Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 13 janvier 2017 par laquelle le directeur de la branche " service courrier colis " Sud Méditerranée de La Poste l'a déclarée apte à reprendre ses fonctions sur un poste à temps partiel thérapeutique à 50 % et aurait refusé de la placer en congé de longue maladie, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1701770 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Toulon, faisant partiellement droit à cette demande, a annulé la décision du 13 janvier 2017, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux, " en tant qu'elles se prononcent sur l'aptitude de Mme C... à reprendre un poste à mi-temps thérapeutique ".
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2019, Mme C..., représentée par Me Carlhian, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 13 janvier 2017 rejetant une demande de placement en congé de longue maladie ;
2°) d'annuler la décision du 13 janvier 2017 visée ci-dessus, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à l'autorité compétente de La Poste de prendre une nouvelle décision relative à son placement en congé de longue maladie ;
4°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué méconnaît les droits de la défense dès lors que sa note en délibéré n'a pas été prise en compte par le tribunal et n'a pas été communiquée à la partie adverse ;
- ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 13 janvier 2017, en tant que celle-ci rejette une demande de placement en congé de longue maladie, sont recevables ;
- cette décision de refus est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 novembre 2019, la société anonyme La Poste, représentée par Me Mancilla, conclut :
1°) à l'annulation des articles 1er à 3 du jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 juin 2019 ;
2°) au rejet des conclusions de Mme C... ;
3°) à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision déclarant Mme C... apte à reprendre ses fonctions sur un poste à temps partiel thérapeutique à 50 % a été signée par une autorité compétente ;
- cette décision n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ;
- Mme C... n'ayant présenté aucune demande de placement en congé de longue maladie, ses conclusions tendant à l'annulation d'une décision rejetant une telle demande sont irrecevables, ainsi que l'a estimé le tribunal.
Par une lettre du 26 avril 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions d'appel incident de La Poste dès lors qu'elles se rattachent à un litige distinct de celui soulevé par l'appel principal.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Par une décision du 24 août 2021, la présidente de la cour a désigné M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., fonctionnaire de La Poste, relève appel du jugement du 20 juin 2019 en tant que le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une décision de son employeur du 13 janvier 2017 rejetant, selon elle, une demande de placement en congé de longue maladie, ainsi que de la décision implicite rejetant son recours gracieux formé à son encontre. Par la voie de l'appel incident, La Poste demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a fait partiellement droit à la demande de Mme C... en annulant la décision du 13 janvier 2017, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux, " en tant qu'elles se prononcent sur l'aptitude de Mme C... à reprendre un poste à mi-temps thérapeutique ".
Sur la recevabilité de l'appel incident de La Poste :
2. Un appel incident est recevable, sans condition de délai, s'il ne soumet pas au juge un litige distinct de celui soulevé par l'appel principal.
3. Les conclusions de La Poste, présentées après l'expiration du délai d'appel et tendant en particulier à l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué, concernent la légalité de la décision du 13 janvier 2017 déclarant Mme C... apte à reprendre ses fonctions sur un poste à temps partiel thérapeutique à 50 %, ainsi que de la décision implicite rejetant le recours gracieux formé à l'encontre de cette décision. Ces conclusions portent sur un litige distinct de celui soulevé par l'appel de Mme C... relatif à une autre décision du 13 janvier 2017 rejetant, selon elle, une demande de placement en congé de longue maladie. Par suite, les conclusions incidentes de La Poste dirigées contre les articles 1er à 3 du jugement attaqué sont irrecevables.
Sur la régularité du jugement :
4. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire ". En vertu des dispositions de l'article R. 731-3 de ce code : " A l'issue de l'audience, toute partie à l'instance peut adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré ".
5. Lorsque le juge administratif est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il lui appartient dans tous les cas d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office. En l'espèce, la note en délibéré que Mme C... a produite à la suite de l'audience publique a été enregistrée au greffe du tribunal avant la lecture du jugement et versée au dossier. Cette note ne comporte l'exposé d'aucune circonstance de fait dont l'intéressée n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction, ni d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office. En estimant que cette note ne justifiait pas la réouverture de l'instruction et en se bornant à la viser sans prendre en compte son contenu pour rendre son jugement, le tribunal administratif de Toulon n'a commis aucune irrégularité.
Sur l'appel principal de Mme C... :
6. Aux termes du premier alinéa de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom : " Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui comportent des dispositions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas ci-après, ainsi qu'à l'article 29-1 (...) ". En vertu du 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, le fonctionnaire en activité a droit à " des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée ".
7. Aux termes de l'article 34 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu'un chef de service estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs hiérarchiques, que l'état de santé d'un fonctionnaire pourrait justifier qu'il lui soit fait application des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, il peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 35 ci-dessous (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 35 du même décret : " Pour obtenir un congé de longue maladie ou de longue durée, les fonctionnaires en position d'activité ou leurs représentants légaux doivent adresser à leur chef de service une demande appuyée d'un certificat de leur médecin traitant spécifiant qu'ils sont susceptibles de bénéficier des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ".
8. Par une décision du 13 janvier 2017, prise au vu d'un avis émis le même jour par la section locale du comité médical, le directeur de la branche " service courrier colis " Sud Méditerranée de La Poste a estimé que les arrêts de maladie de Mme C... étaient justifiés au titre de la maladie ordinaire depuis le 29 juin 2016 jusqu'au 9 mars 2017 et l'a déclarée apte à la reprise de ses fonctions à temps partiel thérapeutique à 50 % pour une durée de trois mois à compter du 10 mars 2017. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des seules mentions du courrier établi le 2 août 2016 par un médecin généraliste, que Mme C... aurait, antérieurement à cette décision du 13 janvier 2017, déposé une demande tendant à l'obtention d'un congé de longue maladie satisfaisant aux exigences des dispositions de l'article 35 du décret du 14 mars 1986. Par ailleurs, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, au vu du compte-rendu de la séance du comité médical du 13 janvier 2017, que La Poste aurait, avant l'édiction de cette même décision, engagé une procédure de placement d'office de l'intéressée en congé de longue maladie conformément à l'article 34 du même décret. Dans ces conditions, il n'est pas établi que La Poste aurait, par une décision du 13 janvier 2017, refusé, même implicitement, de placer Mme C... en congé de longue maladie.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation d'une prétendue décision du 13 janvier 2017 refusant son placement en congé de longue maladie, ainsi que de la décision rejetant son recours gracieux formé à l'encontre d'une telle décision.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par La Poste, ainsi que le surplus de ses conclusions, sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et à la société La Poste.
Délibéré après l'audience du 3 mai 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Carassic, première conseillère,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mai 2022.
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N° 19MA03995