Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 2 août 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.
Par un jugement n° 2207514 du 20 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 20 avril 2023 sous le n° 23MA01002, M. A..., représenté par Me Carmier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 2 août 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ;
- la décision de refus de certificat de résidence méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et le préfet a commis une erreur de droit à cet égard ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de certificat de résidence ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 mai 2023, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 mars 2023.
II. Par une requête enregistrée le 3 mai 2023 sous le n° 23MA01097, M. A..., représenté par Me Carmier, demande à la cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué aurait des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens, visés ci-dessus, présentent un caractère sérieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 mai 2023, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés et que les conditions du sursis à exécution ne sont pas remplies.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 mars 2023.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mouret,
- et les observations de Me Carmier, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né en 1991 et déclarant être entré en France le 28 juin 2021, a sollicité, le 8 février 2022, la délivrance d'un certificat de résidence. Par un arrêté du 2 août 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement du 20 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de cet arrêté. Par ses requêtes visées ci-dessus, qui sont dirigées contre ce jugement et qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un même arrêt, M. A... demande à la cour de l'annuler et d'en prononcer le sursis à exécution.
Sur la requête n° 23MA01002 :
2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué par adoption des motifs retenus à bon droit au point 3 du jugement attaqué.
3. En deuxième lieu, M. A... ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence, laquelle n'a ni pour objet ni pour effet de l'éloigner à destination de son pays d'origine.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est marié avec un ressortissant français le 29 janvier 2022, soit quelques mois seulement avant l'édiction de l'arrêté attaqué. Le requérant n'établit pas, par les seules pièces qu'il produit, la réalité et la stabilité de sa relation avec son époux antérieurement à son entrée déclarée sur le territoire français au cours du mois de juin 2021. Il n'apparaît pas, au vu des attestations peu circonstanciées versées aux débats, qu'il aurait tissé des liens sociaux ou amicaux d'une intensité particulière sur le territoire français. Par ailleurs, M. A... n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine dans lequel résident notamment ses parents ainsi que les membres de sa fratrie et où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans. Compte tenu en particulier des conditions et du caractère très récent du séjour en France de M. A... à la date de l'arrêté attaqué, la décision de refus de certificat de résidence en litige ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a à cet égard commis aucune erreur de droit, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes raisons, cette autorité n'a pas davantage commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de cette décision sur la situation de M. A....
6. En quatrième lieu, M. A... n'est pas fondé, eu égard à ce qui précède, à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre serait illégale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence.
7. En cinquième lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 5, la mesure d'éloignement en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation de M. A....
8. En sixième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Selon le dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Ainsi que l'a jugé le tribunal au point 11 du jugement attaqué, M. A... n'établit pas, par les seules pièces qu'il produit, la réalité des risques encourus et des menaces auxquelles il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine, notamment en raison de son orientation sexuelle et du fait que l'homosexualité y est pénalement réprimée. A cet égard, pour regrettable qu'elle soit, la circonstance que la mention de son mariage ait, postérieurement à l'arrêté attaqué, été portée en marge de l'acte de naissance de M. A... ne saurait, en tout état de cause, suffire à établir qu'il serait susceptible d'être exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en Algérie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et dispositions citées au point précédent doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 2 août 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.
Sur la requête n° 23MA01097 :
11. Le présent arrêt statuant sur les conclusions de la requête de M. A... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 décembre 2022, les conclusions de sa requête n° 23MA01097 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement sont devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu de statuer sur ces conclusions. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A..., dans cette dernière instance, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 23MA01097 à fin de sursis à exécution.
Article 2 : La requête n° 23MA01002 et le surplus des conclusions de la requête n° 23MA01097 sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer ainsi qu'à Me Carmier.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.
Le rapporteur,
Signé
R. MOURETLe président,
Signé
P. PORTAILLa greffière,
Signé
N. JUAREZ
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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Nos 23MA01002, 23MA01097