Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société monégasque pour l'exploitation du tournoi de tennis (Smett) a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés spontanément acquittées au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et des cotisations supplémentaires de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013.
Par un jugement n° 1703429 du 6 mars 2020, le tribunal administratif de Nice, par l'article 1er, a déchargé la Smett des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013, par l'article 2, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et par l'article 3, a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 mai 2020 et 3 septembre 2021, la Smett, représentée par Me Foissac, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) de prononcer la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos de 2011 à 2014 et de constater des déficits reportables à la clôture de l'exercice 2014 d'un montant de 20 492 062 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à la restitution de l'impôt sur les sociétés qu'elle a spontanément acquitté au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014 comme irrecevable au motif qu'elle n'a pas justifié avoir exercé la réclamation préalable obligatoire prévue par l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales ; elle produit, en appel, ladite réclamation et sa preuve de réception ;
- elle a commis une erreur comptable rectifiable dans le calcul du résultat fiscal affecté à son établissement stable français ;
- il s'agit d'une erreur dans l'affectation de ses charges d'exploitation entre établissements français et monégasque et non une décision de gestion qui lui est opposable ;
- la méthode de rattachement des charges aux deux exploitations situées au siège monégasque et à son établissement stable en France doit être de 100 % pour les charges directement rattachables à l'un ou l'autre des établissements et pour les charges mixtes, au prorata du chiffre d'affaires réalisé par les établissements français et monégasque ;
- ces règles de détermination des bénéfices de l'établissement stable, dont elle sollicite l'application, sont les seules applicables ; elles sont conformes au modèle de convention fiscale OCDE et sont rappelées par la doctrine référencée BOI-INT-DG-20-20-10 du 12 septembre 2012 ;
- cette méthode, validée par le chef de brigade dans le cadre du recours hiérarchique ainsi qu'il ressort de la lettre du 18 juin 2015, est opposable à l'administration sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;
- l'intégralité des charges qui ont fait l'objet d'une nouvelle affectation avait été vérifiée par le service vérificateur ;
- leur libellé justifie leur affectation à l'exploitation française ;
- s'agissant de la réintégration dans ses bénéfices imposables de la quote-part de rémunération versée à l'administrateur de la société B... affectée à l'exploitation française pour la somme de 946 000 euros, le procès-verbal du conseil d'administration du 16 juin 2011 mentionne clairement l'assistance de la société B... au plan juridique et pour l'apport de nouveaux sponsors.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 octobre 2020 et 23 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la Cour de rejeter la requête de la Smett et, par la voie de l'appel incident, d'annuler l'article 1er du jugement attaqué et de remettre à la charge de la Smett, en droits et pénalités, les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises auxquelles la Smett a été assujettie au titre, respectivement, de l'exercice clos en 2011 et des exercices clos en 2011, 2012 et 2013.
Il fait valoir que :
- la nouvelle répartition des charges selon l'affectation n'a jamais été admise par l'administration fiscale et la quote-part de l'indemnité d'administrateur versée à la société B..., qui n'est pas justifiée, ne peut être admise en déduction du résultat imposable en France ;
- pour le surplus, les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
- et les observations de Me Foissac, représentant la Smett.
Considérant ce qui suit :
1. La société monégasque pour l'exploitation du tournoi de tennis (Smett), qui a son siège à Monaco, organise en France au travers d'un établissement stable sis sur la commune de Roquebrune-Cap-Martin, le tournoi de tennis de Monte Carlo sur des installations données en location par la société C..., dont elle est associée. A la suite de la vérification de comptabilité de l'établissement stable français de la Smett, portant sur les exercices clos en 2011, 2012 et 2013, l'administration fiscale a procédé à des rectifications en matière de retenue à la source, d'impôt sur les sociétés, de prélèvement de l'article 115 quinquies du code général des impôts et enfin de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises. La Smett a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées spontanément au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014 ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt auxquelles elle a été assujettie résultant de la vérification de comptabilité. Par le jugement attaqué du 6 mars 2020, le tribunal administratif, par l'article 1er, a déchargé la Smett des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013, par l'article 2, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et par l'article 3, a rejeté le surplus de sa demande. Par la présente requête, la Smett relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande. Par la voie de l'appel incident, le ministre demande l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 190-1 du livre de procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial de l'administration des impôts dont dépend le lieu de l'imposition ".
3. Il résulte de l'instruction que, par une réclamation préalable du 20 décembre 2016, reçue le 27 décembre suivant par le service des impôts des entreprises de Menton, dont la preuve de réception est produite pour la première fois en appel, la Smett a demandé la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées spontanément au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014 pour les montants respectifs de 138 343 euros, 198 105 euros, 162 930 euros et 215 017 euros. Par suite, la demande présentée par la Smett relative à ces impositions a été régulièrement précédée d'une réclamation conformément aux dispositions précitées.
4. Il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté comme irrecevables de telles conclusions, d'évoquer dans cette mesure, et de statuer sur les conclusions d'appel incident dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.
Sur les conclusions tendant à la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées spontanément au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014 :
5. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) ". Les cotisations primitives d'impôt sur les sociétés en litige dont s'est acquittée la Smett ayant été établies conformément à ses déclarations, il lui incombe d'apporter la preuve du caractère exagéré de ces impositions.
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
6. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Aux termes du premier alinéa du I de l'article 209 du même code : " Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45,(...) et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France, de ceux mentionnés aux a, e, e bis et e ter du I de l'article 164 B ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'une société dont le siège est en France exerce dans un établissement situé hors de France une activité industrielle ou commerciale distincte, elle ne peut pas tenir compte, pour la détermination du bénéfice imposable en France à l'impôt sur les sociétés, des charges qui se rapportent à son activité exercée dans l'établissement situé hors de France. Pour ventiler la fraction des frais généraux du siège de la société qui se rapporte à cette dernière activité, la société peut, à défaut de circonstances particulières propres à justifier un autre mode de calcul, se référer au rapport existant entre le chiffre d'affaires de cet établissement et le chiffre d'affaires total de la société.
7. Il résulte de l'instruction que la société requérante, qui a son siège social à Monaco et dispose d'un établissement stable en France, tient une comptabilité unique pour l'ensemble de son activité. Pour la détermination de son résultat imposable en France, elle a déduit des résultats des exercices clos de 2011 à 2014 les charges calculées au prorata du chiffre d'affaires réalisé en France par rapport au chiffre d'affaires total. La société appelante sollicite la correction de l'erreur qu'elle soutient avoir commise dans l'affectation de ses charges entre établissements français et monégasque et fait valoir que, pour calculer le résultat fiscal de l'établissement stable français, il convenait d'affecter à cet établissement les charges se rapportant directement à l'exploitation de l'activité en France et pour les charges mixtes, à proportion du montant du chiffre d'affaires réalisé par les deux établissements. Il résulte de l'instruction, et notamment des termes de la lettre du 18 juin 2015 adressée à la société requérante à la suite du recours hiérarchique, que l'administration a retenu, dans son principe, les observations de la société quant à la détermination des charges déductibles en matière d'impôt sur les sociétés, à savoir le rattachement des dépenses affectables à chacun des établissements, français ou monégasque, et au prorata du chiffre d'affaires pour le surplus. Par lettre du 31 juillet 2015, l'interlocuteur interrégional a admis les nouvelles modalités d'affectation des charges, a abandonné les rappels effectués au titre de l'affectation d'une partie des produits et des charges à l'établissement français et a indiqué que les résultats déclarés au titre de la période vérifiée n'étaient pas modifiés sur ce point. Les conséquences financières, relatives aux exercices clos en 2011, 2012 et 2013, qui ont été notifiées à la société à la suite de l'interlocution interrégionale, par lettre du 8 septembre 2015, tiennent compte de cette nouvelle répartition des charges.
8. A supposer que la société requérante puisse bénéficier, ainsi qu'elle le soutient, de la correction de son erreur comptable, en tout état de cause, la seule production de tableaux, censés retracer les opérations de ses établissements pour les exercices clos de 2011 à 2014 et que l'administration conteste avoir validés, en l'absence de tout autre élément exposant notamment les modalités d'affectation des charges entre les deux établissements, ne permet pas de déterminer les charges qui ne seraient imputables qu'à l'exploitation française. Le seul libellé des charges et l'indication du numéro de compte sont, à cet égard, insuffisants pour justifier précisément l'affectation desdites charges. Par suite, la société requérante ne justifie pas de la détermination de son résultat fiscal imposable en France dont elle se prévaut.
En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale :
9. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...). ". Le 1° de l'article L. 80 B du même livre étend la garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A au cas où " l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ". Il résulte de ces dispositions que les contribuables ne sont en droit d'invoquer les interprétations ou appréciations de l'administration sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A et sur celui de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, que lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures.
10. D'une part, la Smett, qui n'a fait l'objet d'aucun rehaussement, n'a pas fait application de la doctrine référencée BOI-INT-DG-20-20-10 du 12 septembre 2012 qu'elle invoque pour l'établissement des cotisations primitives en litige et qui, au demeurant, est en partie postérieure aux impositions en litige. Elle n'est dès lors pas fondée à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
11. D'autre part, à supposer que la société appelante entende se prévaloir d'une prise de position formelle de l'administration résultant des lettres du supérieur hiérarchique du 18 juin 2015 et de l'interlocuteur interrégional du 31 juillet 2015, elle n'est en droit de contester sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales qui renvoie au premier alinéa de l'article L. 80 A du même livre, que les rehaussements d'impositions antérieures, non, comme au cas d'espèce une imposition primitive.
12. Il résulte de ce qui précède, que la Smett n'est pas fondée à solliciter la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées spontanément au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014 et partant, la fixation de déficits reportables à la clôture de l'exercice 2014 d'un montant de 20 492 062 euros.
Sur l'appel incident :
13. D'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
14. D'autre part, aux termes de l'article 1586 ter du code général des impôts dans sa version applicable au litige : " (...) II. - 1. La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie à l'article 1586 sexies. / Pour la détermination de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, on retient la valeur ajoutée produite et le chiffre d'affaires réalisé au cours de la période mentionnée à l'article 1586 quinquies, à l'exception, d'une part, de la valeur ajoutée afférente aux activités exonérées de cotisation foncière des entreprises en application des articles 1449 à 1463 et 1464 K, à l'exception du 3° de l'article 1459, et, d'autre part, de la valeur ajoutée afférente aux activités exonérées de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises en application des I à III de l'article 1586 nonies. Cette valeur ajoutée fait, le cas échéant, l'objet de l'abattement prévu au IV de l'article 1586 nonies (...) ".
15. Il résulte de l'instruction que le service vérificateur a remis en cause, au titre de l'exercice clos en 2011, la déductibilité de la fraction de la rémunération, affectée à l'exploitation française, versée à la société B... pour un montant de 946 000 euros, qualifiée par la société " d'indemnité d'administrateur ". Le tribunal administratif a considéré que l'administration fiscale avait admis la nouvelle répartition des charges entre établissement français et siège monégasque, impliquant de rattacher cette somme de 946 000 euros au siège monégasque et de substituer un résultat déficitaire égal à 2 535 226 euros au résultat excédentaire déclaré de 415 029 euros au titre de l'établissement français, et que la Smett était ainsi fondée à demander la décharge de la cotisation supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011, ainsi que conséquemment, des cotisations supplémentaires de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises auxquelles elle a été soumise au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013.
16. Ainsi qu'il a été dit au point 7, l'administration a admis, dans son principe, la nouvelle affectation des charges revendiquée par la Smett. En revanche, elle a toujours remis en cause la déductibilité de la somme de 946 000 euros au motif qu'elle ne satisfaisait pas aux conditions prévues par le 1° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, la société n'ayant pas justifié la comptabilisation de cette charge dans l'intérêt direct de son exploitation. La seule référence au procès-verbal du conseil d'administration du 16 juin 2011 mentionnant que cette somme vise à rémunérer la société B... pour son " apport de nouveaux sponsors et dans le domaine juridique ", qui ne permet pas de déterminer la nature exacte des prestations en cause, est, à cet égard, insuffisante. De même, l'attestation de la société Rolex du 5 février 2015, communiquée au service vérificateur, exposant le rôle joué par la société B... avec la Smett en 2006, dans la conclusion des contrats de sponsoring, ne saurait justifier le versement de cette rémunération, revendiquée en 2011. En outre, la société requérante ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit au point 8, la nouvelle affectation des charges dont elle se prévaut, dont le rattachement de la somme de 946 000 euros à l'établissement monégasque, et qu'il conviendrait en conséquence de substituer un résultat déficitaire au résultat excédentaire déclaré. Par suite, la Smett n'établissant pas que cette dépense de 946 000 euros a été engagée dans l'intérêt direct de son exploitation, ni qu'elle doit être directement rattachée à l'établissement monégasque, c'est à bon droit que le service l'a réintégrée dans ses bénéfices imposables. Le ministre est ainsi fondé à soutenir que le tribunal administratif ne pouvait, pour ce motif, prononcer la décharge des impositions en litige.
17. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Smett devant le tribunal administratif et devant la Cour.
18. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, l'administration a admis au bénéfice de la Smett la nouvelle affectation des charges entre établissements français et monégasque et lui a notifié les " nouvelles conséquences financières " en résultant. La Smett, à supposer qu'elle puisse bénéficier de la correction de son erreur comptable quant à la répartition des charges, ne conteste pas efficacement les nouvelles conséquences financières par la seule production de tableaux censés retracer les opérations de ses établissements. La Smett n'est ainsi pas fondée à soutenir qu'un résultat déficitaire doit être substitué au résultat excédentaire déclaré au titre des exercices en litige.
19. En deuxième lieu, la Smett entend se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, des termes de la lettre du 18 juin 2015 par laquelle le supérieur hiérarchique aurait admis la nouvelle méthode de répartition des charges entre l'établissement français et le siège monégasque impliquant de rattacher la somme de 946 000 euros au siège monégasque et de substituer un résultat déficitaire au résultat excédentaire déclaré au titre de l'établissement français. Toutefois, les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A ou de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures, que des interprétations ou des appréciations antérieures à l'imposition primitive. Par suite, les opinions émises par les agents des services fiscaux lors d'une procédure d'imposition conduisant à l'établissement d'impositions supplémentaires ne peuvent, en tout état de cause, être invoquées à l'encontre de ces impositions supplémentaires, dès lors que les opinions dont il s'agit ne sont pas antérieures aux impositions primitives. Tel est le cas en l'espèce de la lettre du supérieur hiérarchique du 18 juin 2015.
20. En dernier lieu, la Smett n'est pas fondée à invoquer la doctrine référencée BOI-INT-DG-20-20-10 du 12 septembre 2012, au demeurant en partie postérieure au litige, selon laquelle il convient en cas d'entreprises ayant leur siège à l'étranger un établissement stable en France, de se livrer à une analyse fonctionnelle de l'activité de l'un et de l'autre pour déterminer les résultats imposables respectivement en France et à l'étranger, qui ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application.
21. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 auxquelles la Smett a été assujettie. Il y a lieu d'annuler l'article 1er dudit jugement. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 6 mars 2020 est annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les conclusions présentées par la Smett tendant à la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées spontanément au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif par la Smett tendant à la restitution des cotisations d'impôt sur les sociétés acquittées spontanément au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013 et 2014 et le surplus des conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nice du 6 mars 2020 est annulé.
Article 4 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de contribution additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des exercices clos en 2011, 2012, 2013, ainsi que les pénalités correspondantes, dont le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge par le jugement du 6 mars 2020, sont remises à la charge de la Smett.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société monégasque pour l'exploitation du tournoi de tennis et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme Carotenuto, première conseillère
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er décembre 2022.
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N° 20MA01766