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08/02/2022 | FRANCE | N°20MA00050

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 08 février 2022, 20MA00050


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2016 par lequel le maire de Saint-Victor des Oules a délivré à M. C... A... un permis de construire, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur son recours gracieux du 29 décembre 2017 tendant au retrait de cet arrêté.

Par un jugement n° 1801448 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par

une requête enregistrée le 7 janvier 2020 et par des mémoires complémentaires enregistrés les 23 a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2016 par lequel le maire de Saint-Victor des Oules a délivré à M. C... A... un permis de construire, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur son recours gracieux du 29 décembre 2017 tendant au retrait de cet arrêté.

Par un jugement n° 1801448 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 janvier 2020 et par des mémoires complémentaires enregistrés les 23 août 2020 et 28 novembre 2021, Mme B..., représentée par Me Boulisset, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 novembre 2019 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2019 du maire de Saint-Victor des Oules, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Victor des Oules et de M. A... la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de première instance était recevable ;

- le dossier de demande de permis de construire est insuffisant au regard des exigences des articles R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-4 du code de l'urbanisme et le permis de construire modificatif délivré le 4 octobre 2018, qui est entaché d'incohérences, ne régularise pas ce vice ;

- la liste des matériaux produite dans le dossier de demande de ce permis de construire modificatif n'est pas conforme aux plans du permis initial délivré ;

- le pétitionnaire n'avait pas qualité, au sens de l'article R. 423-1 de ce code, pour construire sur la parcelle A n° 334 dont elle est propriétaire et pour surélever sa cheminée et le permis de construire modificatif est ainsi entaché de fraude ;

- le projet méconnaît l'article R. 111-8 du code de l'urbanisme ;

- il méconnaît l'article R. 111-27 de ce code.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 juin 2020, la commune de Saint-Victor des Oules, représentée par la Selarl d'avocats Maillot et associés, conclut au rejet de la requête et de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance était irrecevable en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par lettre du 2 novembre 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et indiquant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Une ordonnance du 16 décembre 2021 a prononcé la clôture de l'instruction à la date de son émission, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, dont M. A... a accusé réception le 17 décembre 2021.

Un mémoire, présenté pour M. A..., a été enregistré le 20 décembre 2021, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Montesinos-Brisset représentant la commune de Saint-Victor des Oules.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 27 décembre 2016, le maire de la commune de Saint-Victor des Oules a délivré à M. A... un permis de construire pour édifier un " studio à un étage ", d'une surface de plancher créée de 36,62 m², sur la parcelle cadastrée section A n° 332 située rue des Escaliers sur le territoire de la commune. Un permis de construire modificatif a été délivré à M. A... le 4 octobre 2018 par le maire de la commune afin de compléter les modalités de raccordement du projet et les matériaux utilisés. Mme B..., voisine immédiate du projet, a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cet arrêté. Par le jugement dont elle relève appel, les premiers juges ont rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

3. En premier lieu, la requérante se borne en appel à réitérer le moyen tiré de ce que le dossier de demande du permis de construire, à défaut de comporter une notice paysagère et un plan de masse, méconnaîtrait respectivement les articles R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme, sans critiquer utilement la réponse des premiers juges sur ce point. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement attaqué. Si elle soutient aussi en appel que les plans produits dans la demande de permis de construire initial de M. A... ne permettent pas de vérifier les modalités d'alimentation en eau et d'assainissement de la construction projetée, le plan n° 4 "plan du rez de chaussée" joint au dossier de demande de permis de construire modificatif délivré le 4 octobre 2018 mentionne le raccordement du projet aux réseaux d'évacuation des eaux pluviales et des eaux usées et régularise ainsi ce vice du permis de construire initial. Si la requérante soutient aussi que le pétitionnaire aurait cherché à tromper l'appréciation du service instructeur quant à la superficie du projet, le dossier de demande du permis de construire modificatif n'est pas entaché d'incohérences entre les superficies déclarées de la parcelle cadastrée section A n° 332 terrain d'assiette du projet, soit 23 m² et celles de la surface de plancher de la construction projetée, qui comporte un logement en R+1 sur deux niveaux soit 36,62 m². Le service instructeur a pu prendre connaissance grâce aux pièces de la demande de la nature exacte du projet qualifié de "studio" par le pétitionnaire alors même qu'il s'agit d'une habitation en R+1. La circonstance que la liste des matériaux indiquée dans le dossier de permis de construire modificatif ne serait pas conforme à celle indiquée dans le permis initial quant à l'isolement intérieur relève de l'exécution du permis de construire en litige et est sans incidence sur la légalité de l'autorisation délivrée. Si ce dossier de demande utilise le terme de "corniche" au lieu de celle de "bordure de toiture" s'agissant du toit de la requérante, cette expression ne saurait caractériser l'existence d'une fraude. Dans ces conditions, le service instructeur a été mis à même de se prononcer en toute connaissance sur la consistance du projet litigieux. Dès lors, le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande du permis de construire en litige et de ce que le permis de construire serait entaché de fraude doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés: / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ". Le dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code dans sa rédaction applicable à la date de la demande de permis de construire prévoit que cette demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis. En application de l'article R. 431-4 du même code, le dossier est réputé complet lorsqu'il comprend les informations limitativement énumérées aux articles R. 431-5 à R. 431-33.

5. Il résulte de ces dispositions que, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées à l'article R. 423-1 du même code pour déposer une demande de permis de construire doit être regardé, dans tous les cas, comme ayant qualité pour présenter cette demande. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Les tiers ne sauraient donc utilement, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, faire grief à l'administration de ne pas en avoir vérifié l'exactitude. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif.

6. Il ressort des pièces de la demande de permis de construire qu'en présentant sa demande, M. A... a attesté sur le formulaire Cerfa avoir qualité pour déposer sa demande sur le terrain cadastré section A n° 332 et non sur celle cadastrée section A n° 334 appartenant à la requérante. En tout état de cause, il ressort de l'acte notarié du 24 septembre 2008 que M. A... a reçu donation de la part de ses parents de ce terrain cadastré A n° 332. La circonstance que le dossier de demande du permis de construire modificatif prévoit une surélévation de 50 centimètres de la cheminée existante sur la construction appartenant à Mme B..., sans avoir obtenu l'autorisation de cette dernière pour engager ces travaux, ne saurait caractériser l'existence d'une fraude commise par le pétitionnaire dans l'intention de tromper l'administration sur sa qualité pour déposer sa demande de permis de construire. Le permis de construire étant délivré sous réserve du droit des tiers, il n'appartient qu'au juge judiciaire de trancher un litige de droit privé s'agissant de la surélévation de la cheminée propriété de Mme B... et de la perte de vue et d'ensoleillement invoquée de sa propriété du fait du projet en litige. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme ayant qualité pour présenter cette demande. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme a été écarté à bon droit par les premiers juges.

7. En troisième lieu, la requérante se borne en appel à réitérer le moyen tiré de ce que le projet méconnaîtrait l'article R. 111-8 du code de l'urbanisme, sans critiquer utilement la réponse des premiers juges sur ce point. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 7 du jugement attaqué.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Pour apprécier si un projet de construction porte atteinte, en méconnaissance des dispositions précitées, au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur ce site.

9. Il ressort des pièces du dossier que le centre du village de Saint-Victor des Oules se compose de constructions à usage d'habitation en R+1 prenant la forme de petits immeubles collectifs ou d'habitations individuels ne présentant pas d'intérêt architectural particulier. La liste des matériaux jointe à la demande de permis de construire prévoit que les tuiles en terre cuite seront de teinte rouge flammé pour s'intégrer aux toitures avoisinantes et que les murs des façades seront en crépi de teinte claire pour s'intégrer à l'architecture du village. Le maire de Saint-Victor des Oules n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que la construction d'un logement à un étage, d'une hauteur légèrement supérieure à celle des constructions voisines, d'une surface de plancher modeste d'environ 36 m², situé à l'angle sud-est d'un ensemble immobilier formant au droit de la rue des Escaliers une " dent creuse ", alors même que cette parcelle aurait toujours servi de jardin potager depuis le Moyen-âge, n'est pas de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Victor des Oules, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Victor des Oules, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser une quelconque somme à Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Saint-Victor des Oules sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Mme B... versera la somme de 2 000 euros à la commune de Saint-Victor des Oules sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., à la commune de Saint-Victor des Oules et à M. C... A....

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2022, où siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Carassic, première conseillère,

- Mme Baizet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 février 2022.

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N° 20MA00050


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00050
Date de la décision : 08/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Octroi du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : BOULISSET

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-08;20ma00050 ?
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