Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2020 par lequel le préfet du Var lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français.
Par un jugement n° 2003383 du 11 décembre 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Granier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 11 décembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 27 novembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, au requérant ou à son conseil en cas d'admission à l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision est entachée d'un vice de procédure tenant au défaut de possibilité pour l'intéressé de présenter des observations en méconnaissance des dispositions des articles L. 121-1 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 121-4 et L. 511-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne représente pas une menace grave et actuelle pour l'ordre public ou un intérêt fondamental de la société ;
- cette décision porte gravement atteinte au respect de sa vie privée et familiale consacrée par les dispositions de l'alinéa 5 de l'article L. 511-3-1 du code précité et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit d'observations en défense.
M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 29 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bernabeu a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 4 avril 1969 en France et de nationalité italienne, a fait l'objet d'un arrêté du 27 novembre 2020 par lequel le préfet du Var lui a fait obligation de quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... relève appel du jugement du 11 décembre 2020 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral précité.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. En premier lieu, il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment de son article L. 512-1, alors en vigueur, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à un étranger l'obligation de quitter le territoire français. Dès lors, les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions administratives devant être motivées, ne sauraient être utilement invoqués à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, même si elle n'intervient pas à la suite d'une demande de l'étranger en vue de la délivrance d'un titre de séjour.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) ". En vertu de l'article L. 511-3-1 de ce code, dans sa version applicable : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : (...) / 3° Ou que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. / (...) ".
4. En application des dispositions précitées de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicables, il appartient à l'autorité administrative, qui ne saurait se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française, ces conditions étant appréciées en fonction de sa situation individuelle, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.
5. D'une part, il ressort de l'arrêté attaqué que, pour prendre la décision litigieuse, le préfet du Var s'est fondé sur les circonstances que " M. B... A... a été interpelé et écroué le 28 septembre 2020 pour des faits de conduite de véhicule sous l'empire d'un état alcoolique ; qu'il a également été interpelé et signalé, le 5 août 2018 pour des faits de refus, par le conducteur d'un véhicule, d'obtempérer à une sommation de s'arrêter, de conduite d'un véhicule à moteur malgré une suspension administrative et de circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance, le 7 juillet 2018 pour des faits d'usage de faux document administratif pour procurer l'impunité à l'auteur d'un crime, le 26 mars 2019 pour des faits de vol à l'étalage et le 4 juin 2020 pour des faits de conduite malgré suspension judiciaire du permis de conduire et de blessures involontaires avec incapacité n'excédant pas trois mois par un conducteur de véhicule terrestre à moteur commises avec au moins deux circonstances aggravantes ". Si le préfet du Var n'établit pas que M. B... ait été reconnu coupable de l'ensemble de ces infractions pénales, le requérant ne conteste pas sérieusement les avoir commises en se bornant à se prévaloir de la présomption d'innocence et de ce qu'il ne s'agit, pour certains de ces faits, que de simples signalements. En outre, l'intéressé a fait l'objet en 2017 et 2018 de deux condamnations pénales, en cours d'exécution à la date de la décision contestée, respectivement pour " conduite d'un véhicule en ayant fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants et vol ", ainsi que " conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique ", l'une de six mois d'emprisonnement avec sursis, l'autre de deux mois d'emprisonnement, la seconde provocant la révocation du sursis de la première. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que si M. B... est né en France en 1969, il a vécu, selon ses dires, en Belgique de 1971 à 2017, soit jusqu'à l'âge de quarante-huit ans, et y a sollicité un titre de séjour, lequel lui a été délivré le 16 janvier 2019 pour une durée de cinq ans, tandis qu'il ne justifie pas avoir entrepris des démarches pour régulariser son séjour en France depuis 2017. Par ailleurs, il n'établit ni la durée de son séjour sur le territoire français par les pièces produites, notamment quelques bulletins de salaire pour des missions d'intérim dans la maçonnerie dont le plus ancien date d'octobre 2017, ni une insertion professionnelle particulière, les missions précitées n'étant que très ponctuelles. S'il soutient vivre en concubinage depuis 2017 avec Mme J. veuve M., de nationalité française, il ne produit à l'appui de cette affirmation qu'un contrat de bail daté du 19 août 2019 et des attestations manuscrites de cette dernière affirmant que leur relation perdure depuis octobre 2017, cette date n'étant corroborée par aucune pièce versée au dossier. Dans ces circonstances, eu égard, d'une part, aux faits commis très rapidement après l'entrée alléguée du requérant sur le territoire national et réitérés par ce dernier et, d'autre part, à sa situation personnelle en France, le préfet du Var a pu, sans faire une inexacte application des dispositions du 3° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obliger à quitter le territoire français.
6. En dernier lieu, M. B... reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs pertinemment retenus par la magistrate désignée au point 12 du jugement attaqué.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'allocation à son conseil ou à lui-même de frais liés au litige.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Granier et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 14 octobre 2021, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme Bernabeu, présidente assesseure,
- Mme Carotenuto, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 octobre 2021.
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N° 20MA04759
nc