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19/06/2025 | FRANCE | N°23MA02430

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 19 juin 2025, 23MA02430


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SARL Magic Boy Animation a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er avril 2015 au 31 mars 2018, ainsi que des majorations correspondantes.



Par un jugement no 2102395 du 10 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulon a déchargé la SARL Magic Boy Animation des majorations correspondant à la différence entre l'intérêt de

retard initialement mis à sa charge et celui résultant de l'application des dispositions du 1 du IV ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Magic Boy Animation a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er avril 2015 au 31 mars 2018, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement no 2102395 du 10 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulon a déchargé la SARL Magic Boy Animation des majorations correspondant à la différence entre l'intérêt de retard initialement mis à sa charge et celui résultant de l'application des dispositions du 1 du IV de l'article 1727 du code général des impôts, et rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 septembre 2023, la SARL Magic Boy Animation, représentée par Me Persico, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du 10 juillet 2023 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et des majorations restant en litige ;

3°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les prestations de restauration qu'elle facture ne forment pas une prestation complexe unique ou une opération économique indissociable avec ses autres prestations ;

- la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires a rendu un avis favorable à sa demande ;

- elle peut se prévaloir du rescrit fiscal du 27 novembre 2019 référencé BOI-RES-000057-2019-1127.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Magic Boy Animation ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Mérenne,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Magic Boy Animation, créée le 1er octobre 2011, a pour objet l'organisation d'évènements dans divers lieux. A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a réclamé à la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre du la période du 1er avril 2015 au 31 mars 2018. La SARL Magic Boy Animation fait appel du jugement du 10 juillet 2023 du tribunal administratif de Toulon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions après l'avoir déchargée des majorations correspondant à la différence entre l'intérêt de retard initialement mis à sa charge et celui résultant de l'application des dispositions du 1 du IV de l'article 1727 du code général des impôts.

Sur l'assujettissement des prestations de restauration au taux réduit :

2. La SARL Magic Boy Animation soutient que les prestations de restauration qu'elle facture constituent des prestations distinctes qui relèvent des ventes à consommer sur place, soumises au taux réduit de 10 % prévu au m. de l'article 279 du code général des impôts, alors que l'administration fiscale considère que ces prestations constituent l'accessoire d'autres prestations de la société relatives à l'organisation d'évènements et à la location de salles, et sont par suite soumises au taux normal de 20 %.

3. Il résulte des dispositions de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, que, lorsqu'une opération économique soumise à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par un faisceau d'éléments et d'actes, il y a lieu de prendre en compte toutes les circonstances dans lesquelles elle se déroule aux fins de déterminer si l'on se trouve en présence de plusieurs prestations ou livraisons distinctes ou d'une prestation ou d'une livraison complexe unique. Chaque prestation ou livraison doit en principe être regardée comme distincte et indépendante. Toutefois, l'opération constituée d'une seule prestation sur le plan économique ne doit pas être artificiellement décomposée pour ne pas altérer la fonctionnalité du système de la taxe sur la valeur ajoutée. De même, dans certaines circonstances, plusieurs opérations formellement distinctes, qui pourraient être fournies et taxées séparément, doivent être regardées comme une opération unique lorsqu'elles ne sont pas indépendantes. Tel est le cas lorsque, au sein des éléments caractéristiques de l'opération en cause, certains éléments constituent la prestation principale, tandis que les autres, dès lors qu'ils ne constituent pas pour les clients une fin en soi mais le moyen de bénéficier dans de meilleures conditions de la prestation principale, doivent être regardés comme des prestations accessoires partageant le sort fiscal de celle-ci. Tel est le cas, également, lorsque plusieurs éléments fournis par l'assujetti au consommateur, envisagé comme un consommateur moyen, sont si étroitement liés qu'ils forment, objectivement, une seule opération économique indissociable, le sort fiscal de celle-ci étant alors déterminé par celui de la prestation prédominante au sein de cette opération.

4. La SARL Magic Boy Animation organise, principalement au château de Thouar, sur le territoire de la commune du Muy, des évènements tels que des thés dansants et des soirées dansantes, d'une part, et des mariages, repas d'entreprises et autres évènements festifs privés, d'autre part. Pour ce deuxième ensemble d'évènements, la société assure principalement une prestation de location de salles et une prestation d'animation festive. Elle propose en outre une prestation de restauration qui est assurée par une entreprise sous-traitante, la société Borges évènements, dont l'activité est soumise à la TVA au taux réduit de 10 %. La SARL Magic Boy Animation refacture ces prestations à ses clients sans appliquer de marge. Il résulte de l'instruction que les évènements privés organisés par la société peuvent comporter ou non des prestations de restauration et que les clients peuvent choisir l'entreprise assurant les prestations de restaurant pour leur propre évènement sans se voir imposer la société Borges évènements. Si l'administration fiscale fait valoir que la SARL Magic Boy Animation ne propose pas de prestations de restauration indépendantes de ses prestations de location et d'animation, il est constant que ses clients peuvent, s'agissant de la restauration, faire directement appel à la société Borges évènements, sans passer par la SARL Magic Boy Animation dont l'activité principale, ainsi qu'il a été dit, est liée à l'animation des évènements. En outre, si les prestations de restauration assurées par la société Borges évènements en tant que sous-traitante ne font pas l'objet d'une facturation distincte, la TVA au taux réduit et les montants hors taxe qui s'y rapportent sont comptabilisés à part sur les factures remises aux clients. Les modalités de commercialisation et de réalisation permettent ainsi aux clients de distinguer les prestations ssurées par chacune des deux entreprises, de notoriété locale, dont les domaines d'activité respectifs sont connus des consommateurs. Par ailleurs, les recettes de restauration, qui représentent entre 30 et 40 % des recettes totales de la SARL Magic Boy Animation, ne présentent pas un caractère minime ou marginal. De plus, la position de l'administration a pour effet d'imposer différemment les prestations de restauration refacturées par la SARL Magic Boy Animation de celles assurées dans les mêmes conditions par des entreprises de restauration concurrentes, alors que les clients de la société ont la possibilité de choisir leur traiteur pour l'évènement concerné. En outre, elle conduit la société à facturer au taux normal des prestations qu'elle a acquittées au taux réduit de 10 %, en contravention avec le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, ces prestations doivent être regardées comme distinctes et indépendantes et c'est à tort que les prestations de restauration ont été soumises au taux normal de taxe sur la valeur ajoutée.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, la SARL Magic Boy Animation est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros à la SARL Magic Boy Animation au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement du 10 juillet 2023 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : La SARL Magic Boy Animation est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés à hauteur de la somme totale de 18 571 euros au titre de la période du 1er avril 2015 au 31 mars 2018, ainsi que des majorations correspondantes.

Article 3 : L'État versera la somme de 2 000 euros à la SARL Magic Boy Animation en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Magic Boy Animation et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée pour information à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2025, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président-assesseur,

- M. Mérenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 juin 2025.

2

No 23MA02430


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02430
Date de la décision : 19/06/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-01-01 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée. - Personnes et opérations taxables. - Opérations taxables.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : PERSICO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-19;23ma02430 ?
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