Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Salon-de-Provence a délivré un permis de construire à Mme C....
Par une ordonnance n° 2009705 du 27 janvier 2021, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 22 mars et 6 juillet 2021, Mme A..., représentée par Me Tribot, demande à la Cour :
1°) de réformer l'ordonnance de la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 27 janvier 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Salon-de-Provence a délivré un permis de construire à Mme C... ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Salon-de-Provence la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a produit un acte notarié justifiant d'une servitude de vue ;
- elle a notifié son recours conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de justice administrative ;
- elle a intérêt pour agir contre le permis ;
- les modifications substantielles du projet et notamment de la hauteur auraient dû conduire la pétitionnaire à demander la délivrance d'un nouveau permis de construire.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 avril 2021, Mme C..., représentée par Me Raynaud-Bremond, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens d'appel sont infondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 avril 2021, la commune de Salon-de-Provence, représentée par Me Drai, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- Mme A... n'a pas justifié de la notification du recours en première instance ;
- les moyens d'appel sont infondés.
Le mémoire présenté par la commune de Salon de Provence le 8 juillet 2021 n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Baizet,
- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,
- et les observations de Me Tribot représentant Mme A..., de Me Germain-Morel, substituant Me Drai, représentant la commune de Salon-de-Provence et de Me Boutin, substituant Me Raynaud-Bremond, représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... relève appel de l'ordonnance du 27 janvier 2021 par laquelle la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Salon-de-Provence a délivré un permis de construire à Mme C....
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de justice administrative : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire [...] que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".
3. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
4. D'autre part, lorsque le requérant, sans avoir contesté le permis initial, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé.
5. En premier lieu, Mme A... a produit devant le tribunal administratif un mémoire en réplique le 19 janvier 2021, par lequel elle produisait à nouveau un acte notarié justifiant de la propriété de son bien et d'une servitude de vue à partir d'un petit fenestron situé sur sa maison, et par lequel elle se prévalait de ce que le projet portait atteinte aux conditions d'utilisation et de jouissance de son bien, notamment en raison de la servitude de vue précitée. Dans ces conditions, Mme A... est fondée à soutenir que la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille ne pouvait lui opposer la circonstance que, " invitée par le greffe du tribunal administratif, par une lettre du 11 janvier 2011, à apporter les précisions nécessaires à l'appréciation de l'atteinte directe portée par le projet litigieux aux conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien, Mme A... n'a rien produit. ".
6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui justifie être propriétaire d'une maison d'habitation sur laquelle s'adosse le projet en litige bénéficie d'une servitude de vue constituée sur un petit fenestron situé au premier étage. Le permis de construire modificatif en litige, qui augmente la hauteur au faîtage de la construction de Mme C..., va entraîner l'obstruction de ce petit fenestron, supprimant ainsi la servitude de vue dont bénéficie Mme A.... La circonstance que ce fenestron est actuellement utilisé à usage d'aération des toilettes du premier étage de la construction de Mme A... est sans incidence sur la suppression de cette servitude de vue, outre que le projet en litige va également obstruer cette aération. L'atteinte alléguée par Mme A... s'agissant de ce fenestron n'étant pas dépourvue de réalité, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance en litige, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a considéré qu'elle ne justifiait pas de son intérêt pour agir contre le permis.
7. Il résulte de ce qui précède que l'ordonnance de la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 27 janvier 2021 est entachée d'irrégularité et doit être annulée.
8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Marseille.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
9. En premier lieu, si Mme A... soutient que les modifications apportées au projet initial auraient dû faire l'objet d'un nouveau permis de construire et non d'un permis de construire modificatif, une telle circonstance est par elle-même sans influence sur la légalité du permis en litige. Le moyen doit, par suite, être écarté comme étant inopérant.
10. En second lieu, aux termes de l'article UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme : " 10.1 Conditions générales : la hauteur des constructions définie au 10.2 est mesurée en tout point des façades, du sol existant avant travaux jusqu'au niveau de l'égout du toit ou au plus haut de la construction, ouvrages techniques, cheminées et autres superstructures exclues (...). 10.2 La hauteur maximale. Pour les constructions à usage d'habitations. Secteurs UD 1, UD 2 et UD 4 : la hauteur ne doit pas excéder 6 m ".
11. Il ressort de pièces du dossier que la hauteur de la construction, mesurée du sol existant jusqu'au niveau de l'égout, est de 5,80 m et respecte donc la hauteur maximale autorisée par les dispositions précitées. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UD 10 précité doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède, soit qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense et tirée de la méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de justice administrative, que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté en litige du 12 octobre 2020.
Sur les frais liés au litige :
13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge des frais exposés sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance de la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 27 janvier 2021 est annulée.
Article 2 : La requête présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié Mme B... A..., à Mme D... C... et à la commune de Salon de Provence.
Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021 où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- Mme Baizet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2021.
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N° 21MA01146
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