Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 27 mars 2017 par laquelle le maire de la commune de Cagnes-sur-Mer s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux tendant à la modification des façades et de la toiture et au ravalement des façades, ensemble la décision par laquelle le maire de Cagnes-sur-Mer a rejeté son recours gracieux.
Par un jugement n° 1703436 du 25 septembre 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 29 octobre 2019, M. A..., représenté par Me Lavaud, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 25 septembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 27 mars 2017 par laquelle le maire de la commune de Cagnes-sur-Mer s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux tendant à la modification des façades et de la toiture et au ravalement des façades, ensemble la décision par laquelle le maire de Cagnes-sur-Mer a rejeté son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Cagnes-sur-Mer de procéder au réexamen de sa demande de déclaration préalable de travaux dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Cagnes-sur-Mer une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a procédé à une substitution de motif irrégulière en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme ;
- il est établi par les pièces produites que la villa en litige a été construite antérieurement à 1943.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2020, la commune de Cagnes-sur-Mer conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
- le motif tiré de ce que le maire était en situation de compétence liée pour s'opposer à la déclaration préalable de travaux dès lors que les travaux antérieurement entrepris sans autorisation n'ont pas été régularisés, doit être substitué au motif initial.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Quenette,
- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,
- et les observations de Me Fiorentino représentant la commune de Cagnes-sur-Mer.
Une note en délibéré produite par la commune de Cagnes-sur-Mer a été enregistrée le 7 janvier 2022.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a déposé le 20 décembre 2016, et complété le 30 janvier 2017, un dossier de déclaration préalable de travaux en vue de la modification des façades et de la toiture ainsi que du ravalement des façades d'un bâtiment situé sur la parcelle cadastrée section BE n° 145, sise 10 allée des cottages à Cagnes-sur-Mer. Par une décision du 27 mars 2017, le maire de Cagnes-sur-Mer s'est opposé à cette déclaration préalable au motif que le projet envisagé ne prenait pas en compte l'ensemble des infractions constatées dans le procès-verbal d'infraction établi le 12 janvier 1997 pour des travaux entrepris sans autorisation. Par un courrier daté du 16 mai 2017, M. A... a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision. M. A... relève appel du jugement n° 1703436 du 25 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 27 mars 2017, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Lorsqu'une construction a été édifiée sans autorisation en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble du bâtiment. De même, lorsqu'une construction a été édifiée sans respecter la déclaration préalable déposée ou le permis de construire obtenu ou a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé. Dans l'hypothèse où l'autorité administrative est saisie d'une demande qui ne satisfait pas à cette exigence, elle est tenue de la rejeter et d'inviter son auteur à présenter une demande portant sur l'ensemble des éléments qui doivent être soumis à son autorisation.
3. Aux termes de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme dans sa version alors applicable : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d'opposition à déclaration préalable ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. / Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables : (...) 5° Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que peuvent bénéficier de la prescription administrative ainsi définie les travaux réalisés, depuis plus de dix ans, lors de la construction primitive ou à l'occasion des modifications apportées à celle-ci, sous réserve qu'ils n'aient pas été réalisés sans permis de construire en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables. A la différence des travaux réalisés depuis plus de dix ans sans permis de construire, alors que ce dernier était requis, peuvent bénéficier de cette prescription ceux réalisés sans déclaration préalable.
4. Le tribunal administratif de Nice, pour confirmer la décision du 27 mars 2017 par laquelle le maire de Cagnes-sur-Mer s'est opposé à cette déclaration préalable, a considéré que la commune de Cagnes-sur-Mer était placée en situation de compétence liée en raison de l'absence d'existence légale de la construction d'origine de ce dernier.
5. Une construction n'est regardée comme existante légalement que si elle a été construite avant la loi du 15 juin 1943 instaurant le permis de construire ou conformément à une législation applicable à l'époque de la construction ou encore, conformément à une autorisation délivrée depuis lors. Il appartient à l'auteur de l'autorisation d'urbanisme et au bénéficiaire d'apporter la preuve de la régularité de la construction.
6. Si le tribunal administratif de Nice a considéré que le requérant n'avait apporté aucun élément de nature à démontrer que la construction irrégulièrement implantée sur sa parcelle l'aurait été avant 1943 et que la déclaration tacite délivrée à son profit le 5 mai 1997 n'avait pas porté sur la régularisation de la construction dans son ensemble, M. A... produit pour la première fois un appel en relevé de cadastre de 1935 établissant que la villa en litige y était déjà implantée. La commune de Cagnes-sur-Mer fait valoir des différences entre le bâti identifié au plan cadastral de 1935 et celui constaté à ce jour, confirmant une extension significative du bâtiment existant, voir une démolition. Cependant, la commune de Cagnes-sur-Mer n'apporte aucun élément de nature à étayer l'hypothèse d'une démolition intervenue depuis lors alors même qu'il ressort des plans produits que l'implantation de 1935 correspond à l'implantation actuelle après agrandissement. Par suite, le pétitionnaire doit être regardé, par les pièces produites, comme justifiant de l'existence légale de la construction avant la loi du 15 juin 1943. Le tribunal administratif de Nice ne pouvait, par suite, refuser le bénéfice de la prescription prévue par l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme, au seul motif que la construction d'origine n'aurait pas eu d'existence légale.
7. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... en première instance et en appel.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a entrepris divers travaux sur son bien sis 10 allée des Cottages à Cagnes-sur-Mer, dont certains ont fait l'objet de procès-verbaux d'infraction en date des 4 mars 1991, 20 janvier 1992 et 12 janvier 1997, en raison de l'absence de dépôt préalable d'une demande d'autorisation au titre de la législation de l'urbanisme. A cet égard, le procès-verbal d'infraction dressé le 12 janvier 1997 a porté sur des travaux entrepris sans autorisation de réfection de la toiture d'un abri voiture, clos sur trois côtés avec un changement de pentes et sur la construction d'une relation en maçonnerie reliant l'abri voiture à la maison d'habitation. Le 5 mars 1997, M. A... a déposé une déclaration préalable de travaux portant notamment sur le remplacement du portail, la pose d'un portillon et le remplacement de la toiture de l'abri voiture avec changement de pente de ce toit. Les plans joints à cette déclaration préalable montrent, en outre, que les travaux projetés portaient également sur les travaux de liaison entre l'abri voiture et la maison. Par courrier en date du 19 mars 1997, la commune de Cagnes-sur-Mer a informé M. A... C... la majoration du délai d'instruction de sa déclaration préalable, réceptionnée en mairie le 5 mars 1997, d'un mois en raison de l'inscription du projet dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit. Le silence gardé sur cette déclaration préalable pendant plus de deux mois a ainsi fait naître une décision tacite de non-opposition à déclaration préalable sur ces travaux de régularisation des infractions constatées par le procès-verbal établi le 12 janvier 1997. M. A... a déposé une nouvelle déclaration préalable de travaux le 20 décembre 2016, complétée le 30 janvier 2017, aux fins de ravalement et d'embellissement des façades de son habitation. Il a également sollicité la modification des façades et de la toiture du bâtiment principal, laquelle a été refusée au motif de l'absence de prise en compte de l'ensemble des infractions constatées dans le procès-verbal d'infraction du 12 janvier 1997. Or, dès lors que M. A... a obtenu une déclaration préalable tacite le 5 mai 1997 pour des travaux régularisant l'ensemble des travaux entrepris sans autorisation tels que constatés par le procès-verbal d'infraction du 12 janvier 1997, le maire de la commune de Cagnes-sur-Mer ne pouvait, sans entacher sa décision d'illégalité, s'opposer à la déclaration préalable déposée le 20 décembre 2016 au motif que cette dernière ne prenait pas en compte l'ensemble des infractions constatées dans ledit procès-verbal du 12 janvier 1997. Par suite, la décision par laquelle le maire de Cagnes-sur-Mer s'est opposé à la déclaration préalable de travaux déposée le 20 décembre 2016 et complétée le 30 janvier 2017, au seul motif que le projet présenté ne prend pas en compte l'ensemble des infractions qui ont été constatées dans le procès-verbal du 12 janvier 1997, est entachée d'erreur de droit.
9. Toutefois, en défense, la commune de Cagnes-sur-Mer se prévaut de la situation de compétence liée dans laquelle elle était placée pour refuser la déclaration préalable de travaux déposée le 20 décembre 2016 par M. A... dès lors qu'il n'a pas régularisé l'ensemble des infractions qui ont été constatées dans les procès-verbaux dressés en 1991 et 1992.
10. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire droit valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué sous réserve que le défaut d'examen de cette condition n'ait pas privé le requérant d'une garantie procédural comme c'est le cas en l'espèce.
11. Le procès-verbal d'infraction dressé par la commune de Cagnes-sur-Mer le 4 mars 1991 pour réalisation de travaux non conformes à la déclaration préalable accordée le 11 juin 1991 mentionne la création d'une extension de 11 m² et une surélévation du bâtiment en litige de 35 centimètres en façade est et de 20 centimètres en façade sud. Le procès-verbal d'infraction du 20 janvier 1992 mentionne quant à lui des modifications de façades par créations, déplacements, suppressions et changements des dimensions des ouvertures et des modifications de toiture, réalisée à deux pentes avec en façade sud deux ouvertures en mansarde. Or, il ressort des pièces du dossier que la demande querellée ne vise pas à régulariser l'ensemble des infractions constatées, en particulier l'extension de 11 m², alors même que les infractions contenues dans les procès-verbaux dressés en 1991 et 1992 n'ont été régularisées ni par la déclaration de travaux tacite de 1997, ni par la déclaration préalable de 2015.
12. S'il appartient à l'administration de tenir compte, le cas échéant, de l'application des dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme emportant, sous certaines réserves relatives notamment aux constructions situées sur le domaine public, régularisation des travaux réalisés depuis plus de dix ans, c'est, en tout état de cause, à la condition qu'elle soit saisie d'une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble du bâtiment ou des éléments de celui-ci qui n'ont pas déjà été autorisés. Par suite, le requérant qui ne demande pas la régularisation dans sa déclaration préalable de l'ensemble des infractions antérieures non régularisées ne peut invoquer la prescription décennale en application des dispositions du 5 de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme.
13. Il s'ensuit que le maire, se trouvant en situation de compétence liée pour refuser la déclaration préalable de travaux sollicitée eu égard à l'absence de demande de régularisation portant sur certains travaux réalisés au début des années 1990, était dès lors tenu de rejeter cette demande.
14. Il suit de là que les autres moyens soulevés par le requérant aux fins d'annulation de la décision d'opposition à déclaration préalable doivent être écartés comme inopérants.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cagnes-sur-Mer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. A... sur le fondement de ces dispositions. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Cagnes-sur-Mer au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : M. A... versera à la commune de Cagnes-sur-Mer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Cagnes-sur-Mer.
Délibéré après l'audience du 6 janvier 2022, où siégeaient :
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Quenette, premier conseiller,
- Mme Baizet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 janvier 2022.
2
N° 19MA04702
hw