Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 17 mai 2017 par lequel le maire de Fuveau a refusé de lui délivrer un permis de construire portant sur l'extension d'une construction existante et sur un changement de destination d'un bâti en local professionnel avec extension ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé à son encontre par courrier du 17 juillet 2017.
Par un jugement n° 1709318 du 28 mai 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 24 juillet 2020, le 15 juillet 2021 et le 3 mars 2022, M. A... B..., représenté par Me Constanza et Me Pelgrin, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 mai 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 mai 2017 par lequel le maire de Fuveau a refusé de lui délivrer un permis de construire portant sur l'extension d'une construction existante et sur un changement de destination d'un bâti en local professionnel avec extension ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé à son encontre par courrier du 17 juillet 2017 ;
3°) d'enjoindre au maire de Fuveau de réexaminer sa demande dans le délai de deux mois à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 300 euros par jours de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Fuveau la somme de 3 600 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier car le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur les conclusions dirigées contre la décision du 17 mai 2017 en tant qu'elles visaient le refus opposé aux travaux relatif au bâtiment n° 1 ;
- concernant les travaux envisagés sur le bâtiment n° 1, le jugement est insuffisamment motivé ;
- il doit être regardé comme une décision de retrait implicite du permis de construire né tacitement le 23 avril 2017 ; il est entaché d'un vice de procédure dès lors que la procédure contradictoire prévue par l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration n'a pas été respectée ;
- le maire de Fuveau a commis une erreur de droit en lui opposant le motif tiré de la méconnaissance de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme dès lors que la construction principale a bénéficié d'un permis de construire ;
- il a commis une erreur de droit en lui opposant le motif tiré de méconnaissance de l'article 18 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune dès lors que le projet n'a pas pour objet d'augmenter la population exposée à un prétendu risque d'inondation et que l'interdiction des dépôts et stockages de matériels et matériaux d'une emprise au sol supérieure à 20 m carrés n'est pas applicable aux constructions qui prévoient une aire de stockage à l'intérieur des locaux créés et dont la surface de plancher s'intègre à la surface de plancher totale de la construction projetée ; le bâtiment 1 est en zone d'aléa faible ;
- le maire de Fuveau a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en ne recherchant pas s'il était possible d'assortir l'autorisation demandée de prescriptions spéciales de nature à prévenir le risque d'inondation.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 mars 2021 et 16 mars 2022, la commune de Fuveau, représentée par la SCP Bérenger, Blanc, Burtez-Doucede, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la requête sont infondés et qu'en l'état de compétence liée résultant de la méconnaissance de l'article 18 des dispositions générales du règlement du PLU, l'ensemble des moyens avancés par le requérant est inopérant.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance du 27 octobre 1945 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- les observations de Me Pelgrin représentant M. B... et celles de Me Jankowiak représentant la commune de Fuveau.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a déposé le 6 décembre 2016 une demande de permis de construire portant sur l'extension d'une construction existante et sur un changement de destination d'un bâti en local professionnel avec extension sur une parcelle cadastrée section BB n° 126 située 1 route de Gréasque sur le territoire de la commune de Fuveau. Par arrêté du 17 mai 2017, le maire de Fuveau a refusé de lui délivrer l'autorisation d'urbanisme sollicitée. Le requérant a formé un recours gracieux contre cet arrêté par courrier du 17 juillet 2017. Le silence gardé par la commune a fait naître une décision implicite de rejet de ce recours. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté et du rejet du recours gracieux.
Sur la régularité du jugement :
2. Le jugement du tribunal administratif de Marseille, dans son article 1er, rejette la requête de M. B... en tant qu'elle demandait d'annuler l'arrêté du 17 mai 2017 n° PC 013040 16L0106 par lequel le maire de Fuveau a refusé de lui délivrer un permis de construire portant sur l'extension d'une construction existante et sur un changement de destination d'un bâti en local professionnel avec extension. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur les conclusions dirigées contre la décision du 17 mai 2017 en tant qu'elles visaient spécifiquement le refus opposé aux travaux relatif au bâtiment n° 1, correspondant en l'espèce à l'extension de la construction existante.
3. Si le requérant soutient que le jugement est insuffisamment motivé concernant les moyens relatifs aux travaux envisagés sur le bâtiment n° 1, il ressort du considérant 8 du jugement attaqué que les premiers juges ont explicitement estimé que les moyens étaient inopérants dès lors que le maire était en compétence liée pour refuser le permis sollicité. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué ne peut qu'être écarté.
Sur de bienfondé du jugement :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont présentées et instruites dans les conditions et délais fixés par décret en Conseil d'Etat. (...). ". Aux termes de l'article R. 423-23 de ce même code : " Le délai d'instruction de droit commun est de : (...) ; b) Deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle, au sens du titre III du livre II du code de la construction et de l'habitation, ou ses annexes ; c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d'aménager ". Aux termes de l'article R. 423-19 du même code : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. ". Aux termes de l'article R. 423-22 du même code : " (...) le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41 ". Aux termes de l'article R. 423-38 de ce même code : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou, dans le cas prévu par l'article R. 423-48, un échange électronique, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ". Aux termes de l'article L. 424-2 de ce code : " Le permis est tacitement accordé si aucune décision n'est notifiée au demandeur à l'issue du délai d'instruction (...). ". Aux termes de l'article R. 424-1 de ce code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : (...) ; b) Permis de construire, permis d'aménager ou permis de démolir tacite (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 424-10 de ce code : " La décision accordant ou refusant le permis ou s'opposant au projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est notifiée au demandeur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal, ou, dans les cas prévus à l'article R. 423-48, par échange électronique. (...). "
5. Il résulte de ces dispositions, qu'une décision de permis de construire tacite naît à l'issue du délai d'instruction, éventuellement modifié, de la demande de permis de construire, en l'absence de notification d'une décision expresse de l'administration. Cette notification intervient à la date à laquelle le demandeur accuse réception de la décision, en cas de réception dès la première présentation du pli la contenant, ou, à défaut, doit être regardée comme intervenant à la date à laquelle le pli est présenté pour la première fois à l'adresse indiquée par le demandeur.
6. D'une part, contrairement à ce que soutient M. B..., l'administration disposait d'un délai d'instruction de trois mois à compter du moment où le dossier a été complet aux termes des dispositions de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme dès lors que le permis de construire sollicité ne porte pas uniquement sur une maison individuelle mais également sur un local professionnel.
7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment de la décision attaquée et du récépissé de dépôt de la demande de permis de construire remis à M. B..., sur lequel il est clairement fait mention qu'à défaut de transmission d'une lettre de la commune à la fin du premier mois suivant ce dépôt, conformément aux dispositions précitées, le délai d'instruction de la demande de trois mois ne pourra plus être modifié, que ladite demande a été déposée le 6 décembre 2016. La commune de Fuveau a sollicité des pièces complémentaires dans le délai imparti d'un mois qui ont été déposées le 23 février 2017, comme cela ressort de la décision en litige et du récépissé de dépôt de pièce. De nouvelles pièces complémentaires ont été déposées par le pétitionnaire le 16 mars 2017. Ainsi, le dossier de permis de construire du requérant doit être regardé comme étant complet au mieux le 23 février 2017 et le délai d'instruction de trois mois a recommencé à courir à cette date. Par suite, M. B... n'était pas titulaire d'un permis de construire tacite le 23 avril 2017, comme il le prétend, aucune décision tacite n'ayant pu naître avant le 23 mai 2017, et l'arrêté attaqué du 17 mai 2017, notifié le 19 mai 2017, ne constitue pas une décision de retrait implicite d'un permis de construire qui serait né tacitement le 23 avril 2017 mais une décision de refus de la demande de permis de construire sollicitée le 6 décembre 2016. Le moyen tiré de l'existence d'un vice de procédure tenant à la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration est dès lors sans influence sur la légalité de l'arrêté attaqué.
8. En second lieu, lorsqu'une construction a été édifiée sans autorisation en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble du bâtiment. De même, lorsqu'une construction a été édifiée sans respecter la déclaration préalable déposée ou le permis de construire obtenu ou a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé. Dans l'hypothèse où l'autorité administrative est saisie d'une demande qui ne satisfait pas à cette exigence, elle est tenue de la rejeter et d'inviter son auteur à présenter une demande portant sur l'ensemble des éléments qui doivent être soumis à son autorisation.
9. Aux termes de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d'opposition à déclaration préalable ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. / Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables : (...) 5° Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que peuvent bénéficier de la prescription administrative ainsi définie les travaux réalisés, depuis plus de dix ans, lors de la construction primitive ou à l'occasion des modifications apportées à celle-ci, sous réserve qu'ils n'aient pas été réalisés sans permis de construire en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables. A la différence des travaux réalisés depuis plus de dix ans sans permis de construire, alors que ce dernier était requis, peuvent bénéficier de cette prescription ceux réalisés sans déclaration préalable.
10. Il ressort du titre de propriété de M. B... établi le 27 octobre 2015 qu'un permis de construire pour la maison principale a été délivré le 20 décembre 1958 et qu'une conformité aux prescriptions du permis de construire a été délivrée le 7 août 1963. Il est également indiqué que la construction du pigeonnier et des abris extérieurs et du garage n'ont fait l'objet d'aucune autorisation. Il est aussi précisé que la maison autorisée a fait l'objet d'un agrandissement côté sud sur toute la largeur correspondant au séjour actuel, au cours de l'année 1968 sans aucune autorisation préalable, tout comme le garage qui a été transformé la même année en habitation. L'administration est dès lors fondée à soutenir que le permis de construire demandé porte, d'une part, sur une construction, dénommée immeuble 1, qui a fait l'objet d'un agrandissement d'environ 168 mètres carrés sans permis de construire, et, d'autre part, sur un garage transformé en habitation de 58 mètres carrés qui n'a également pas été autorisé. Il ressort des plans produits que ces agrandissements et cette nouvelle construction ont été intégrés aux bâtiments initiaux faisant l'objet du permis de construire. Ces agrandissements et cette nouvelle construction auraient dû faire l'objet d'un permis de construire dès lors qu'ils ont été réalisés postérieurement à l'ordonnance du 27 octobre 1945 n° 453442 relative aux permis de construire et n'entrent dans aucune dérogation légale. Par suite, ils ne peuvent bénéficier de la prescription administrative prévue par l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme. Dès lors que l'immeuble 2 a été édifié sans le permis de construire requis, que l'immeuble 1 a été transformé sans le permis de construire requis et que le pétitionnaire n'a pas présenté une demande d'autorisation de permis de construire portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé, le maire de Fuveau était tenu, ainsi qu'il la fait, de refuser le permis sollicité.
11. Il résulte de ce qui précède que le maire pouvait, pour ce seul motif, refuser le permis de construire sollicité. Par suite, M. B... n'est pas fondé à se plaindre que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête à fin d'annulation de l'arrêté du 20 mai 2017. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation de son recours gracieux et d'injonction sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Fuveau, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Fuveau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la commune de Fuveau la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Fuveau.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 novembre 2022.
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N° 20MA02541