Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 8 octobre 2001 sous le n° 01NC01076 présentée pour M. Christophe X, demeurant ..., par Me Lucien Muller, Avocat ;
M. X demande à la Cour :
1' - d'annuler le jugement n° 98-5380 du 2 août 2001 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1994 ;
2' - de prononcer la décharge demandée ;
3' - de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Code : C
Plan de classement : 19-04-01-02-05-02-02
Il soutient que :
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé ;
- le Tribunal a méconnu le principe du contradictoire ;
- les articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales ont été méconnus ;
- le principe du contradictoire n'a pas été respecté, dès lors que les pièces saisies par l'autorité judiciaire ont été utilisées par l'administration des impôts sans qu'il n'ait pu en obtenir communication ;
- compte tenu des éclaircissements apportés sur des crédits bancaires, regardés comme inexpliqués mais correspondant en réalité à des revenus salariaux, la procédure d'imposition a été mise en oeuvre irrégulièrement ;
- la procédure pénale a établi que la somme de 200 000 F correspond à un prêt remboursé l'année suivante ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 12 mars 2002 présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2004 :
- le rapport de M. RIQUIN, Président,
- et les conclusions de Mme ROUSSELLE, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que M. X ayant, devant le Tribunal administratif de Strasbourg, fait valoir que la somme de 200 000 F, que l'administration des impôts a taxée d'office sur le fondement des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, provenait d'un prêt qui lui aurait été consenti en 1994, les premiers juges ont répondu que les affirmations de M. X relatives à l'existence de ce prêt n'étaient étayées par aucune pièce justificative ; que le Tribunal n'était pas tenu de répondre à l'argumentation du requérant, tirée des motifs d'une ordonnance de non-lieu prononcée le 6 juillet 2000 par le Tribunal de Grande Instance ; qu'ainsi, M. X n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué ne serait pas suffisamment motivé ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la demande d'éclaircissements adressée le 30 septembre 1996 au contribuable, que la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales a été mise en oeuvre après examen, par l'administration des impôts, des comptes bancaires de l'intéressé, en particulier le compte BNP n° 6736487, crédité le 7 mars 1994 par un chèque de 200 000 F, et non, comme le soutient M. X, grâce à l'utilisation par l'administration des impôts de pièces saisies par l'autorité judiciaire et dont il n'aurait pas obtenu communication, en dépit de ses demandes ; qu'ainsi et en tout état de cause, M. X n'est pas fondé à soutenir que le Tribunal aurait méconnu le principe de contradictoire en ne lui communiquant pas les pièces saisies par l'autorité judiciaire ;
Au fond :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant en premier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements... Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés... Les demandes... doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent...
Considérant, que les dispositions précitées permettent à l'administration de comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires ou les comptes courants d'un contribuable au montant brut de ses revenus déclarés, pour établir l'existence d'indices de revenus dissimulés l'autorisant à demander à l'intéressé des justifications, mais ne l'obligent pas à procéder à un examen critique préalable de ces crédits, ni, quand elle l'a fait, à se référer comme terme de comparaison aux seuls crédits dont l'origine n'est pas justifiée après le premier examen ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de la demande d'éclaircissements susvisée adressée le 30 septembre 1996 au contribuable, que le montant total des crédits portés sur les comptes bancaires de M. X et regardés comme inexpliqués, soit 408 315 F, dépassait le double du montant des revenus déclarés, soit 153 994 F ; qu'ainsi, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 16 précité a été engagée irrégulièrement, nonobstant la circonstance que des explications auraient, auparavant, été données par le contribuable sur l'origine des sommes créditées et correspondant à des salaires ;
Sur le bien-fondé de l'imposition litigieuse :
Considérant que M. X soutient que la somme de 200 000 F, que l'administration des impôts a taxée d'office au titre de l'année 1994, correspond à un prêt qui lui aurait été consenti par des tiers et dont l'existence serait établie par les motifs de l'ordonnance de non-lieu partiel susanalysée, prononcée le 6 juillet 2000 par le juge d'instruction près le Tribunal de Grande Instance de Rodez ; que toutefois, l'autorité de la chose jugée en matière pénale ne s'attache qu'aux décisions des juridictions de jugement qui statuent sur le fond de l'action publique ; que tel n'est pas le cas des ordonnances de non-lieu que rendent les juges d'instruction et qui ne s'opposent pas d'ailleurs à la reprise des poursuites pour charges nouvelles ; qu'ainsi l'ordonnance précitée de non lieu rendue par le juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Rodez n'est pas de nature à lier le juge de l'impôt quelles que fussent les constatations sur lesquelles elle était fondée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens ;
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
ARTICLE 1er : La requête de M. X est rejetée.
ARTICLE 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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