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08/04/2022 | FRANCE | N°21MA02048

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 08 avril 2022, 21MA02048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sarl BC gestion et portage a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la décision du 3 octobre 2018 par laquelle le préfet de la région Occitanie lui a fait obligation de reverser au Trésor public diverses sommes pour un montant cumulé de 40 342 euros au titre des années 2015 et 2016 et, d'autre part, la décision implicite du 29 mai 2019 par laquelle le comptable public du service des impôts des entreprises de Perpignan a rejeté sa contestation de l'avis de mise en recouv

rement du 15 février 2019 émis pour le montant de 40 342 euros.

Par un ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sarl BC gestion et portage a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la décision du 3 octobre 2018 par laquelle le préfet de la région Occitanie lui a fait obligation de reverser au Trésor public diverses sommes pour un montant cumulé de 40 342 euros au titre des années 2015 et 2016 et, d'autre part, la décision implicite du 29 mai 2019 par laquelle le comptable public du service des impôts des entreprises de Perpignan a rejeté sa contestation de l'avis de mise en recouvrement du 15 février 2019 émis pour le montant de 40 342 euros.

Par un jugement n° 1900694 - 1904135 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2021, sous le n° 21MA02048, la Sarl BC gestion et portage, représentée par Me Blain, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 mars 2021 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler la décision du 3 octobre 2018 par laquelle le préfet de la région Occitanie lui a fait obligation de reverser au Trésor public diverses sommes pour un montant cumulé de 40 342 euros au titre des années 2015 et 2016 ensemble la décision implicite du 29 mai 2019 par laquelle le comptable public du service des impôts des entreprises de Perpignan a rejeté sa contestation de l'avis de mise en recouvrement du 15 février 2019 émis pour le montant de 40 342 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision du 3 octobre 2018 est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et la situation des stagiaires nommés à l'article 3 n'a pas fait l'objet d'un examen en fait et en droit ;

- le motif tiré de ce que les cogérantes, Mmes B... et Cortes, n'ont pas suivi de formation en période de professionnalisation de Master II de droit, d'économie, de gestion mention management entre le 21 septembre 2015 et le 29 février 2016, de ce qu'elles ont établi de fausses feuilles d'émargement et de fausses factures à l'attention de l'AGEFOS-PME dans le but d'obtenir la prise en charge du coût de la formation est entaché d'une erreur de fait ; en l'absence de procédure pénale, le préfet ne pouvait faire application de l'article. L. 6362-7-2 du code du travail ; en outre, le remboursement de la somme de 7 840 euros a été accepté par l'AGEFOS-PME et les intéressées ont renoncé à la formation ; cette sanction est disproportionnée au regard de son incidence sur sa trésorerie, contrairement à celle de l'AGEFOS-PME ;

- le motif tiré de ce que la formation assistance de vie aux familles (A...) de sept salariées d'aidoservices 66 a fait l'objet de fausses factures dont le montant doit être intégré dans le calcul des sommes à reverser au titre des avoirs versés à l'AGEFOS-PME est entaché d'erreur de fait ; le différentiel en litige s'élève à 756 euros ;

- il en va de même de la formation A... dispensée à Mme C... qui en a suivi l'intégralité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la Sarl BC portage et gestion ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Ciréfice.

Considérant ce qui suit :

1. La Sarl BC gestion et portage, organisme de formation professionnelle continue, a fait l'objet d'un contrôle effectué par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) Occitanie en application des articles L. 6361-2 et L. 6361-3 du code du travail, au titre des années 2015 et 2016. Le rapport de contrôle lui a été notifié le 8 janvier 2018 et le délai du contradictoire a été reporté à la demande de la société jusqu'au 1er mars 2018. Par une décision du 6 juin 2018, le préfet de la région Occitanie a fait obligation à cette société de reverser au Trésor public diverses sommes pour un montant cumulé de 40 342 euros au titre des années 2015 et 2016. Par lettre reçue le 6 août 2018, la Sarl BC gestion et portage a exercé le recours administratif préalable obligatoire prévu par l'article R. 6362-6 du code du travail. Par une décision du 3 octobre 2018, se substituant à la première décision du 6 juin 2018, le préfet a maintenu la demande de reversement d'un montant de 40 342 euros. Un avis de mise en recouvrement de cette somme a été émis le 15 février 2019 par le service des impôts et des entreprises de Perpignan à l'encontre duquel la Sarl BC gestion et portage a présenté une contestation reçue le 29 mars 2019. La Sarl BC gestion et portage relève appel du jugement du 30 mars 2021 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 3 octobre 2018 et, d'autre part, à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par le comptable public à sa contestation reçue le 29 mars 2019.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité de la décision du 3 octobre 2018 :

2. La Sarl BC gestion et portage reprend en appel les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de cette décision et de l'absence d'examen complet de la situation des stagiaires concernés. Toutefois, il y a lieu d'écarter ces moyens, qui ne comportent aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Montpellier aux points 4 et 5 du jugement attaqué.

3. Aux termes de l'article L. 6362-2 du code du travail : " L'Etat exerce un contrôle administratif et financier sur : 1° Les activités en matière de formation professionnelle continue conduites par : c) Les organismes de formation et leurs sous-traitants ". Aux termes de l'article L. 6362-3 du même code : " Le contrôle administratif et financier des dépenses et activités de formation porte sur l'ensemble des moyens financiers, techniques et pédagogiques, à l'exclusion des qualités pédagogiques, mis en œuvre pour la formation professionnelle continue. Ce contrôle peut porter sur tout ou partie de l'activité, des actions de formation ou des dépenses de l'organisme. ". Aux termes de l'article L. 6362-4 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les employeurs justifient de la réalité des actions de formation qu'ils conduisent lorsqu'elles sont financées par l'Etat, les collectivités territoriales, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ou les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue. A défaut, ces actions sont réputées ne pas avoir été exécutées et donnent lieu à remboursement auprès de l'organisme ou de la collectivité qui les a financées ". Aux termes de l'article L. 6362-6 : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 présentent tous documents et pièces établissant la réalité de ces actions. A défaut, celles-ci sont réputées ne pas avoir été exécutées au sens de l'article L. 6354-1 ". Enfin, l'article L. 6362-7-1 dispose que : " En cas de contrôle, les remboursements interviennent dans le délai fixé à l'intéressé pour faire valoir ses observations. À défaut, l'intéressé verse au Trésor public, par décision de l'autorité administrative, une somme équivalente aux remboursements non effectués " et selon l'article L. 6362-7-2 : " Tout employeur ou prestataire de formation qui établit ou utilise intentionnellement des documents de nature à obtenir indûment le versement d'une aide, le paiement ou la prise en charge de tout ou partie du prix des prestations de formation professionnelle est tenu, par décision de l'autorité administrative, solidairement avec ses dirigeants de fait ou de droit, de verser au Trésor public une somme égale aux montants indûment reçus. ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'administration d'apprécier, au regard des pièces produites par la société, sur laquelle pèse la charge de la preuve, et sous le contrôle du juge, la réalité des actions de formation qu'elle indique avoir dispensées.

4. Premièrement, la société requérante soutient que le caractère intentionnel de l'utilisation de documents pour obtenir indûment une aide pour la formation suivie par mesdames B... et Cortes, cogérantes de l'organisme de formation BC gestion et portage, n'est pas démontré par l'administration dans la mesure où ces dernières, de bonne foi, ont renoncé de leur propre chef à poursuivre la formation de master II de droit, d'économie, de gestion mention management, et ont précédé au remboursement des sommes versées. Il ressort toutefois de l'instruction que la Sarl a adressé à l'organisme paritaire collecteur agréé financeur (OPCA financeur) des feuilles d'émargement pour la période du 21 septembre 2015 au 29 février 2016 et des factures pour un montant de 7 840 euros qui ont donné lieu à prise en charge par l'AGEFOS-PME et que lesdites sommes n'ont été remboursées qu'à la suite du contrôle opéré par l'AGEFOS-PME au début de l'année 2016. Par ailleurs, Mesdames B... et Cortes ont signé pour la même période des feuilles d'émargement respectivement en tant que formatrice et en tant que stagiaire, sur des créneaux horaires de journées complètes Enfin, la circonstance qu'aucune procédure pénale n'a été diligentée est sans incidence sur la qualification juridique des faits, la sanction prévue à l'article L. 6362-7-2 précité du code du travail n'étant pas conditionnée par l'engagement d'une procédure pénale. Par suite le préfet de la région Occitanie n'a entaché sa décision du 3 octobre 2018 ni d'inexactitude matérielle, ni d'erreur d'appréciation, en retenant le caractère intentionnel de l'utilisation de documents pour obtenir indûment une aide au sens des dispositions de l'article L. 6362-7-2 du code du travail. La sanction en litige n'est pas, dans les circonstances de l'espèce et ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif disproportionnée.

5. Deuxièmement, il ressort des pièces du dossier que dans le cadre de la formation assistance de vie aux familles (A...) dispensée à sept salariées d'aidoservices 66, un différentiel de 28 heures a été constaté entre le nombre d'heures payées aux formateurs salariés sur le mois de février 2016 et le nombre d'heures émargées par ces derniers sur les feuilles de présence ayant servi de base aux prises en charge par l'AGEFOS-PME représentant un montant de 14 966 euros. Si la société requérante fait valoir qu'il ressort du tableau d'analyse comptable produit en première instance qu'il existe un seul différentiel de 756 euros, ledit tableau reprend les heures payées aux formateurs sur la période d'octobre 2015 à juin 2016 alors que les constats de l'autorité administrative ne portent que sur les mois d'octobre 2015 à février 2016. Par ailleurs, le montant des factures présentées par la société BC gestion et portage à l'AGEFOS-PME pour cette seule période ne correspond pas aux montants exposés dans ce tableau et, en l'absence de pièce ou d'écriture comptable qui prouveraient les éléments avancés par la société, cette dernière ne peut utilement contredire les propres factures qu'elle a établies et qui ont été prises en charge par l'AGEFOS-PME. Comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, il ressort de la lecture de ce tableau d'analyse comptable que la société requérante a seulement dispensé 1 029 heures de formation entre les mois d'octobre 2015 et février 2016, représentant 14 406 euros, alors que le compte de produits 7061 du grand livre des comptes de l'organisme de formation démontre qu'elle a en réalité facturé 2 066 heures sur cette période pour un montant de 28 924 euros. Il s'ensuit que les douze avoirs produits pour la première fois devant le tribunal administratif, qui n'ont pas été présentés et encaissés en temps utile par l'AGEFOS-PME, ne permettent pas de tenir pour établie l'erreur de fait invoquée dans le calcul des sommes dues par la société requérante qui ne conteste pas avoir perçu la totalité des sommes déclarées, s'élevant à 28 924 euros. Par suite, le préfet de la région Occitanie a pu légalement demander le remboursement de la somme de 14 966 euros et mettre à la charge de la société une somme égale au montant indûment perçu qui n'a pas été remboursé au cours de la procédure contradictoire.

6. Enfin, si la Sarl reprend en appel le moyen tiré de ce que le préfet de la région Occitanie a retenu à tort l'existence de manœuvres frauduleuses de nature à justifier l'infliction d'une sanction concernant la formation suivie par Mme C..., il y a lieu d'écarter ce moyen, qui ne comporte aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Montpellier au point 9 du jugement attaqué.

7. Dès lors, en estimant que les pratiques constatées revêtaient un caractère intentionnel, le préfet de la région Occitanie a donné aux faits ainsi appréciés une exacte qualification juridique. Il a également fait une exacte application des dispositions citées au point 3 en ordonnant le versement par la Sarl BC gestion et portage au Trésor public de la somme de 40 342 euros.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'avis de mise en recouvrement :

8. La Sarl BC Gestion et Portage conteste par les mêmes moyens que ceux soulevés à l'encontre de la décision du 3 octobre 2018, par laquelle le préfet de la Région Occitanie lui a fait obligation de reverser au Trésor public un montant cumulé de 40 342 euros au titre des années 2015 et 2016, le bien-fondé de l'avis de mise en recouvrement du 15 février 2019 émis pour le même montant. N'ayant pas démontré l'illégalité de la décision du 3 octobre 2018, elle n'est pas fondée à soutenir que les sommes réclamées ne seraient pas exigibles. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite du 29 mai 2019, par laquelle le comptable public du service des impôts des entreprises de Perpignan a rejeté sa contestation de l'avis de mise en recouvrement du 15 février 2019 émis pour le montant de 40 342.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la Sarl BC gestion et portage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que la Sarl BC gestion et portage demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la Sarl BC gestion et portage est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl BC gestion et portage et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Copie en sera adressée au préfet de la région Occitanie, au directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Orientales et au directeur régional des finances publiques d'Occitanie.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2022, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- M. Prieto, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 avril 2022.

2

N° 21MA02048

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02048
Date de la décision : 08/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-09 Travail et emploi. - Formation professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Virginie CIREFICE
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : AVOCATS CONSEILS ASSOCIES PHILIPPE BLAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-04-08;21ma02048 ?
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