Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 avril 1999 sous le n° 99NC00777, complétée par les mémoires enregistrés les 18 juin 1999, 28 août 2000 et 5 avril 2001, présentée pour M. Jacques X, demeurant ..., par Me Florence Hugodot, avocate ;
M. X demande à la Cour :
1°) - de réformer le jugement n° 972626 en date du 9 février 1999 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a limité à 5 000 F le montant de la somme due par l'Etat en réparation du préjudice consécutif au blâme dont il a fait l'objet le 15 juillet 1996 ;
2°) - de condamner l'Etat à lui verser une somme de 948 000 F en réparation de son préjudice moral et de carrière ;
3°) - de condamner l'Etat à lui verser une somme de 8 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Code : C
Plan de classement : 36-13-03
M. X soutient que :
- contrairement à ce que soutient le tribunal, son dossier administratif contient de nombreux documents faisant état de la sanction annulée et attestant de la volonté de continuer à le sanctionner malgré la décision de justice intervenue ;
- il est établi que de nombreux agents ayant une moindre ancienneté que le requérant ont été promus au grade de capitaine ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il a perdu une chance sérieuse d'accéder à ce grade à partir de 1997 ;
- le tribunal a nettement sous-évalué le préjudice moral subi ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2000, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- le dossier du requérant a été purgé de toute mention du blâme annulé ;
- pour le surplus, il y a lieu de se référer aux observations produites en première instance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2004 :
- le rapport de Mme MONCHAMBERT, Président,
- et les conclusions de M. TREAND, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par une décision en date du 15 juillet 1996, le ministre de l'intérieur a infligé à M. X, inspecteur de police, un blâme au motif qu'il aurait manqué au respect du principe hiérarchique en portant directement à la connaissance de l'autorité judiciaire une information selon laquelle son supérieur hiérarchique aurait pu être à l'origine d'une violation du secret professionnel ; que par un jugement en date du 30 avril 1997, devenu définitif, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette sanction ; qu'ainsi que l'a jugé le tribunal par le jugement attaqué, l'illégalité entachant la sanction infligée à M. X constitue une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a estimé que M. X n'établit pas le lien de causalité direct entre la faute commise et les préjudices de carrière allégués, en se fondant, d'une part, sur la circonstance que l'inscription au tableau d'avancement pour l'accès au grade de capitaine était subordonnée aux résultats d'une sélection professionnelle effectuée en fonction des mérites des agents et, d'autre part, sur le fait qu'eu égard aux notes qu'il avait obtenues sur la période 1988-1991, il aurait eu une chance sérieuse d'accéder au grade de capitaine dès 1997 ; qu'en soutenant que son dossier administratif contient encore de nombreux documents faisant état de la sanction annulée, M. X, qui ne démontre pas plus qu'en première instance que de nombreux agents ayant une moindre ancienneté que lui ont été promus au grade de capitaine, n'établit pas que le blâme dont il a fait l'objet l'a privé d'une chance sérieuse d'obtenir l'avancement auquel il prétend ;
Considérant que si le blâme illégalement infligé à M. X n'a entraîné pour celui-ci aucun préjudice de carrière, il a été à l'origine d'un préjudice moral résultant d'une atteinte à sa réputation dont il subit encore les effets ; que, dans les circonstances de l'espèce, M. X est fondé à soutenir qu'en fixant à 5 000 F (762,25 €)le montant de la réparation du préjudice subi, le Tribunal administratif de Strasbourg a fait une inexacte appréciation de l'indemnisation de ce chef de préjudice qui doit être porté à 2 000 € (13 119,14 F) ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a de contraire au présent arrêt ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. X une somme de 1 000 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
ARTICLE 1er : La somme que l'Etat a été condamné à verser à M. X par le jugement en date du 9 février 1999 du Tribunal administratif de Strasbourg est portée de 5 000 F (762,25 €) à 2 000 €.
ARTICLE 2 : Le jugement en date du 9 février 1999 du Tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
ARTICLE 3 : L'Etat est condamné à verser à M. X une somme de 1 000 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
ARTICLE 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
ARTICLE 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
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