Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... G... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2016 par lequel le maire de la commune de Mirabeau a, au nom de l'Etat, accordé un permis de construire à M. D... pour la surélévation de son habitation.
Par un jugement n° 1606255 du 2 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 19 juillet 2019, Mme G..., représentée par Me B... et Me I..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 2 mai 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2016 par lequel le maire de Mirabeau a, au nom de l'Etat, accordé un permis de construire à M. D... pour la surélévation de son habitation et la décision de rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de tout succombant la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que le principe du contradictoire n'a pas été respecté ;
- le projet méconnait les dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ;
- les pétitionnaires n'avaient pas qualité pour déposer la demande ;
- le projet méconnait les dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 août 2019, M. et Mme D..., représentés par Me H..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme G... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que les moyens de la requête ne sont infondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 novembre 2019, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. F... pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteure publique,
- et les observations de Me I... représentant Mme G... et de Me H... représentant M. et Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... relève appel du jugement du 2 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 janvier 2016 par lequel le maire de Mirabeau a, au nom de l'Etat, accordé un permis de construire à M. D... pour la surélévation de son habitation située au lieu-dit Les Sales, et la décision de rejet de son recours gracieux.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 611-1-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire est en état d'être jugée, les parties peuvent être informées de la date ou de la période à laquelle il est envisagé de l'appeler à l'audience. Cette information précise alors la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2. Elle ne tient pas lieu de l'avertissement prévu à l'article R. 711-2. ". Aux termes de l'article R. 613-1 du même code : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours (...) Lorsqu'une partie appelée à produire un mémoire n'a pas respecté, depuis plus d'un mois, le délai qui lui a été assigné par une mise en demeure comportant les mentions prévues par le troisième alinéa de l'article R. 612-3 ou lorsque la date prévue par l'article R. 611-11-1 est échue, l'instruction peut être close à la date d'émission de l'ordonnance prévue au premier alinéa. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le tribunal a informé les parties, en application de l'article R. 611-1-1 précité, par courrier du 15 novembre 2016, que la clôture était susceptible d'intervenir à compter du 1er janvier 2017. Le mémoire produit par le préfet des Alpes de Haute-Provence le 30 janvier 2017 a été communiqué aux parties le 1er février 2017 et reçu le même jour. L'ordonnance de clôture d'instruction immédiate a été prise, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 précité, le 21 février 2017. Un délai de 20 jours s'est donc écoulé entre la communication du dernier mémoire du préfet et l'ordonnance de clôture et Mme G... aurait donc pu répliquer à ce mémoire dans ce délai raisonnable. La clôture de l'instruction n'est donc pas intervenue dans des conditions irrégulières. En outre, dès lors que les mémoires produits par Mme G... les 14 et 17 mars 2017 l'ont été après clôture de l'instruction, le tribunal n'était pas tenu de procéder à une réouverture de l'instruction et de communiquer ces mémoires qui ne contenaient aucune circonstance de droit ou de fait nouvelles que Mme G... n'était pas en mesure de faire valoir avant la clôture. Mme G... n'est donc pas fondée à soutenir que le principe du contradictoire aurait été méconnu et que le jugement en litige serait entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".
5. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
6. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment des plans de coupe, du plan de masse, de la notice et des photographies d'insertion, que les services instructeurs ont pu apprécier la consistance et l'ampleur du projet de surélévation de la construction de M. D.... Les plans de coupe notamment permettaient de s'assurer du volume du projet, et d'identifier les surélévations réalisées côtés sud et côté nord. Les plans permettent également de comprendre sans ambiguïté le projet avant et après surélévation, avec notamment une inversion de pente pour récupérer des combles. Les photographies et documents d'insertion permettent également de s'assurer de l'insertion du projet dans son environnement proche et lointain, notamment son imbrication avec les maisons de village immédiatement voisines, le dossier n'ayant pas à faire figurer l'ensemble des constructions du hameau. Les pièces du dossier permettent également de comprendre qu'il existe un interstice entre les murs des propriétés D... et G... et la coupe 1PC3 représente d'ailleurs l'existence d'un chéneau. Enfin le formulaire Cerfa mentionne que la surélévation redonne à la construction une volumétrie proche des constructions voisines, ce qui ressort effectivement du dossier, et le pétitionnaire n'a jamais indiqué que le projet serait " dans la continuité de la ligne de toiture ", mais simplement dans un volume proche.
7. D'autre part, le projet en litige étant un projet de surélévation ayant pour effet de créer 40 m² de surface de plancher, sans changer le raccordement existant au réseau d'assainissement, les pièces du dossier n'avaient pas à faire apparaitre les modalités de raccordement du projet à ce réseau. En outre, les plans de coupe font figurer à l'extrémité des nouvelles toitures des gouttières permettant ainsi la récupération des eaux de pluie, alors que le réseau existant de collecte des eaux par le biais de caniveaux est inchangé. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'incomplétude du dossier au regard des dispositions précitées ne peuvent qu'être écartés.
8. En second lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; / c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique ". En vertu du dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code : " La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis. ".
9. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur, ni d'exiger de lui la production d'un document établissant soit qu'il est seul propriétaire d'un mur mitoyen ou qu'il a l'accord de l'autre copropriétaire de ce mur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Il résulte de ce qui précède que les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude.
10. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif.
11. Il ressort du formulaire Cerfa que le pétitionnaire a attesté avoir qualité pour déposer la demande de permis de construire. Aucune pièce du dossier ne permet d'établir, contrairement à ce qui est soutenu, que les limites de propriété ne seraient pas correctement représentées sur les plans, que le projet prendrait appui sur un mur mitoyen ou que le pétitionnaire aurait tenté de dissimuler qu'il existe actuellement un chéneau permettant de recueillir les eaux de pluie provenant notamment de la toiture des consorts D.... Les pièces du dossier montrent en effet l'interstice existant entre l'extrémité de la toiture des consorts D... sur la parcelle Y 184 et le mur de Mme G... sur la parcelle Y 156, le chéneau en question, l'inversion prévue de la pente de la toiture D..., de laquelle ne s'écouleront donc plus les eaux de pluie en direction du chéneau, ainsi que la subsistance de l'interstice, que l'architecte a d'ailleurs proposé soit de colmater par un isolant et un joint soit de recouvrir d'un solin étanche. En outre, contrairement à ce qui est soutenu, les plans indiquent les hauteurs et les matériaux utilisés et le pétitionnaire n'avait pas à représenter les dimensions de la cave ou la limite de propriété au droit de la cave dès lors que le projet ne porte que sur une surélévation. Egalement, la circonstance, à la supposer établie, qu'il faudrait passer sur la propriété de Mme G... pour réaliser les travaux est sans incidence sur la qualité du pétitionnaire, s'agissant d'une circonstance relative aux conditions d'exécution des travaux, et le permis étant par ailleurs délivré sous réserve des droits des tiers. Aussi, il ne ressort nullement des pièces du dossier que le pétitionnaire n'aurait aucun droit pour déposer la demande ou que la demande aurait été frauduleuse. Le moyen tiré de l'absence de qualité du pétitionnaire ne peut donc qu'être écarté.
12. Il résulte de celui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif a rejeté sa requête.
Sur les frais exposés dans l'instance :
13. M. et Mme D... et l'Etat n'étant pas parties perdantes à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par Mme G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de Mme G... la somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme D... en application des mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.
Article 2 : Mme G... versera la somme de de 2 000 euros à M. et Mme D... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... G..., à M. et Mme J... et Hélène D..., et à la ministre de la cohésion de territoires et des relations avec les collectivités.
Copie de l'arrêt sera transmise à la commune de Mirabeau et au préfet des Alpes-de-Haute-Provence.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2021 où siégeaient :
- M. F..., président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme C..., première conseillère,
- Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 juin 2021.
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N° 19MA03384
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