Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le groupement foncier agricole (GFA) de Perdiguières a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2017 par lequel le maire de Saint-Rémy-de-Provence a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la régularisation de la rénovation d'une construction existante sur un terrain situé au lieu-dit " A... B... ".
Par un jugement n° 1709384 du 9 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 août 2020, le GFA de Perdiguières, représenté par la SELARL L.S.C.M. et G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 janvier 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Saint-Rémy-de-Provence du 21 septembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au maire de Saint-Rémy-de-Provence de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de cinq jours à compter de la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Rémy-de-Provence la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il a invoqué le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de l'avis conforme défavorable émis par le préfet des Bouches-du-Rhône ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme n'est pas applicable, la commune n'étant pas dotée d'un plan local d'urbanisme à la date de son édiction ;
- l'avis conforme défavorable du préfet a été signé par une autorité incompétente ;
- cet avis conforme est entaché d'une erreur d'appréciation au regard du 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme ;
- compte tenu de l'illégalité de cet avis conforme, le maire ne se trouvait pas en situation de compétence liée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la cour a désigné M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me Delbourg, représentant le GFA de Perdiguières.
Considérant ce qui suit :
1. Le GFA de Perdiguières a déposé, le 17 février 2017, une demande de permis de construire, ultérieurement complétée, en vue de la régularisation de la " rénovation d'un bâtiment existant ", implanté sur un terrain situé au lieu-dit " A... B... " sur le territoire de la commune de Saint-Rémy-de-Provence, afin d'y créer " une salle de dégustation au rez-de-chaussée " ainsi qu'un " logement ouvrier au premier étage ". Par un arrêté du 21 septembre 2017, le maire de Saint-Rémy-de-Provence a refusé de délivrer le permis de construire sollicité. Le GFA de Perdiguières relève appel du jugement du 9 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Pour rejeter les conclusions à fin d'annulation présentées par le GFA de Perdiguières, les premiers juges ont relevé que, compte tenu du caractère défavorable de l'avis conforme émis le 25 avril 2017 par le préfet des Bouches-du-Rhône, le maire de Saint-Rémy-de-Provence se trouvait en situation de compétence liée pour refuser de délivrer le permis de construire sollicité. Après avoir relevé l'existence de cette situation de compétence liée, dont les parties ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les premiers juges ont estimé que les moyens invoqués par le GFA de Perdiguières devaient être écartés comme inopérants dès lors qu'ils ne portaient ni sur la régularité ni sur le bien-fondé de cet avis conforme défavorable. Ce faisant, ils ont suffisamment motivé leur jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme : " Lorsque le maire (...) est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu (...) ".
5. Le plan d'occupation des sols de Saint-Rémy-de-Provence étant devenu caduc le 27 mars 2017 en application des articles L. 174-1 et L. 174-3 du code de l'urbanisme, le maire a recueilli l'avis conforme requis en application des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 422-5 du même code. Pour refuser de délivrer le permis de construire sollicité par le GFA de Perdiguières, le maire de Saint-Rémy-de-Provence s'est fondé sur l'avis conforme défavorable émis le 25 avril 2017 par le préfet des Bouches-du-Rhône.
6. En premier lieu, le GFA de Perdiguières excipe de l'illégalité de l'avis conforme défavorable émis le 25 avril 2017 par le préfet des Bouches-du-Rhône.
7. Si, lorsque la délivrance d'une autorisation administrative est subordonnée à l'accord préalable d'une autre autorité, le refus d'un tel accord, qui s'impose à l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, ne constitue pas une décision susceptible de recours, des moyens tirés de sa régularité et de son bien-fondé peuvent, quel que soit le sens de la décision prise par l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, être invoqués devant le juge saisi de cette décision.
8. D'une part, en vertu d'un arrêté n° 2015-215-101 du préfet des Bouches-du-Rhône du 3 août 2015, régulièrement publié le même jour au recueil n° 128 bis des actes administratifs de la préfecture, M. C... H..., directeur départemental interministériel des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône, a reçu délégation à l'effet de signer notamment les avis conformes mentionnés à l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme. Par un arrêté n° 13-2017-070 du 3 avril 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 5 avril suivant, M. F... D..., directeur adjoint des territoires et de la mer, délégué à la mer et au littoral, signataire de l'avis conforme défavorable émis le 25 avril 2017, a reçu de M. H... délégation à l'effet de signer l'ensemble des actes et décisions relevant des attributions de celui-ci et visées dans l'arrêté du 3 août 2015 évoqué ci-dessus. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'avis conforme défavorable émis le 25 avril 2017 par le préfet des Bouches-du-Rhône aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté.
9. D'autre part, aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune ". L'article L. 111-4 du même code dispose, dans sa rédaction alors en vigueur, antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, que : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : (...) / 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole (...) ".
10. Il résulte de ces dispositions que, dans les communes dépourvues de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, la règle de constructibilité limitée n'autorise, en dehors des parties urbanisées de la commune, que les constructions et installations nécessaires, notamment, à l'exploitation agricole. Ce lien de nécessité, qui doit faire l'objet d'un examen au cas par cas, s'apprécie entre, d'une part, la nature et le fonctionnement des activités de l'exploitation agricole et, d'autre part, la destination de la construction ou de l'installation projetée. Il s'ensuit que la seule qualité d'exploitant agricole du pétitionnaire ne suffit pas à caractériser un tel lien. En particulier, lorsque le projet prévoit la création d'un logement, il convient d'apprécier le caractère indispensable de la présence permanente de son occupant sur l'exploitation au regard de la nature et du fonctionnement des activités de l'exploitation agricole.
11. Il n'est pas contesté que la construction concernée par le projet litigieux est implantée sur un terrain situé en dehors des parties urbanisées de la commune de Saint-Rémy-de-Provence. Si le GFA de Perdiguières soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le préfet des Bouches-du-Rhône dans son avis conforme défavorable, le projet litigieux est nécessaire à une exploitation agricole, il n'assortit pas ses allégations sur ce point de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il n'apporte en particulier aucune précision relative à la nature et au fonctionnement des activités de l'exploitation agricole implantée sur les terres lui appartenant. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet litigieux, consistant en la création d'une salle de dégustation au rez-de-chaussée et d'un " logement ouvrier " au premier étage de cette construction, serait nécessaire à l'exploitation agricole en cause, orientée vers la viticulture et la culture fruitière, au sens et pour l'application des dispositions citées ci-dessus du 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme. Par suite, le GFA de Perdiguières n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait fait une inexacte application de ces dispositions.
12. En second lieu, le maire de Saint-Rémy-de-Provence étant tenu de refuser de délivrer le permis de construire sollicité compte tenu du sens de l'avis conforme émis par le préfet des Bouches-du-Rhône, les autres moyens invoqués par le GFA de Perdiguières, qui ne sont pas dirigés contre cet avis conforme dont l'illégalité n'est pas établie, ne peuvent qu'être écartés comme étant sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que le GFA de Perdiguières n'est pas fondé à soutenir, par les moyens qu'il invoque, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
14. Les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par le GFA de Perdiguières ne peuvent, compte tenu du rejet de ses conclusions à fin d'annulation, qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Rémy-de-Provence, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le GFA de Perdiguières au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête du GFA de Perdiguières est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au groupement foncier agricole de Perdiguières, à la commune de Saint-Rémy-de-Provence ainsi qu'au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Quenette, premier conseiller,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2022.
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N° 20MA02929