Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SASU Bernard Brignon a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement le département du Gard et le maître d'œuvre, M. D... B..., à lui verser la somme de 34 134,83 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires au taux légal courant depuis le 24 février 2016, ainsi que de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices subis du fait de l'allongement de la durée du chantier de restructuration et d'extension du restaurant inter-administratif situé rue Scatisse à Nîmes, dont elle était titulaire.
Par un jugement n° 1701595 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er août 2019 et 23 novembre 2020, la SASU Bernard Brignon, représentée par Me Garcia, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner solidairement le département du Gard et le maître d'œuvre, M. B..., à lui verser la somme de 34 134,83 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires au taux légal à compter de la notification du mémoire en réclamation, ainsi que de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices subis du fait de l'allongement de la durée du chantier de restructuration et d'extension du restaurant inter-administratif situé rue Scatisse à Nîmes, dont elle était titulaire ;
3°) de condamner le département du Gard et le maître d'œuvre, M. B..., à lui verser chacun la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande était recevable ;
- les premiers juges n'ont pas motivé leur décision pour écarter la responsabilité du département du Gard et de M. B..., mandataire solidaire du groupement d'entreprises chargé de la maître d'œuvre ;
- les premiers juges ont commis différentes erreurs de fait et d'appréciation ;
- le département du Gard, maître d'ouvrage, a commis différentes fautes contractuelles ; l'allongement des délais d'exécution résulte d'une mauvaise définition des besoins et de sa défaillance dans la mise en œuvre des pouvoirs de direction et de contrôle du marché ; la conclusion des différents avenants révèle ces fautes ;
- la responsabilité quasi-délictuelle de la maîtrise d'œuvre doit être engagée ; la conclusion des différents avenants met en exergue les manquements et carences du maître d'œuvre dans la conception du projet et le pilotage du chantier ;
- l'allongement du chantier a augmenté ses frais généraux liés au chantier, notamment des frais de location de bungalows, et a entraîné des dépenses spécifiques s'agissant de la phase 4 des travaux.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 avril 2020, 6 octobre 2020, 4 janvier 2021 et 22 janvier 2021, M. B..., représenté par la SCP Albertini Alexandre et L'hostis, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que la SARL INGE + BETS, la SARL EIBAT et le département du Gard le garantissent de toute condamnation ; il demande en outre qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SASU Bernard Brignon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est tardive au regard des stipulations de l'article 50 du CCAG travaux ; par ailleurs les ordres de service n'ont pas été contestés dans le délai de quinze jours en méconnaissance de l'article 3.8.2 du CCAG travaux ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par des mémoires, enregistrés les 28 mai 2020, 21 octobre 2020 et 18 décembre 2020, la SARL INGE + BETS, représentée par BCEP Avocats Associés, conclut au rejet de la requête et de toutes demandes formées à son encontre, à ce que le département du Gard, M. B... et la SARL EIBAT la garantissent de toute condamnation et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de tout succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;
- l'appel en garantie n'est pas fondé.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 octobre 2020 et 15 décembre 2020, le département du Gard, représenté par Me Brault, conclut à titre principal à l'annulation du jugement de première instance en ce qu'il n'a pas déclaré la requête irrecevable pour tardiveté et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Bernard Brignon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est tardive en application des stipulations des articles 50 et suivants du cahier des clauses administratives générales ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée par ordonnance au 23 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... Guillaumont, rapporteur,
- les conclusions de M. A... Thielé, rapporteur public,
- et les observations de Me Monaji pour le département du Gard et de Me Callens pour la société INGE+BETS.
Considérant ce qui suit :
1. Pour la restructuration et l'extension de bâtiments dont il est propriétaire sur la commune de Nîmes, accueillant un restaurant inter-administratif et des ateliers techniques, le département du Gard a conclu le 2 novembre 2010 un marché de maîtrise d'œuvre avec le groupement d'entreprises B.../Ingeplus/Jean-Paul Poissonnier, dont M. B... était le mandataire solidaire. Le département du Gard a également conclu des marchés de travaux, répartis en neuf lots, dont le lot n° 2 " Gros-œuvre - Démolitions intérieures ", confié à la SASU Bernard Brignon par acte d'engagement du 23 août 2012 pour un montant global et forfaitaire de 872 960,07 euros hors taxes. Le délai d'exécution des travaux était de vingt-deux mois, et ceux-ci devaient initialement s'achever le 22 août 2014 compte tenu de leur démarrage le 22 octobre 2012. A la suite de la conclusion de plusieurs avenants, le délai global d'exécution a été prolongé jusqu'au 22 août 2015. Par une réclamation réceptionnée le 24 février 2016 à laquelle le département du Gard n'a pas répondu, la SASU Bernard Brignon a sollicité auprès de la collectivité l'indemnisation des frais qu'elle estime avoir supportés du fait de l'allongement de la durée du chantier, à hauteur de 34 134,83 euros toutes taxes comprises. Après notification par le département du décompte général signé par le représentant du pouvoir adjudicateur le 12 août 2016, la société a de nouveau transmis son mémoire en réclamation par courrier daté du 20 septembre 2016. Le département du Gard a rejeté cette réclamation par courrier du 2 décembre 2016. La SASU Bernard Brignon a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement le département du Gard et le mandataire solidaire du groupement d'entreprises chargé de la maîtrise d'œuvre, M. B..., à lui verser la somme de 34 134,83 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires au taux légal courant depuis le 24 février 2016, ainsi que de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices subis du fait de l'allongement de la durée du chantier. Par un jugement n° 1701595 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande. La SASU Bernard Brignon fait appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Nîmes a expressément répondu aux moyens développés par le demandeur devant lui. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par la SASU Bernard Brignon, n'a pas omis de répondre au moyen tiré de ce que le département du Gard aurait commis des fautes en procédant à une mauvaise définition de ses besoins ainsi qu'en manquant à ses pouvoirs de direction et de contrôle lors de l'exécution du marché. De même, le tribunal n'a pas omis de répondre au moyen tiré de ce que M. B..., mandataire solidaire du groupement d'entreprises chargé de la maîtrise d'œuvre, aurait commis des fautes consistant en des erreurs de diagnostic, de conception et de pilotage du chantier. Ainsi, la SASU Bernard Brignon n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait, sur ces points, entaché d'un défaut ou d'une insuffisance de motivation.
3. En second lieu, ainsi qu'indiqué au point précédent, il ressort de l'examen du jugement attaqué et de l'ensemble du dossier de première instance que le tribunal administratif de Nîmes a répondu à l'argumentation de la société requérante sur les fautes qu'elle impute au maître d'ouvrage et à la maîtrise d'œuvre. Dans l'hypothèse où les premiers juges auraient commis, comme le soutient la requérante, des erreurs de fait ou d'appréciation susceptibles d'affecter la validité de la motivation du jugement dont le contrôle est opéré par l'effet dévolutif de l'appel, ces erreurs resteraient, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement.
4. Par suite, la SASU Bernard Brignon n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires dirigées contre le département :
5. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait - comme tel est le cas en l'espèce du marché conclu entre le département du Gard et la SASU Bernard Brignon - ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics. A cet égard, les stipulations de l'article 10.1.1 du cahier des clauses administratives générales auxquelles renvoie l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières du marché conclu entre le département et l'appelante et en vertu desquelles " Les prix sont réputés comprendre toutes les dépenses résultant de l'exécution des travaux, y compris les frais généraux, impôts et taxes, et assurer au titulaire une marge pour risques et bénéfice (...) ", s'appliquent aux prix fixés par le marché et n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'indemnisation intégrale du préjudice subi par le titulaire du marché du fait de retards dans l'exécution du marché imputables au maître de l'ouvrage ou à ses autres cocontractants et distincts de l'allongement de la durée du chantier due à la réalisation des travaux supplémentaires, dès lors que ce préjudice apparaît certain et présente avec ces retards un lien de causalité directe.
6. La SASU Bernard Brignon fait valoir que l'allongement des délais d'exécution trouve son origine dans les modifications importantes apportées au projet par le maître d'ouvrage, révélant une carence fautive dans la définition de ses besoins ainsi que de sa défaillance dans la mise en œuvre des pouvoirs de direction et de contrôle du marché. Elle fait également valoir que l'allongement du délai global d'exécution lui a causé un préjudice correspondant à l'augmentation des frais généraux liés au chantier, notamment des frais de location de bungalows, et a entraîné des dépenses spécifiques s'agissant de la phase 4 des travaux.
7. En premier lieu, d'une part, si l'avenant n° 1 acte notamment de la nécessité d'effectuer un dallage en béton armé finition talochée sur une surface de 20 m² représentant une plus-value de 2 873,40 euros hors taxes à la suite de la décision du département du Gard de procéder à une démolition intégrale et non plus seulement partielle du local " atelier peinture ", il ne résulte pas de l'instruction que cette modification, de faible ampleur, constitue une carence fautive dans la définition du besoin ni qu'elle aurait eu une incidence sur les délais globaux d'exécution. A cet égard, si l'appelante fait valoir que la réalisation de cette prestation peut légitimement être estimée à cinq jours supplémentaires sur le délai initial d'exécution, elle ne l'établit pas par les pièces qu'elle produit. Il en va de même de l'augmentation, également prise en compte dans cet avenant, du volume de remblais en tout venant pour un coût de 2 462,40 euros hors taxes. A cet égard, si l'appelante expose que le volume de remblais supplémentaire peut être évalué à 53 m3 et que la réalisation de cette prestation peut légitimement être estimée à quatre jours supplémentaires sur le délai initial d'exécution, elle ne l'établit pas par les pièces qu'elle produit. Enfin, il en va également de même des modifications mineures apportées à certaines cloisons pour un coût de 705,03 euros hors taxes dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elles puissent être analysées comme une carence fautive dans la définition du besoin ni qu'elles auraient eu une incidence sur les délais globaux d'exécution. En tout état de cause, la société Bernard Brignon n'établit pas qu'elle aurait engagé du fait de la réalisation de l'ensemble de ces travaux supplémentaires un surcroît de dépenses autres que celles incluses dans les prix de l'avenant n° 1.
8. En deuxième lieu, l'avenant n° 2 précise que l'ensemble des modifications qu'il prévoit " représente une plus-value de 12 490,89 euros HT (...) et une augmentation de 6 jours du délai de réalisation des prestations ". Si cet avenant acte notamment de la création d'un second poteau pour renforcer la structure de la cage d'escalier ainsi que de la mise en place de chevêtres afin de consolider les planchers, il ressort des termes même de l'avenant que la nécessité de ces travaux supplémentaires n'a été révélée qu'après la réalisation de premiers travaux de mise à nu de la structure existante et de démolition de la cloison d'une gaine technique, de sorte qu'il ne saurait être reproché au maître d'ouvrage de ne pas avoir anticipé ces besoins. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'exécution de ces travaux de faible ampleur, dont les coûts ont été fixés aux sommes respectives de 1 992,44 et 2 463,20 euros hors taxes, aurait participé au retard de chantier finalement constaté au-delà de l'augmentation du délai de réalisation des prestations de six jours fixé par ledit avenant pour l'ensemble des modifications qu'il prévoyait. Par ailleurs, s'agissant de la prestation supplémentaire de percement du plancher existant du premier étage également prévue dans cet avenant et représentant une plus-value de 1 700 euros hors taxes, il ne résulte pas de l'instruction que la réalisation de cette prestation aurait conduit à rallonger le chantier au-delà de ce que les parties ont contractuellement admis par ledit avenant.
9. En troisième lieu, si l'appelante invoque la circonstance que le déplacement de l'accès livraison du bâtiment, de la rue Scatisse, tel qu'initialement prévu, à la rue Raymond Marc, a entraîné la mise à sa charge d'une prestation supplémentaire de reprise du trottoir rue Scatisse afin de supprimer les passages surbaissés, l'avenant n° 3 au marché, conclu le 1er avril 2015, prévoit la réalisation de ces travaux, pour un montant de 7 875,57 euros hors taxes, et précise qu'ils conduisent à augmenter de sept jours calendaires le délai de réalisation des prestations. La SASU Bernard Brignon, qui ne prétend au demeurant pas que l'allongement du délai d'exécution induit par ces travaux aurait été supérieur à sept jours, a ainsi été rémunérée pour effectuer ces travaux et cette rémunération a tenu compte de l'allongement du chantier que leur réalisation impliquait. Si l'appelante soutient que le prix convenu dans cet avenant ne couvre pas les dépenses de maintenance des installations de chantier, il résulte au contraire de l'article 10 du cahier des clauses administratives générales applicable que, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Nîmes, les prix sont réputés comprendre toutes les dépenses résultant de l'exécution des travaux.
10. En quatrième lieu, si l'avenant n° 4 acte du déplacement de la " souche de la chaufferie " générant une plus-value de 1 709,30 euros hors taxes, il ne résulte pas de l'instruction que cette modification de faible ampleur constitue une carence fautive dans la définition du besoin ni qu'elle aurait eu une incidence sur les délais globaux d'exécution. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que la société Bernard Brignon aurait engagé du fait de la réalisation de ces travaux supplémentaires un surcroît de dépenses autres que celles incluses dans les prix de l'avenant n° 4.
11. En cinquième lieu, compte tenu de tout ce qui précède, et contrairement à ce que fait valoir l'appelante, la nature et le nombre des modifications du programme exposées aux points précédents ne suffisent pas à révéler une insuffisance dans l'estimation des besoins révélatrice d'une faute.
12. En sixième lieu, la société Bernard Brignon invoque la défaillance du maître de l'ouvrage dans la mise en œuvre des pouvoirs de direction et de contrôle du marché et se prévaut sur ce point de trois prolongations distinctes actées par l'avenant n° 3. Toutefois, tout d'abord, si cet avenant acte d'une augmentation du délai de réalisation des prestations de douze jours calendaires en raison des retards pris dans le cadre des phases 1 et 2 de l'opération, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de la maîtrise d'œuvre invoqué par la société requérante, que les retards en cause sont imputables à des travaux de voirie extérieurs au chantier. Ensuite, si cet avenant mentionne également " la demande du restaurant inter-administratif, de décaler de dix jours la réalisation du corridor permettant d'accéder de la cuisine à la salle à manger provisoire " et la libération avec retard des locaux par ledit restaurant " suite aux difficultés rencontrées (...) dans l'organisation des déménagements ", circonstances qui ont conduit à augmenter respectivement le délai de réalisation des prestations de dix et de sept jours, il ne résulte pas de l'instruction que le maître d'ouvrage aurait fait preuve à cette occasion d'insuffisance dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché. A cet égard, la circonstance que le département du Gard bénéficie, comme d'autres personnes publiques, de plusieurs sièges au sein du conseil d'administration de la structure gérant le restaurant inter-administratif ne suffit pas à établir une faute de sa part dans l'organisation du déménagement. Il résulte de ce qui précède que l'existence d'une faute du maître de l'ouvrage dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché ou dans sa mise en œuvre n'est nullement établie. Dès lors, la demande d'indemnisation doit être rejetée.
13. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, les conclusions indemnitaires que la SASU Bernard Brignon présente à l'encontre du département du Gard doivent être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires présentées contre M. B... :
14. Dans le cadre d'une action tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il soutient avoir subis à l'occasion de l'exécution d'un marché relatif à des travaux publics, le titulaire du marché peut rechercher, outre la responsabilité contractuelle du maître d'ouvrage, la responsabilité quasi-délictuelle des autres participants à cette même opération avec lesquels il n'est lié par aucun contrat de droit privé, en se prévalant notamment des manquements commis par ces derniers à leurs obligations à l'égard du maître d'ouvrage, à condition d'établir que ces manquements sont directement à l'origine des préjudices dont il demande réparation.
15. En premier lieu, tout d'abord, si l'avenant n° 1 acte notamment des travaux de consolidation des propriétés mitoyennes à la suite des démolitions, prévues dans le cadre de l'opération, des bâtiments situés sur le terrain " VEVE ", il ne résulte pas de l'instruction que la nécessité de ces travaux, représentant une plus-value de 5 941,13 euros hors taxes " côté mosquée " et de 14 597,05 euros hors taxes " côté compagnie d'assurance SADA " et qui ont notamment consisté en la réalisation d'un contre-mur, d'une rive, d'un enduit ciment ainsi qu'en l'élévation de deux contreforts en béton pouvait être identifiée avant la démolition des bâtiments qui étaient implantés sur ledit terrain. Ensuite, comme l'a jugé à bon droit le tribunal, il ne résulte pas de la seule circonstance qu'à la suite d'un oubli lors des études, il se soit avéré nécessaire, aux termes de l'avenant n° 1 au marché et pour un montant de 2 307,82 euros hors taxes, afin de permettre la circulation de camions de 18 tonnes, d'augmenter l'épaisseur d'une partie de la surface du dallage béton de la cour de service, que le délai d'exécution afférent à ces travaux, qui étaient en eux-mêmes initialement prévus au marché, aurait été allongé. Enfin, il en va de même s'agissant de l'augmentation, également prise en compte dans cet avenant, du volume de remblais en tout venant pour un coût de 2 462,40 euros hors taxes. A cet égard, si l'appelante expose que la réalisation d'un volume de remblais supplémentaire peut être évalué à 53 m3 et que la réalisation de cette prestation peut légitimement être estimée à quatre jours supplémentaires sur le délai initial d'exécution, elle ne l'établit pas par les pièces qu'elle produit. Il résulte de tout ce qui précède que la société Bernard Brignon n'établit pas qu'elle aurait engagé du fait de la réalisation de l'ensemble de ces travaux supplémentaires un surcroît de dépenses autres que celles incluses dans les prix de l'avenant n° 1.
16. En deuxième lieu, l'avenant n° 2 précise que l'ensemble des modifications qu'il prévoit " représente une plus-value de 12 490,89 euros HT (...) et une augmentation de 6 jours du délai de réalisation des prestations ". Si cet avenant acte notamment de la création d'un second poteau pour renforcer la structure de la cage d'escalier ainsi que de la mise en place de chevêtres afin de consolider les planchers, il ressort des termes même de l'avenant que la nécessité de ces travaux supplémentaires n'a été révélée qu'après la réalisation de premiers travaux de mise à nu de la structure existante et de démolition de la cloison d'une gaine technique et il ne résulte pas de l'instruction qu'ils pouvaient être identifiés en amont. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'exécution de ces travaux de faible ampleur, dont les coûts ont été fixés aux sommes respectives de 1 992,44 et 2 463,20 euros hors taxes, aurait participé au retard de chantier finalement constaté au-delà de l'augmentation du délai de réalisation des prestations de six jours fixé par ledit avenant pour l'ensemble des modifications qu'il prévoyait. Il résulte également des termes de cet avenant que si les prestations supplémentaires de percement du plancher existant du premier étage, dont l'objet était de permettre le passage des réseaux de plomberie, et de réalisation de certains supports d'étanchéité en béton plutôt qu'avec une costière métallique, représentant respectivement une plus-value de 1 700 euros hors taxes et de 4 813,28 euros hors taxes, sont liées à l'insuffisante précision de la maîtrise d'œuvre dans la description des prestations, la société requérante a cependant été rémunérée pour effectuer ces travaux et cette rémunération a tenu compte de l'allongement du chantier que leur réalisation impliquait. Il ne résulte pas de l'instruction que la réalisation de ces prestations aurait conduit à rallonger le chantier au-delà de ce que la société Bernard Brignon et le département du Gard avaient contractuellement admis par ledit avenant.
17. En troisième lieu, si la présence de plaques ondulées contenant de l'amiante a été constatée lors de la démolition de l'ancienne chambre froide " légumes ", nécessitant qu'une dépose selon un mode opératoire et un plan de retrait particulier soient demandés à la SASU Bernard Brignon aux termes de l'avenant n° 4 du 17 avril 2015 et pour un montant de 12 627 euros hors taxes, il ne résulte pas de l'instruction que le maître d'œuvre aurait commis une faute en n'identifiant pas la présence de ces plaques, alors que les diagnostics effectués par une entreprise tierce en amont des travaux n'avaient pas permis de détecter la présence d'amiante. De même, si l'avenant acte la décision de modifier des ouvertures sur façade de l'immeuble " Gourdon " " du fait de la décision du conseil général de conserver la gaine technique de l'ancienne chaufferie de l'immeuble et ce afin d'éviter de déstabiliser la structure ", cette modification, d'ailleurs accompagnée de la suppression d'une prestation initialement prévue, ne révèle pas une carence fautive de la maîtrise d'œuvre. Il en va de même s'agissant de la réalisation d'un raccord de flocage coupe-feu sur la structure métallique existante servant au renforcement du plancher du R + 1 de l'immeuble " Gourdon ", prestation n'ayant entraîné aucune modification du montant du marché. En tout état de cause, la société requérante a été rémunérée pour effectuer ces travaux et cette rémunération a tenu compte de l'allongement de quinze jours du chantier que leur réalisation impliquait. Il ne résulte pas de l'instruction que la réalisation de ces prestations aurait conduit à rallonger le chantier au-delà de ce que la société Bernard Brignon et le département du Gard avaient contractuellement admis par ledit avenant.
18. En quatrième lieu, si la requérante fait valoir que les travaux, prévus à l'avenant n° 3, de consolidation de l'immeuble " Gourdon " pour un montant de 77 447,18 euros hors taxes révèlent une carence fautive du maître d'œuvre, il ressort dudit avenant que la société requérante a été rémunérée pour effectuer ces travaux et cette rémunération a tenu compte de l'allongement de quarante-deux jours que leur réalisation impliquait. Il ne résulte pas de l'instruction que la réalisation de ces prestations aurait conduit à rallonger le chantier au-delà de ce que la société Bernard Brignon et le département du Gard avaient contractuellement admis par ledit avenant.
19. En dernier lieu, la requérante soutient que l'avenant n° 3 matérialise les carences de la maîtrise d'œuvre dans l'ordonnancement, la coordination et le pilotage du chantier. Toutefois, d'une part, elle n'assortit son moyen tiré de ce que le maître d'œuvre aurait tardé à prendre les décisions nécessaires pour remédier aux difficultés du chantier d'aucune précision. D'autre part, si la société requérante fait valoir que cet avenant acte d'une augmentation du délai de réalisation des prestations de douze jours calendaires en raison des retards pris dans le cadre des phases 1 et 2 de l'opération, il résulte de l'instruction, ainsi qu'indiqué au point 12 du présent arrêt, que les retards pris par les concessionnaires dans leurs interventions sont imputables à des travaux de voirie extérieurs au chantier. D'autre part, si elle évoque également la prolongation de dix jours calendaires pour la réalisation du corridor permettant d'accéder de la salle de la cuisine à la salle à manger provisoire, cette prolongation correspond à un décalage de travaux lié au fonctionnement du restaurant inter-administratif à la demande de son gestionnaire pendant la phase 2. Par suite, la société requérante n'établit pas la faute de la maîtrise d'œuvre qu'elle invoque.
20. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par la SASU Bernard Brignon à l'encontre de M. B... doivent, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, être rejetées.
Sur les conclusions en appel en garantie :
21. Le présent arrêt ne prononçant aucune condamnation à l'encontre de M. B... et de la société INGE + BETS, leurs conclusions d'appel en garantie sont sans objet et doivent dès lors être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département du Gard et de M. B... qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que la SASU Bernard Brignon demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
23. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la SASU Bernard Brignon la somme de 1 000 euros chacun à verser au département du Gard et à M. B.... Il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions au bénéfice de la société INGE + BETS.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SASU Bernard Brignon est rejetée.
Article 2 : La SASU Bernard Brignon versera au département du Gard la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La SASU Bernard Brignon versera à M. B... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par le département du Gard, M. B... et la société INGE + BETS est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU Bernard Brignon, à M. D... B..., au département du Gard, à la société INGE + BETS et à la société EIBAT venant aux droits de l'agence JP Poissonnier.
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Guy Fédou président,
- M. Gilles Taormina, président assesseur,
- M. C... Guillaumont, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 octobre 2021.
N° 19MA03622 5