...) Les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative et toutes personnes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou espèces doivent déclarer à l'administration des impôts l'ouverture et la clôture des comptes de toute nature (1). Les personnes physiques, (...) domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, détenus, utilisés ou clos à l'étranger. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par décret (2). Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables ". Ces dispositions, qui instaurent l'obligation, pour tout contribuable domicilié en France, de déclarer à l'administration les références de tout compte bancaire dont il est titulaire à l'étranger, prévoient qu'à défaut d'une telle déclaration, les fonds ayant transité par ce compte constituent des revenus imposables, sauf, pour le contribuable titulaire du compte, à apporter la preuve que les sommes en question n'entraient pas dans le champ d'application de l'impôt ou en étaient exonérées ou qu'elles constituaient des revenus qui avaient déjà été soumis à l'impôt.

5. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a constaté, d'une part, que les requérants, résidents fiscaux en France, n'avaient pas déclaré, au titre de l'année 2009, les comptes clients 6 102867 001 11 et 6 102867 650 11 ouverts au nom de M. E... respectivement à la banque HSBC de Zurich et celle de Genève, ainsi que le compte client ouvert au nom de " Pecolalou " dans les livres de la banque HSBC de Genève sous le numéro 6 234320, d'autre part, que la somme de 400 000 euros avait été débitée, le 4 mars 2009, du compte bancaire détenu à la HSBC de Zurich et porté au crédit d'un compte bancaire ouvert en France sous le numéro 00000432959 59 au nom de M. E... auprès de la banque BNP-Paribas. L'administration fiscale a estimé que cette somme provenant de l'étranger par l'intermédiaire d'un compte non déclaré constituait un revenu imposable en application de la présomption prévue par les dispositions précédemment citées au point 4.

6. Dans le but de faire échec à cette présomption, les requérants soutiennent que cette somme d'argent est non imposable dès lors qu'elle constitue un prêt consenti par la banque HSBC de Zurich, afin de leur permettre de solder un prêt relais de même montant consenti par la banque nationale BNP-Paribas, dans l'attente de la vente de leur château de Chouvigny (département de l'Allier), pour l'acquisition d'une propriété sur le territoire de la commune d'Oms (Pyrénées-Orientales). Par ailleurs, après avoir soutenu dans le cadre des opérations de vérification, que ce prêt avait été remboursé pour le compte de M. E..., le 29 mai 2009, par M. K. L., un entrepreneur avec lequel il avait eu des relations d'affaires au Nigéria, en remboursement d'une dette qu'il avait contractée à son égard en 2001, M. E... a ensuite soutenu que, M. K. L. n'avait en réalité pas versé les 400 000 euros sur son compte de la banque HSBC, le conduisant à solder lui-même le prêt par le débit du compte " Pecolalou " le 12 mars 2010. Les requérants produisent un courrier émanant de la banque HSBC du 17 décembre 2014 indiquant sans plus de précision, qu'un prêt a été consenti sur le compte de M. E... (n° client 6 102867) garanti par le nantissement des avoirs sur le compte " Pecolalou " (n° client 6 234320). Ce même courrier indique également ne pas pouvoir donner suite à la demande de M. E... de produire une attestation aux termes de laquelle il y aurait eu " compensation " entre ces deux comptes. Ils produisent aussi des relevés d'opérations bancaires d'après lesquels une avance à terme fixe d'un montant de 600 000 CHF a été consentie à M. E... le 27 février 2009 au taux d'intérêt de 1,50 %, débitée du compte n° 102867.650.11, et créditée le même jour sur le compte n° 102867.001.11, et après conversion de cette somme en euros, ce même compte a été débité le 3 mars 2009 de 400 000 euros en vue d'un transfert sur le compte BNP-Paribas détenu par M. E.... Un relevé du compte " Pecolalou " (n° client 6 234320) émanant d'HSBC au 31 mars 2010, mentionne une opération de débit de 410 151,81 CHF le 12 mars 2010 " en faveur d'un client ". Ces pièces ne permettent pas d'établir que ce mouvement bancaire du compte d'HSBC Zurich au compte BNP-Paribas résulterait d'un prêt souscrit auprès de la banque suisse. En effet, ni au cours des opérations de vérification, ni devant le tribunal, les requérants n'ont produit le contrat de prêt allégué de la banque HSBC Zurich. Par ailleurs, cette avance au terme fixe qui est en principe remboursée au terme de l'échéance, capital emprunté et intérêts dus, n'a été remboursée que plus d'un an après le terme fixe, sans qu'aucun nouvel avis ne soit émis. En appel, les requérants produisent de nouvelles pièces dont une nouvelle attestation émanant d'HSBC en date du 24 juillet 2019 indiquant que par contrat signé le 25 février 2009, un prêt sous forme de crédit Lombard a été consenti à M. E... sur le compte n° 6 102867, que ce dernier l'a remboursé le 1er mars 2010 depuis le compte n° 6 234320, la copie d'un contrat de crédit Lombard accordé par la banque HSBC daté du 25 février 2009 ainsi qu'un courrier manuscrit de M. E... du même jour prétendument préciser la durée et le montant de l'avance souhaitée. Toutefois, le contrat de prêt, s'il mentionne de façon manuscrite le nom du requérant, ne comporte aucune indication du montant, du taux d'intérêt du prêt accordé, du terme fixe ou encore des garanties adossées sur les actifs nantis, et le document manuscrit produit est totalement illisible. Aucun document n'est produit pour attester de l'utilisation effective de cette somme pour le remboursement du prêt relais de la BNP-Paribas. Ces documents ne permettent pas d'établir que le transfert d'argent en litige résulterait d'un prêt qui leur aurait été consenti. En outre, les requérants ne justifient pas de ce que la somme débitée du compte " Pecolalou " constitutive selon eux du remboursement du prêt en cause, aurait elle-même déjà été imposée à quelque titre que ce soit ou n'aurait pas été imposable. Dans ces conditions, M. et Mme E..., qui ne renversent pas la présomption instituée par les dispositions précitées de l'article 1649 A du code général des impôts, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a regardé la somme en litige comme constitutive d'un revenu d'origine indéterminée au titre de l'année 2009.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande. Par conséquent, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2021, où siégeaient :

- Mme Bernabeu, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme D..., première conseillère,

- Mme F..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 avril 2021.

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