(Première chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 janvier 1994, présentée pour MM. Lucien, Gérard et Jacques Y..., demeurant à PINEY (10220), agissant en qualité d'héritiers de M. André Y..., ayant pour avocat la SCP Colomes-Vangheesdaele ;
Ils demandent que la Cour :
1 ) - annule le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en date du 16 novembre 1993, en tant qu'il a rejeté leur demande tendant, d'une part, à ce que l'Association Foncière de Remembrement de PEL et DER (52) soit déclarée entièrement responsable des dommages subis par leur propriété lors des travaux connexes au remembrement qui se sont déroulés dans la commune de PEL et DER, et d'autre part, à ce qu'une expertise soit ordonnée aux fins de déterminer et chiffrer le montant de ces dommages ;
2 ° - déclare l'Association Foncière de Remembrement de PEL et DER responsable des dommages subis par leurs propriétés et, en conséquence, prescrive une expertise aux fins de déterminer et chiffrer leur préjudice ;
VU les mémoires en défense, enregistrés les 31 mars et 27 juin 1994, présentés pour l'Association Foncière de Remembrement de PEL et DER, dont le siège est en mairie de PEL et DER (10500), représentée par son Président en exercice, ayant pour avocat Me X... ; elle demande à la Cour de constater l'abandon par les consorts Y... de leur demande d'exonération de taxe foncière et de rejeter le surplus des conclusions de la requête ;
VU le mémoire en réplique, enregistré le 6 juillet 1994, et le mémoire complémentaire, enregistré le 3 août 1994, présentés pour les consorts Y... qui concluent aux même fins que la requête par les mêmes moyens ;
VU le mémoire en réponse, enregistré le 23 septembre 1994, présenté pour l'Association Foncière de PEL et DER, qui conclut aux même fins que précédemment par les mêmes moyens ;
VU les mémoires en duplique enregistrés les 6 et 12 mars 1996, présentés pour les consorts Y... qui concluent aux mêmes fins que précédemment et tendant, en outre, à ce que l'Association Foncière leur paye une somme de 8 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU le nouveau mémoire, enregistré le 13 mars 1997, présenté pour l'Association Foncière de PEL et DER qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code rural ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 1997 :
- le rapport de M. MOUSTACHE, Conseiller ;
- les observations de Me COLOMES, avocat de MM. Y... ;
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que les consorts Y... recherchent la responsabilité de l'Association Foncière de PEL et DER à raison des travaux de drainage, connexes au remembrement, qu'elle a réalisés en 1980 et dont la conception défectueuse serait à l'origine des dommages subis par la parcelle cadastrée section ZS N 79 dont les requérants sont propriétaires sur le territoire de la commune de PEL et DER ; qu'un tel litige, qui est relatif à l'exécution d'opérations de travaux publics, ressortit à la compétence des juridictions de l'ordre administratif ;
Au fond :
- Sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen tiré de la prescription quadriennale :
Considérant, d'une part, que si les consorts Y... se prévalent, au soutien de leur demande d'indemnité, de la situation d'enclavement dans laquelle se trouve leur parcelle ZS 79, d'une superficie de 1 hectare 16 ares, laquelle ne peut, de ce fait, faire l'objet d'une exploitation normale, une telle situation résulte des attributions faites à M. Y... André, lors des opérations de remembrement qui se sont déroulées en 1979 sur le territoire de la commune de PEL et DER et non pas d'un défaut de conception du système de drainage réalisé par l'Association Foncière de Remembrement ; que, dès lors, les requérants ne sauraient rechercher la responsabilité de cette dernière à raison de ladite attribution, laquelle, au demeurant, n'a pas été contestée par le propriétaire à l'issue des opérations de remembrement ;
Considérant, d'autre part, que si les requérants soutiennent que l'importance démesurée des fossés de drainage creusés au Nord et au Sud de leur parcelle serait à l'origine d'un assèchement du terrain, lequel entrainerait un dépérissement des plantations et une baisse de la "production ligneuse", ils n'établissent nullement la réalité d'une telle allégation ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la conception de l'ouvrage de drainage révèlerait une faute de nature à engager à l'endroit des consorts Y... la responsabilité de l'Association Foncière de Remembrement de PEL et DER ni que la trop grande efficacité du système de drainage, résultant notamment de la nature du sol ou de la configuration des lieux, aurait causé aux requérants un dommage anormal et spécial excèdant ceux que les membres d'une association foncière sont tenus de supporter à l'occasion des travaux exécutés dans l'intérêt commun ;
Considérant, enfin, que les requérants n'ont pas été privés de leurs propriétés sises sur le territoire de la commune de PEL et DER et, dès lors, ils ne sont, en tout état de cause, pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts Y... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Association Foncière de PEL et DER à les indemniser du préjudice qu'ils soutiennent avoir subi du fait des travaux de drainage qu'elle a réalisés au droit de leur propriété ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que l'Association Foncière de Remembrement de PEL et DER, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamnée, sur le fondement des dispositions précitées, à payer aux consorts Y... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1 : La requête des consorts Y... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à MM. Lucien Y..., Gérard Y... et Jacques Y... ainsi qu'à l'Association Foncière de Remembrement de PEL et DER.