Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 11 mai 2001 sous le n° 01NC00518, la requête, complétée par les mémoires enregistrés les 10 septembre et 31 décembre 2001 et 24 mai 2002, présentée pour Mme Colette X demeurant à ..., par Me Goepp, avocat ;
Mme X demande à la Cour :
1°) - d'annuler le jugement n° 972213 du 26 avril 2001 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1995 ;
2°) - de prononcer la décharge demandée ;
3°) - d'ordonner que, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête, il soit sursis à l'exécution des articles de rôle correspondants ;
4°) - de condamner l'Etat à lui payer la somme de 50 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Code : C
Plan de classement : 19-04-02-03
Elle soutient :
- que la rémunération qui lui a été versée par la société La Bague d'Or, fixée à 246 000 F en 1993, n'était pas excessive et ne devait pas être imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
- que le caractère débiteur de son compte courant d'associé n'était dû qu'à l'omission de passer chaque mois sa rémunération en compte courant d'associé ;
- que la notification de redressements du 20 novembre 1996 qui lui a été adressée est insuffisamment motivée en ce qu'elle n'indique pas les raisons pour lesquelles la reconstitution du chiffre d'affaires de la société La Bague d'Or avait été écartée ;
- que l'administration ne pouvait établir l'imposition supplémentaire qu'après avoir démontré l'appréhension effective des revenus distribués ;
- que le redressement relatif aux revenus de capitaux mobiliers résultant de l'abandon d'intérêts sur le compte courant d'associé débiteur aurait dû être fondé sur les dispositions du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts et non du 2° ;
- que l'intérêt de retard présente un caractère discriminatoire et aurait, par ailleurs, dû être motivé ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistrés les 10 octobre 2001, 30 octobre 2001, 6 décembre 2001 et 21 août 2002, les mémoires en défense, présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ;
Il soutient :
- qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;
- subsidiairement, à ce qu'en tant que de besoin, les dispositions de l'article 109-1-1° soient substituées à celle de l'article 109-1-2° du code général des impôts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2004 :
- le rapport de M. LUZI, Président de chambre ;
- et les conclusions de Mme ROUSSELLE, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que Mme X qui exerçait, durant l'année d'imposition en litige, les fonctions de gérant de la société à responsabilité limitée La Bague d'Or, exploitant un fonds de commerce de restaurant à Strasbourg (Bas-Rhin), a été imposée à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1995, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à raison des revenus réputés lui avoir été distribués par ladite société ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que Mme X reprend en appel le moyen tiré de ce que la notification de redressements du 29 novembre 1996, relative à l'impôt sur le revenu auquel l'intéressée a été assujettie dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, est insuffisamment motivée, en ce qu'elle n'indique pas les raisons pour lesquelles le vérificateur a écarté la comptabilité de la société dont elle était la gérante ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils sont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis d'erreur en écartant ce moyen ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que les impositions en litige seraient intervenues à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, la décharge ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenu distribué : 1° Tous les bénéfices aux produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporée au capital ; 2° Toutes les sommes aux valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ; qu'aux termes de l'article 117 du même code : Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions telles qu'il résulte des déclarations de la personne morale visée à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de 30 jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution ; que dans le cas où le dirigeant de la personne morale s'est lui-même désigné comme étant le bénéficiaire des sommes correspondant à l'excès de distribution, il lui appartient, s'il entend contester l'imposition à son nom de ces sommes, de démontrer qu'en réalité il ne les a pas appréhendées ;
Considérant, en premier lieu, qu'en ce qui concerne les moyen tirés, d'une part, de ce que la rémunération qui lui a été versée par la société La Bague d'Or, fixée à 246 000 F en 1993, n'étant pas excessive, ne devait pas être imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et, d'autre part, de la contestation du caractère débiteur de son courant d'associé, Mme X se borne à réitérer purement et simplement l'argumentation présentée dans ses mémoires de première instance ; qu'en procédant ainsi, elle ne met pas le juge d'appel en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal administratif aurait pu commettre en écartant ces moyens ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que Mme X s'est elle-même désignée, en sa qualité de gérante de la société La Bague d'Or, comme étant la bénéficiaire des sommes correspondant aux rehaussements des résultats de ladite société ; qu'elle n'établit pas ne pas avoir appréhendé lesdites sommes ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a, par application des dispositions de l'article 109-1-1° susrappelées du code général des impôts, regardé Mme X comme ayant bénéficié, à due concurrence, d'un revenu distribué imposable ;
Considérant, en troisième lieu, que l'administration était également en droit, par application des dispositions de l'article 109-1-2° du même code, de regarder Mme X comme ayant bénéficié, à concurrence des intérêts non perçus par la société La Bague d'or sur les soldes débiteurs du compte courant d'associé ouvert à son nom dans les écritures de ladite société, d'un revenu distribué imposable ;
Sur les pénalités :
Considérant, en premier lieu, que la mise à la charge d'un contribuable d'intérêts de retard, qui ne constituent pas une sanction au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, n'est pas nombre des décisions qui doivent, en vertu dudit article, être motivées ;
Considérant, en second lieu, que si les dispositions combinées des articles 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et 5 de son premier protocole additionnel peuvent être invoquées pour soutenir que la loi fiscale serait à l'origine de discriminations injustifiées entre contribuables, elles sont en revanche sans portée dans les rapports instituées entre la puissance publique et un contribuable à l'occasion de l'établissement et du recouvrement de l'impôt ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'existence d'une différence de taux entre, d'une part, l'intérêt de retard institué par l'article 1727 du code général des impôts et, d'autre part, les intérêts moratoires mentionnés aux articles L. 207 et L. 208 du livre des procédures fiscales n'est pas susceptible d'être accueilli ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande en décharge des impositions contestées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme Colette X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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