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15/06/2023 | FRANCE | N°21MA02699

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 15 juin 2023, 21MA02699


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 à 2014, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des majorations correspondantes.


Par un jugement n° 1900541 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Marseille a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 à 2014, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1900541 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 juillet 2021 et le 27 mars 2023, M. A..., représenté par Me Bouscasse, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mai 2021 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et majorations demeurant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a confirmé à la Cour le maintien de sa requête ;

- la proposition de rectification du 6 juillet 2016 est insuffisamment motivée quant à la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des dépenses non justifiées ou présentant un caractère professionnel ;

- l'administration, en s'abstenant de mentionner dans la proposition de rectification les sources des informations qui fondent sa position, n'a pas respecté les droits de la défense ;

- les factures de sous-traitance établies par la société Sud Conception au cours de l'année 2012 ne pouvaient être qualifiées de fictives ;

- les factures de sous-traitance comptabilisées au cours des années 2013 et 2014 ne pouvaient être qualifiées de fictives ;

- il a présenté les factures et relevés justifiant la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux achats de matériaux pour le chantier situé 61 traverse du Maroc à Marseille ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause des charges correspondant à des dépenses de la société Batimavi au titre des années 2013 et 2014 ;

- c'est à tort que l'administration a imposé entre ses mains les bénéfices de la société en participation (SEP) Clos Rosia ;

- l'application de la majoration pour manquement délibéré est insuffisamment motivée ;

- la motivation de la proposition de rectification ne répond pas au principe de la proportionnalité des peines.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 février 2023 et le 14 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.

Il fait valoir que :

- M. A... est réputé s'être désisté ;

- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Platillero, président assesseur, pour présider la formation de jugement, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Bouscasse, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2013 et 2014, et son activité de maçonnerie a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. A l'issue de ces contrôles, l'administration a réclamé à M. A... des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, et elle l'a assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2012 à 2014, ainsi qu'à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre des années 2013 et 2014, à raison notamment de la remise en cause de la déduction de charges de sous-traitance et de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante, et de l'imposition entre les mains de M. A... des résultats d'une SEP au titre de l'année 2014. M. A... relève appel du jugement du 18 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, des suppléments d'impôt sur le revenu et de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus demeurant à sa charge à l'issue de l'admission partielle de ses réclamations préalables, ainsi que des majorations correspondantes.

Sur l'application de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative :

2. Aux termes de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative : " En cas de rejet d'une demande de suspension présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision, il appartient au requérant, sauf lorsqu'un pourvoi en cassation est exercé contre l'ordonnance rendue par le juge des référés, de confirmer le maintien de sa requête à fin d'annulation ou de réformation dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce rejet. A défaut, le requérant est réputé s'être désisté (...) ".

3. Par une ordonnance n° 21MA03231 de la juge des référés de la Cour du 7 octobre 2021, la requête en suspension de la mise en recouvrement des impositions mises à la charge de M. A... a été rejetée. Par une lettre enregistrée au greffe le 26 octobre 2021, le conseil de M. A... a confirmé expressément le maintien de la présente requête. Ainsi, le requérant établit avoir confirmé, dans le délai d'un mois qui lui était imparti, le maintien de sa demande. Dès lors, il n'y pas lieu de donner acte d'un désistement.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.

5. La proposition de rectification du 6 juillet 2016 adressée à M. A..., qui indique le montant global des rappels de taxe sur la valeur ajoutée envisagés à raison de la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des dépenses non justifiées ou présentant un caractère professionnel, comporte en annexe des tableaux retraçant le détail des dépenses considérées et indiquant pour chacune d'entre elles le motif de la remise en cause de la déduction de la taxe. Ainsi, la motivation de cette proposition de rectification comportait des éléments suffisamment circonstanciés pour permettre au contribuable de formuler des observations de manière utile en ce qui concerne la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée. Dès lors, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 6 juillet 2016 serait insuffisamment motivée quant à la remise en cause de la taxe sur la valeur ajoutée déductible doit être écarté.

6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que trois propositions de rectification ont été adressées à M. A.... Par conséquent, le moyen tiré de ce que les droits de la défense auraient été méconnus au motif que l'administration s'est abstenue de mentionner dans la proposition de rectification les sources des informations qui fondent sa position n'est pas assorti des précisions qui permettent à la Cour de statuer sur son bien-fondé.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les factures qualifiées de fictives :

7. D'une part, aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; / (...) ". Aux termes de l'article 272 du même code : " (...) / 2. La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l'article 283 ne peut faire l'objet d'aucune déduction par celui qui a reçu la facture. / (...) ". Aux termes du 4 de cet article 283 : " Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée ".

8. Il résulte de ces dispositions qu'un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services. Dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance. Si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération.

9. D'autre part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Les charges pouvant être admises en déduction du bénéfice imposable, en application des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts, doivent avoir été exposées dans l'intérêt direct de l'entreprise ou se rattacher à sa gestion normale, correspondre à une charge effective et être appuyées de justificatifs. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

10. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. A... a comptabilisé au cours de l'année 2012 des charges correspondant à des prestations de sous-traitance rendues par la société Sud Conception, pour un montant total de 125 481,13 euros hors taxes. La déduction de ces dépenses et de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante a été remise en cause par le vérificateur, auquel M. A... n'a pas présenté de contrat de sous-traitance, malgré sa demande. L'administration a par ailleurs notamment relevé que la société Sud Conception, placée en liquidation judiciaire depuis le 26 mai 2011, ne disposait plus du personnel nécessaire à la réalisation des prestations facturées, qu'elle n'a pas été agréée par le donneur d'ordre, la société Maison France Confort, que la majeure partie des prestations facturées ont été réglées directement par M. A... en espèces, sans que ce dernier soit en mesure de désigner la personne auprès de laquelle les règlements ont été effectués, et que des factures émises entre janvier et avril 2012 ont été comptabilisées, alors que le premier chantier facturé à la société Maison France Confort a été réalisé en avril 2012. Pour contester ces éléments et justifier de la réalité des prestations lui ayant été ainsi facturées, et par suite de leur caractère déductible, ainsi que de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures, M. A... se borne à faire valoir que les travaux qui lui ont été confiés en sous-traitance par la société Maison France Confort ont été effectivement réalisés. Cette circonstance n'est pas en elle-même de nature à caractériser la réalité des prestations facturées par la société Sud Conception, alors que M. A..., qui, en tout état de cause, n'établit pas qu'il n'aurait pas eu accès au cours des contrôles dont il a fait l'objet aux éléments de preuve sur lesquels l'administration s'est fondée, ne conteste pas la légalité de l'obtention et de l'utilisation de ces éléments. Dans ces conditions, l'administration établit, d'une part, que les factures de sous-traitance comptabilisées en 2012 ne correspondaient pas à des opérations réelles et étaient ainsi fictives en matière de taxe sur la valeur ajoutée, et, d'autre part, que les charges correspondantes comptabilisées étaient dépourvues de contreparties.

11. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que M. A... a comptabilisé au cours des années 2013 et 2014 des charges correspondant à des prestations de sous-traitance rendues par plusieurs entreprises, pour des montants totaux respectifs hors taxes de 185 301 euros au titre de l'année 2013 et de 114 635 euros au titre de l'année 2014. La déduction de ces dépenses et de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante a été remise en cause par le vérificateur, auquel M. A... n'a pas présenté la totalité des contrats de sous-traitance le liant aux entreprises concernées, malgré sa demande. L'administration a par ailleurs notamment relevé que les contrats de sous-traitance qui ont été présentés ne sont pas datés et ne portent pas sur les prestations qui sont facturées, que trois des sous-traitants qui ont cessé leur activité en 2012 et en 2014 n'ont plus disposé du personnel nécessaire à la réalisation des prestations facturées, que les sous-traitants n'ont pas été agréés par le donneur d'ordre Maison France Confort, et que le mode de règlement des factures n'est pas celui qui a été prévu par les contrats de sous-traitance, qui exige des règlements par chèque ou par traite, alors que la majeure partie des prestations facturées ont été réglées directement par M. A... en espèces, sans que ce dernier soit en mesure de désigner la personne auprès de laquelle les règlements ont été effectués. Pour contester ces éléments et justifier de la réalité des prestations lui ayant été ainsi facturées, et par suite de leur caractère déductible, ainsi que de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures, M. A... se borne à faire valoir que les travaux qui lui ont été confiés en sous-traitance par la société Maison France Confort ont été effectivement réalisés et que son entreprise n'aurait pu réaliser le chiffre d'affaires déclaré sans recours à sous-traitants. Ces circonstances ne sont pas en elles-mêmes de nature à caractériser la réalité des prestations facturées par les entreprises alors que M. A..., qui, en tout état de cause, n'établit pas qu'il n'aurait pas eu accès au cours des contrôles dont il a fait l'objet aux éléments de preuve sur lesquels l'administration s'est fondée, ne conteste pas la légalité de l'obtention et de l'utilisation de ces éléments. Dans ces conditions, l'administration établit, d'une part, que les factures de sous-traitance comptabilisées en 2013 et 2014 ne correspondaient pas à des opérations réelles et étaient ainsi fictives en matière de taxe sur la valeur ajoutée, et, d'autre part, que les charges correspondantes comptabilisées étaient dépourvues de contreparties.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible afférente aux autres dépenses :

12. Aux termes du 1 du I de l'article 271 du code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ". Aux termes du 1 de l'article 273 du même code : " Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les conditions d'application de l'article 271. / Ils fixent notamment : / (...) - les modalités suivant lesquelles la déduction de la taxe ayant grevé les biens ou services qui ne sont pas utilisés exclusivement pour la réalisation d'opérations imposables doit être limitée ou réduite ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II au code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction ". Aux termes de l'article 206 de cette même annexe : " I. - Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission. / (...) IV. - 1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. / 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : / 1° Lorsque le bien ou le service est utilisé par l'assujetti à plus de 90 % à des fins étrangères à son entreprise ; (...) ".

13. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le vérificateur a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée comptabilisée au cours des années 2013 et 2014 à hauteur des montants respectifs de 2 252 euros et de 2 030 euros au motif que certaines factures n'ont pas été présentées, ou que les dépenses n'ont pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise. Les rappels correspondant ont été partiellement abandonnés par l'administration, à hauteur de 335 euros pour l'année 2013 et de 1 557 euros pour l'année 2014 au regard de la présentation de certaines factures. M. A... ne produit aucun élément de nature à démontrer que, contrairement à ce que le vérificateur a indiqué, il aurait présenté l'ensemble des factures en cause, alors que la production de ces factures lui a été demandée à deux reprises au cours du contrôle, par des demandes de renseignements du 31 mars et du 31 mai 2016. Par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que M. A... aurait présenté les factures et relevés justifiant la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée.

14. En deuxième lieu, le vérificateur a constaté, dans le cadre de l'examen des factures de sous-traitance, que s'agissant d'un chantier réalisé en sous-traitance au cours de l'année 2014 au 61, traverse du Maroc à Marseille, le montant facturé au titre du contrat s'élève à 43 580 euros, alors que les charges engagées pour ce chantier s'élèvent à 83 903 euros, et que M. A... est le gérant et le principal associé de la société civile immobilière (SCI) 2M, qui a fait l'acquisition, le 14 août 2014, d'un terrain à bâtir situé à la même adresse et a fait réaliser une construction sur ce terrain. Il a estimé qu'une partie des achats de marchandises livrées sur le chantier concernait la construction réalisée sur le terrain appartenant à la SCI 2M, et a remis en cause la déduction de la totalité de la taxe sur la valeur ajoutée relative à ces achats, en l'absence de toute possibilité de ventilation. Alors que M. A..., contrairement à ce qu'il fait valoir, ne pouvait déduire la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des matériaux utilisés pour la construction réalisée au bénéfice de la SCI 2M, il se borne à affirmer que les achats en cause n'ont pas été utilisés à plus de 90 % pour la construction réalisée sur le terrain appartenant à la SCI sans produire aucun élément de justification à cet égard. Par conséquent, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux achats de matériaux pour le chantier situé 61 traverse du Maroc à Marseille.

En ce qui concerne les autres charges déductibles des bénéfices industriels et commerciaux :

15. Le vérificateur a remis en cause la déduction des bénéfices de M. A... de frais d'architecte, de publicité et d'obtention de permis de construire engagés au bénéfice d'une société tierce, la société Batimavi. M. A..., qui fait désormais valoir que ces charges correspondent en réalité à des aides à caractère commercial, ne verse aux débats aucun élément permettant de justifier qu'il aurait consenti à la société Batimavi des aides déductibles. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction de charges correspondant à des dépenses de la société Batimavi au titre des années 2013 et 2014.

En ce qui concerne l'imposition du résultat de la SEP Clos Rosia :

16. Aux termes de l'article 8 du code général des impôts, sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société, les " membres des sociétés en participation (...) qui sont indéfiniment responsables et dont les noms et adresses ont été indiqués à l'administration ". Aux termes du 4 de l'article 206 du même code : " Même à défaut d'option, l'impôt sur les sociétés s'applique, sous réserve des dispositions de l'article 1655 ter, dans les sociétés en commandite simple et dans les sociétés en participation, y compris les syndicats financiers, à la part de bénéfices correspondant aux droits des commanditaires et à ceux des associés autres que ceux indéfiniment responsables ou dont les noms et adresses n'ont pas été indiqués à l'administration ". Il résulte de ces dispositions que, dans la mesure où elles entendent que les bénéfices qu'elles ont réalisés au titre d'un exercice et éventuellement des exercices suivants, soient imposés directement au nom de leurs membres, les sociétés en participation, auxquelles il incombe d'effectuer la déclaration desdits bénéfices dans les formes appropriées au régime de leur imposition, doivent informer l'administration des noms et adresses de leurs associés concernés, au plus tard avant l'expiration du délai dans lequel la déclaration relative au premier exercice en cause doit être déposée.

17. Il résulte de l'instruction que M. A... était membre de la SEP Clos Rosia, constituée en 2011 afin de réaliser un lotissement. Eu égard aux mentions du procès-verbal d'assemblée générale de la société du 28 juillet 2014 et de l'acte de vente du terrain du 13 août 2014, l'administration a estimé que M. A... devait être personnellement imposé au titre de l'année 2014 à raison du tiers du résultat de l'opération, soit la somme de 80 000 euros, à laquelle le coefficient de 1,25 prévu par l'article 158-7-1° du code général des impôts a été appliqué. Il est constant, d'une part, que cette société n'a souscrit aucune déclaration fiscale et, d'autre part, que l'administration des impôts n'a eu connaissance de son existence comme des noms et adresses de ses associés, que de façon indirecte, à l'occasion de la conclusion de l'acte de vente du terrain conclu le 13 août 2014. Ces noms et adresses ne peuvent, dans ces conditions, être réputés avoir été " indiqués à l'administration " par la SEP Clos Rosia conformément aux dispositions précitées. Par conséquent, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a imposé entre ses mains la somme de 100 000 euros à raison des bénéfices de la SEP Clos Rosia au titre de l'année 2014.

Sur les pénalités :

18. Aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) ".

19. Contrairement à ce que soutient le requérant, le vérificateur a suffisamment motivé l'application de la majoration pour manquement délibéré dans la proposition de rectification du 6 juillet 2016 en citant l'article 1729 du code général des impôts, et en indiquant pour chacun des chefs de redressement, et notamment celui qui est relatif à la taxe sur la valeur ajoutée sur les achats de marchandises pour le chantier situé 61 traverse du Maroc, les considérations de fait qui permettent de caractériser l'existence d'une volonté délibérée d'éluder l'impôt. Pour les mêmes motifs, doit être en tout état de cause écarté le moyen tiré de ce que la motivation de la proposition de rectification ne répondrait pas au principe de la proportionnalité des peines.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est par ailleurs suffisamment motivé, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la réduction de la base de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014 à hauteur de la somme de 100 000 euros, ainsi qu'à la décharge des droits et majorations correspondants.

Sur les frais liés au litige :

21. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La base de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à la charge de M. A... au titre de l'année 2014 est réduite de 100 000 euros.

Article 2 : M. A... est déchargé des droits et majorations correspondant à cette réduction.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1900541 du 18 mai 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, où siégeaient :

- M. Platillero, président assesseur, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C... et Mme Mastrantuono, premières conseillères.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2023.

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N° 21MA02699


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