Vu la requête, enregistrée le 19 juin 2003, complétée par des mémoires enregistrés les 6 avril et 14 octobre 2004, 1er juillet et 1er août 2005, présentée pour Mme Virginie X, élisant domicile ..., par Me Gerardin, avocat associé de la société Landwell ;
Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 00-3725 du 29 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à obtenir la réduction des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;
2°) de lui accorder la réduction de ces impositions correspondant à un quotient familial de 1,5 part au lieu de 1 part ;
3°) de lui accorder une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de condamner l'Etat à reverser les impositions en litige avec les intérêts de retard prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;
Mme X soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- la réponse aux observations de la contribuable est insuffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- le refus du service d'accorder une demi-part supplémentaire de quotient familial à la requérante, au motif que la pension militaire qu'elle invoque a été accordée par l'Etat portugais, méconnaît à la fois l'article 39 du traité de Rome relatif à la libre circulation des travailleurs conforté par le règlement communautaire n° 1612/88 du 15 octobre 1968 ainsi que les articles 56 et 58 du même traité concernant la libre circulation des capitaux et l'article 25 de la convention fiscale franco-portugaise interdisant les discriminations entre nationaux des deux pays ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistrés au greffe les 30 octobre 2003, 18 juin 2004, 10 juin 2005 et 21 octobre 2005 les mémoires en défense, présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- la réponse aux observations de la contribuable respecte l'obligation de motivation prévue par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- la pension de retraite perçue par la contribuable versée par l'Etat portugais, ne peut être prise en compte pour l'application de l'article 195-1 du code général des impôts régissant le quotient familial ;
- la convention fiscale franco-portugaise et le traité de Rome sont sans incidence sur le présent litige ;
- les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires sont sans objet ;
Vu, enregistré au greffe le 7 novembre 2005, le nouveau mémoire produit par Mme X ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2006 :
- le rapport de M. Bathie, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée… » ;
Considérant que par une notification de redressement du 20 octobre 1999, l'administration a informé Mme X qu'elle ramenait, pour le calcul de son impôt sur le revenu au titre des années 1996, 1997 et 1998, de 1,5 part à une part le quotient familial régi par l'article 195 du code général des impôts, au motif que la contribuable ne pouvait se prévaloir d'une pension de veuve de guerre au sens de ces dispositions ; que dans ses observations Mme X sollicitait la prise en compte de la pension de source portugaise, qui lui avait été accordée à la suite du décès de son mari au cours de son service militaire, en invoquant formellement l'article 25 de la convention fiscale signée le 14 janvier 1971 entre la France et le Portugal ; que dans la réponse du service à ces observations en date du 7 décembre 1999, la correction du quotient familial est maintenue par application de la loi française sans que soit évoquée l'éventuelle incidence de la convention internationale précitée ; que l'absence de toute réponse sur l'application de cette convention qui ne constitue pas comme le soutient le ministre, un simple argument dans la contestation du redressement en litige, révèle une insuffisance de motivation de la réponse aux observations de l'intéressée, en méconnaissance de la garantie organisée par l'article L. 57 précité ; que pour ce seul motif, Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a refusé de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
Sur la demande d'intérêts moratoires :
Considérant qu'en l'absence de tout litige né et actuel sur le paiement des intérêts moratoires dus par l'Etat dans le cadre de la présente instance, les conclusions de la requérante tendant à leur versement sont irrecevables et doivent en conséquence être rejetées pour ce motif ;
Sur les conclusions de la requérante tendant à obtenir l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de faire verser par l'Etat à Mme X une somme de 1 000 euros au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 29 avril 2003 du Tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : Mme X est déchargée des suppléments d'impôt sur le revenu mis à sa charge pour des montants respectifs en droits et intérêts de retard de :
• 875,51 euros au titre de l'année 1996
• 655,23 euros au titre de l'année 1997
• 801,88 euros au titre de l'année 1998.
Article 3 : En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat versera une somme de 1 000 euros à Mme X.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Virginie X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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N° 03NC00612