Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2002, présentée pour la SARL CLUB API dont le siège est situé ..., représentée par son gérant, par la société d'avocats Simon- X... ;
La SARL CLUB API demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°96-531 du 9 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits complémentaires à la taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1989 et des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Elle soutient que :
- elle n'a pas disposé d'un délai raisonnable pour se faire assister d'un conseil ;
- le redressement repose sur des déclarations et constatations obtenues de manière illicite ;
- elle a déposé ses déclarations dans le délai prévu à l'article 273 du code général des impôts ;
- le rejet de la comptabilité n'est pas justifié ;
- la reconstitution ne se fonde pas sur des données propres à l'entreprise mais sur des éléments obtenus dans des conditions contestables ;
- les redressements n'étant pas justifiés, la mauvaise foi n'est pas établie ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire enregistré le 22 octobre 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2005 :
- le rapport de Mme Richer, président,
- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement,
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales :
... une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification... L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil ;
Considérant, que le contrôle effectué le 6 décembre 1989 par des agents de la brigade de contrôle et de recherches qui ont procédé à l'inventaire des boissons alcoolisées détenues dans le bar n'a pas constitué une vérification de comptabilité au sens des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, la société CLUB API ne saurait faire remonter à la date de cette intervention le début de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet ; que l'avis de vérification qui lui a été remis le 21 décembre 1989 et dont elle a accusé réception précisait que compte tenu du caractère inopiné de la vérification, un délai de quinze jours lui était accordé afin de lui permettre de se faire assister du conseil de son choix ; qu'aucune pièce du dossier ne permet d'établir que les opérations de vérification auraient commencé dès le 21 décembre 1989 sans laisser à la contribuable un délai raisonnable pour se faire assister par un conseil ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L 47 du livre des procédures fiscales manque en fait ;
Considérant, d'autre part, que la société CLUB API soutient que l'administration aurait utilisé des moyens d'investigations illicites pour fonder ses redressements, notamment en exerçant des pressions sur des anciennes salariées de l'établissement ; que, toutefois, les attestations produites pour la première fois devant les premiers juges et qui n'ont pas date certaine ne suffisent pas à établir que les renseignements utilisés par le vérificateur auraient été obtenus sous la menace ou de manière frauduleuse ; que, par suite, le moyen tiré du détournement de procédure ne peut être accueilli ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 242 septies de l'annexe II au code général des impôts : En cas de cession, de cessation ...les entreprises souscrivent dans les trente jours une déclaration de régularisation pour l'exercice en cours ainsi que, le cas échéant, celle qui n'aurait pas encore été déposée au titre d'une période d'imposition précédente ; qu'en application des dispositions de l'article L.66-3° du livre des procédures fiscales, sont taxés d'office les redevables de taxes sur le chiffre d'affaire qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SARL CLUB API a cessé son activité le
31 décembre 1989, date figurant sur la déclaration souscrite à cet effet par l'intéressée auprès du centre de formalités des entreprises ; que la circonstance que le fonds de commerce était fermé tous les ans du 22 décembre au 1er janvier est sans incidence sur la date de cessation d'activité ; que la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 1989 n'a été souscrite que le 28 mars 1990, après l'expiration du délai de trente jours prévu par l'article 242 septies de l'annexe II au code général des impôts précité ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a procédé à la taxation d'office de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de l'année 1989 ;
Sur la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes de l'article L.192 du livre des procédures fiscales : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L.59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge... ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société CLUB API qui comptabilisait globalement les recettes en fin de journée n'a produit aucun justificatif du détail de ces recettes ; que si elle soutient que le cahier de caisse qui contenait les justifications des recettes a été emprunté lors du contrôle effectué le 6 décembre 1989 par des agents de la brigade de contrôle et de recherches, elle ne l'établit pas ; que l'absence de justification du détail des recettes, est à elle seule de nature à priver la comptabilité présentée de toute valeur probante ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que la comptabilité de la société requérante présentait de graves irrégularités la privant de toute valeur probante ; que les impositions résultant de la vérification à laquelle a procédé l'administration pour la période du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1988 ont été fixées conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, il appartient à X d'établir l'exagération des bases d'imposition qui lui ont été assignées ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a reconstitué les recettes du bar à partir des factures d'achat qui lui ont été présentées et des prix pratiqués et a majoré de 50 % le chiffre d'affaires ainsi reconstitué pour évaluer le chiffre d'affaires effectivement réalisé pour tenir compte des achats effectués sans factures, tels qu'ils ont pu être mis en évidence par les déclarations concordantes de salariés de l'établissement et de fournisseurs ; que si la contribuable fait valoir que l'employée qui a admis avoir fourni du champagne sans facture a reconnu avoir témoigné sous la contrainte, il résulte de l'instruction que les relevés bancaires de cette employée ont permis d'établir qu'elle avait acheté au cours du premier trimestre 1988 des bouteilles de champagne pour des montants sans rapport avec le salaire que son employeur soutient lui avoir versé ; qu'à l'appui des allégations selon lesquelles cette employée aurait également travaillé pour un autre bar, la société CLUB API ne produit qu'une attestation dénuée de valeur probante ; que si elle soutient qu'en évaluant à 20 % du montant des ventes réalisées les commissions versées aux employées du bar en complément du salaire déclaré, le vérificateur a procédé de manière arbitraire, elle ne l'établit pas en se bornant à produire deux attestations établies par des personnes qui ont travaillé peu de temps dans l'établissement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CLUB API qui supporte la charge de la preuve, ne démontre pas que la méthode utilisée pour la reconstitution serait radicalement viciée dans son principe ou excessivement sommaire ; qu'il suit de là qu'elle ne peut être regardée comme ayant apporté la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré de l'évaluation des chiffres d'affaires établie par l'administration ;
Sur les pénalités :
Considérant que l'administration, qui a établi l'absence de toute comptabilité fiable et par suite, l'existence de dissimulations de recettes importantes et répétées au cours de la période vérifiée, traduisant une intention délibérée du contribuable d'éluder l'impôt, était fondée à appliquer les pénalités pour mauvaise foi prévues par l'article 1729 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les frais exposés :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société CLUB APIX la somme qu'elle demande au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL CLUB API est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL CLUB API et au ministre au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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02NC00708