Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2016 par lequel le préfet du Gard a approuvé le plan de prévention des risques inondation (PPRI) sur le territoire de la commune de Castillon-du-Gard, en tant qu'il classe une partie de sa parcelle cadastrée section D n° 1080 en zone non urbanisée d'aléa résiduel, ainsi que la décision du 3 février 2017 du préfet rejetant son recours gracieux formé à l'encontre de la décision précitée.
Par un jugement n° 1701017 du 5 mars 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 15 avril 2019, sous le n° 19MA01726, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 5 mars 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2016, ainsi que la décision du 3 février 2017 par laquelle le préfet du Gard a rejeté son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions de la commission d'enquête n'ont pas été consignées dans un document séparé ;
- le rapport de la commission et ses conclusions sont insuffisamment motivés ;
- le classement de la partie basse de sa parcelle cadastrée section D n° 1080 en zone R-Nu est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente en violation des dispositions de l'article R. 122-17 du code de l'environnement.
Un courrier du 12 avril 2021 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
Une ordonnance portant clôture immédiate de l'instruction a été émise le 21 mai 2021.
Un mémoire présenté par la ministre de la transition écologique a été enregistré le 1er juin 2021, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 ;
- les décisions n° 360212 des 26 juin 2015 et 3 novembre 2016 du Conseil d'Etat statuant au contentieux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,
- et les observations de Me B... représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... relève appel du jugement du 5 mars 2019 du tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 septembre 2016 par lequel le préfet du Gard a approuvé le plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) sur le territoire de la commune de Castillon-du-Gard en tant qu'il classe une partie de sa parcelle cadastrée section D n° 1080 en zone non urbanisée d'aléa résiduel et de la décision du 3 février 2017 par laquelle le préfet du Gard a rejeté son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du rapport et des conclusions de la commission d'enquête :
2. Aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. (...) Après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier et après avis des conseils municipaux des communes sur le territoire desquels il doit s'appliquer, le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé par arrêté préfectoral (...) ". L'article R. 123-19 du même code dispose, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies./ Le rapport comporte le rappel du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public./ Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ". La commission d'enquête n'est pas tenue de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête. Elle doit porter une analyse sur les questions soulevées par ces observations et émettre un avis personnel sur le projet soumis à enquête en indiquant les raisons qui déterminent le sens de cet avis.
3. Si les conclusions de la commission d'enquête n'ont pas été consignées, comme l'exigent les dispositions précitées, dans un document séparé, elles figurent dans une partie distincte du rapport aisément identifiable. Par suite, les dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'environnement n'ont pas été méconnues.
4. Il ressort des pièces du dossier que le rapport de la commission d'enquête comprend plusieurs parties dont un point 3 concernant l'enquête au niveau de la commune de Castillon-du-Gard relatif au bilan et à la synthèse des observations et un point 3.5 analysant de façon détaillée ces observations, les réponses de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) et l'avis de la commission d'enquête. Il ressort de ce point 3.5 que si, parfois, la commission d'enquête a estimé que les réponses de la DDTM étaient satisfaisantes, elle a, lorsque cela était nécessaire, émis un avis motivé comme lorsque, par exemple, en réponse aux observations de la requérante, elle a recommandé d'intégrer la parcelle cadastrée section D n° 1080 au secteur urbain. Par ailleurs, dans ses conclusions, elle a estimé que le projet de PPRI présentait des points faibles tels que le manque de lisibilité sur les plans de zonage réglementaire au 1/5000ème et relevé la relative imprécision de la méthode de détermination des aléas résiduels. Si des similitudes existent nécessairement entre le rapport établi par la commission d'enquête dans le cadre de l'élaboration du PPRI de la commune de Castillon-du-Gard et ceux concernant les autres communes situées dans le périmètre du bassin versant du Gardon aval, dont celle de Bardon, dès lors que les études et modèles hydrauliques ont été réalisés à cette échelle, la commission d'enquête a, dans son rapport, tenu compte de la situation particulière de la commune de Castillon-du-Gard. Dès lors, son rapport et ses conclusions ne méconnaissent pas les dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'environnement.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 122-17 du code de l'environnement :
5. D'une part, aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations (...). / II.- Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. / III. - La réalisation des mesures prévues aux 3° et 4° du II peut être rendue obligatoire en fonction de la nature et de l'intensité du risque dans un délai de cinq ans, pouvant être réduit en cas d'urgence. A défaut de mise en conformité dans le délai prescrit, le préfet peut, après mise en demeure non suivie d'effet, ordonner la réalisation de ces mesures aux frais du propriétaire, de l'exploitant ou de l'utilisateur. / (...) V. - Les travaux de prévention imposés en application du 4° du II à des biens construits ou aménagés conformément aux dispositions du code de l'urbanisme avant l'approbation du plan et mis à la charge des propriétaires, exploitants ou utilisateurs ne peuvent porter que sur des aménagements limités ". Les plans de prévention des risques naturels prévisibles ainsi définis par le législateur ont pour finalité d'assurer la protection civile des populations contre les risques naturels.
6. D'autre part, l'article L. 122-4 du code de l'environnement dans sa version applicable à la date de prescription du plan en litige dispose que : " (...) / IV. - Un décret en Conseil d'Etat définit les plans, schémas, programmes et documents visés aux I et III qui font l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas effectué par l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. (...) ". Aux termes de l'article R. 122-17 du code de l'environnement dans sa version en vigueur à la même date : " (...) / II.- Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification susceptibles de faire l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas et, sous réserve du III, l'autorité de l'Etat compétente en matière d'environnement devant être consultée sont définis dans le tableau ci-dessous : (...) / 2° Plan de prévention des risques technologiques prévu par l'article L. 515-15 du code de l'environnement et plan de prévention des risques naturels prévisibles prévu par l'article L. 562-1 du même code (...) ". Par ailleurs, le tableau annexé à cet article prévoyait à son 2° que les plans de prévention des risques naturels prévisibles prévus par l'article L. 562-1 du code de l'environnement, dans sa version issue de l'article 1er du décret du 2 mai 2012, relèvent de l'examen au cas par cas et que l'autorité administrative de l'Etat chargée de cet examen est le préfet de département.
7. Il résulte de la combinaison de l'article L. 562-3 du code de l'environnement selon lequel le plan de prévention des risques naturels est approuvé par arrêté préfectoral et du tableau annexé à l'article R. 122-17 dans sa version issue de l'article 1er du décret du 2 mai 2012 que le préfet de département, par ailleurs compétent pour approuver le plan de prévention des risques naturels, était chargé d'effectuer l'examen au cas par cas propre à ce type de plans, destiné à déterminer s'ils devaient faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences sur l'environnement. Par ses décisions n° 360212 des 26 juin 2015 et 3 novembre 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé les dispositions du 2° du II de l'article R. 122-17 du code de l'environnement, seulement en tant que ces dispositions confiaient à la même autorité administrative de l'État la compétence pour élaborer et approuver les plans de prévention des risques naturels et la compétence pour décider d'un examen au cas par cas sans prévoir de disposition de nature à garantir que cette dernière compétence en matière environnementale serait exercée, au sein de cette autorité, par une entité disposant d'une autonomie effective.
8. Il en résulte que la seule circonstance que la décision portant dispense d'évaluation environnementale et l'arrêté préfectoral approuvant le PPRI ont été signés par le même préfet de département ne suffit pas à entacher d'illégalité l'arrêté en litige alors que Mme A... ne soulève aucune argumentation sur l'autonomie réelle de l'entité ayant préparé la décision de dispense d'évaluation. En outre l'appelante ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles L. 122-1 et R. 122-6 du code de l'environnement qui ne s'appliquent pas aux plans de prévention des risques naturels mais aux projets de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement. Par suite, M. Olagnon, secrétaire général de la préfecture du Gard était compétent pour signer au nom du préfet de ce département la décision de dispense d'évaluation environnementale.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement de la parcelle en litige :
9. Selon le rapport de présentation du PPRI en cause, la zone R-NU est une zone non urbanisée exposée à un aléa résiduel en cas de crue supérieure à la crue de référence. Sa préservation permet de ne pas accroître le développement urbain en zone potentiellement inondable et de maintenir des zones d'expansion des plus fortes crues, de façon à ne pas aggraver le risque à l'aval. Le principe général associé est l'interdiction de toute construction nouvelle, mais quelques dispositions sont cependant introduites pour assurer le maintien et le développement modéré des exploitations agricoles ou forestières.
10. En premier lieu, la partie basse de la parcelle cadastrée section D numéro 1080 appartenant à Mme A... a été classée en zone R-NU correspondant à un aléa résiduel. Il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement d'une photo aérienne des lieux que cette parcelle est située en périphérie de la commune de Castillon-du-Gard, dans un secteur très faiblement bâti et contigüe, sur les 3/4 de son emprise, avec une vaste zone naturelle boisée. Les circonstances que le plan d'occupation des sols (POS) de la commune classe cette parcelle en zone UD et que la requérante a obtenu, le 18 février 2011, un permis de construire une maison individuelle pour cette parcelle sont sans incidence. Il en va de même du fait que cette parcelle est raccordée à tous les réseaux y compris celui de l'assainissement collectif.
11. En deuxième lieu, la préservation de la capacité des champs d'expansion des crues, qui permet de limiter leur impact en aval, présente un caractère d'intérêt général et justifie que puissent être déclarées inconstructibles ou enserrées dans des règles de constructibilité limitée, des zones ne présentant pas un niveau d'aléa fort. Dès lors, la seule circonstance que la détermination de l'aléa correspond à une crue ou à une inondation qui ne s'est jamais produite n'est pas de nature à établir que le classement de la parcelle de Mme A... en zone d'aléa résiduel serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
12. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles cadastrées n° A 802 et n° A 803 qui ont été reclassées, au cours de l'enquête publique, en zone urbanisée seraient dans la même situation que la parcelle cadastrée section D n° 1080 dès lors que ce reclassement a été effectué au vu de l'urbanisation existante entourant ces parcelles.
13. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 10 à 12, le préfet du Gard n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en classant la partie basse de la parcelle cadastrée section D n° 1080 appartenant à Mme A... en zone R-NU.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 septembre 2016 en tant qu'il classe une partie de sa parcelle cadastrée section D n° 1080 en zone non urbanisée d'aléa résiduel et de la décision du 3 février 2017 rejetant son recours gracieux.
Sur les frais liés au litige :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et à la ministre de la transition écologique.
Délibéré après l'audience du 25 juin 2021, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juillet 2021.
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N° 19MA01726
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