Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B..., Ben Nourdine A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 du préfet des Alpes-Maritimes, décidant de l'éloigner à destination de la Tunisie, en exécution d'une interdiction judiciaire du territoire français pendant une durée de cinq ans.
Par un jugement n° 2105401 du 18 octobre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 novembre 2021, M. A..., représenté par Me Dridi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 octobre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 13 octobre 2021 ;
3°) de prononcer la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté méconnait les stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les articles L. 121-1, L. 121-2 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration et l'article L. 141-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité tunisienne, demande l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête dirigée contre l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 13 octobre 2021 portant éloignement à destination de la Tunisie, en exécution de l'interdiction judiciaire du territoire français pendant une durée de cinq ans.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
3. En premier lieu, si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Par ailleurs, les dispositions des articles L. 121-1, L. 121-2 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration prévoient que les décisions administratives devant être motivées ne peuvent intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis en mesure de présenter des observations écrites ou orales. Enfin, aux termes de l'article L. 141-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque les dispositions du présent code prévoient qu'une information ou qu'une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication (...) ".
4. D'une part, M. A... fait valoir que les observations qu'il a formulées et qui ont été consignées sur le formulaire prévu à cet effet fourni par l'administration n'ont pas été relues par l'interprète lui-même. Toutefois, si, lorsqu'il est recouru à un interprète par un moyen de communication à distance, les observations de l'étranger qu'il traduit doivent être retranscrites de manière fidèle sur le formulaire, les dispositions précitées n'exigent pas qu'elles soient relues par l'interprète lui-même. Au demeurant, le formulaire versé au dossier ne mentionne pas que l'interprète a relu les observations faites par M. A..., mais que celui-ci a pris connaissance par l'intermédiaire d'un interprète des mentions que comporte le formulaire et qui indiquent notamment la nature de la mesure envisagée. En outre, il n'est pas allégué que le requérant aurait formulé d'autres observations que celles mentionnées sur le formulaire où il expose qu'il suit un traitement au moyen d'un médicament qui n'est pas disponible en Tunisie. D'autre part, M. A... fait valoir que la nécessité de recourir à un interprète par téléphone n'est pas établie en méconnaissance de l'article L 141-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, la nécessité de recourir à un moyen de communication prévu par ces dispositions peut résulter de la seule circonstance qu'un interprète compétent dans la langue que comprend l'étranger n'est pas présent sur les lieux ou n'est pas immédiatement disponible. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en l'espèce, un interprète aurait été présent sur les lieux où M. A... a été entendu en vue de présenter ses observations, ou immédiatement disponible. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas été mis en en mesure de présenter des observations de manière utile et effective en violation de son droit d'être entendu et des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration, ni que les dispositions de l'article L. 141-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues.
5. En deuxième lieu, M. A... fait valoir qu'il souffre d'une dépendance aux drogues, nécessitant un traitement par Subutex ou à base buprénophine, non disponible dans son pays d'origine, qu'il bénéficie d'un suivi psychothérapeutique régulier, de consultations en addictologie, participe à un groupe de parole et qu'un défaut de prise en charge entrainerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. S'il produit des éléments établissant la réalité de ses addictions et du suivi dont il bénéficie, les pièces versées au dossier n'apportent aucunes précisions quant aux conséquences d'un défaut de prise en charge. Par ailleurs, s'il ressort des pièces versées au dossier que le traitement prescrit à M. A... au titre de ses addictions n'est pas disponible en Tunisie, il n'apparaît pas qu'un traitement de substitution n'y est pas possible. Par suite, c'est à bon droit que le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a écarté le moyen tiré de ce que le préfet a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation à défaut d'avoir pris en compte l'état de santé du requérant.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de M. A..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, y compris les conclusions présentées en application de ces dispositions et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
7. Enfin, la présente ordonnance se prononçant au fond, les conclusions de M. A... tendant à la suspension de l'exécution de la décision attaquée sont, en tout état de cause, devenues sans objet.
O R D O N N E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... Ã fin de suspension.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B..., Ben Nourdine A....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Fait à Marseille, le 24 mars 2022.
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N° 21MA04454