Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... A... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1905049 du 7 octobre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 29 juillet 2020, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La procédure a été régulièrement communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.
L'aide juridictionnelle totale a été accordée à Mme A... D... par une ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille du 22 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... D..., ressortissante albanaise, relève appel du jugement du 7 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mai 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il appartient au juge, pour contrôler si l'administration a correctement apprécié les possibilités d'accès effectif aux soins, de se prononcer au vu de l'ensemble des éléments du dossier. Lorsque le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que les soins nécessaires étaient disponibles dans ce pays, il appartient à l'étranger d'apporter tous éléments probants de nature à contredire cette affirmation.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'état de santé de Mme A... D..., qui souffre d'un état de stress post-traumatique avec syndrome dépressif, lié à des violences et menaces de mort subies de la part de son ex-mari et de son ex beau-fils, et pour lequel elle bénéficie d'un suivi psychiatrique et prend un traitement à base de psychotropes, antidépresseurs, anxiolytiques et hypnotiques, présente un caractère de gravité. Toutefois le collège de médecins de l'OFII a considéré, dans son avis du 6 janvier 2019, que l'intéressée pouvait voyager sans risque et qu'elle pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Albanie. Si l'intéressée soutient qu'elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié en Albanie, elle ne produit, d'une part, que des éléments très généraux provenant d'un rapport de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de 2018 sur la faible protection accordée par les autorités albanaises aux victimes de violences domestiques et, d'autre part, des certificats médicaux relatant l'origine traumatique familiale de ses pathologies, sans apporter d'éléments pertinents de nature à démontrer tant un risque de réactivation ou d'aggravation des pathologies en cas de retour en Albanie que l'impossibilité de suivre effectivement un traitement approprié dans son pays d'origine, le cas échéant en s'éloignant de son ex-mari. Dans ces conditions, Mme A... D... n'est pas fondée à soutenir que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 précitées auraient été méconnues.
5. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. "
6. Mme A... D... ne produit pas d'éléments probants sur la réalité et l'intensité des risques auxquels elle serait personnellement et actuellement exposée en cas de retour en Albanie, en raison des violences conjugales dont elle a fait l'objet dans le passé. Au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 29 septembre 2017 confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 21 mars 2018. Ainsi, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement méconnait les stipulations précitées.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
8. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A... D..., il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction.
Sur les frais liés au litige :
9. L'Etat n'étant pas la partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme A... D... présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A... D..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2021 où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 avril 2021.
La rapporteure,
Signé
E. B...La présidente,
Signé
L. HELMLINGER
La greffière,
signé
D. GIORDANO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
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N° 20MA02609
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