Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er août 2006, complétée par un mémoire enregistré le 30 août 2007, présentée pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY, dont le siège est fixé 2 rue de Lexis CS 11432 Réhon à Longwy cedex (54414), par Me Cadoz, pour le cabinet d'avocats Petit et Associés ; la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 031259 en date du 18 avril 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nancy l'a condamnée à verser à la société Ateliers Bois la somme de 40 012,10 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2002, les intérêts échus le 4 avril 2005 étant capitalisés à cette date et à chacune des échéances annuelles ultérieures, en réparation du préjudice subi par suite de l'annulation de la 2ème tranche du marché conclu pour la construction d'un pôle d'artisans ;
2°) de rejeter la demande de la société Ateliers Bois ;
3°) de condamner la société Ateliers Bois à lui verser une somme de 2 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY soutient que :
- le tribunal a dénaturé les pièces du dossier en se fondant sur le fait que l'acte d'engagement aurait été joint au courrier du 3 mai 2001 pour en tirer la conséquence que les relations contractuelles s'étaient effectivement nouées ;
- le tribunal a confondu la notification de la décision de la commission d'appel d'offres imposée par l'article 76 du code des marchés et la notification du marché au sens de l'article 254 du code des marchés publics, entachant ainsi sa décision d'erreur de droit ;
- subsidiairement, un ordre de service étant indispensable à la société pour lancer la fabrication de la charpente métallique qu'elle prétend avoir réalisée, elle n'est, en tout état de cause, pas fondée à demander le paiement de la charpente ;
Vu le mémoire en défense, enregistré les 27 et 28 mars 2006 présenté pour la société Ateliers Bois par Me Barberousse, avocat ; la société Ateliers Bois conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en tant qu'il a limité à 50% du coût de construction de la charpente le montant de la condamnation de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY, à la condamnation de celle-ci à lui verser une somme de 80 424,21 €, cette somme étant assortie des intérêts à compter du 23 septembre 2002, lesdits intérêts étant capitalisés à compter du 4 avril 2005 et à lui verser une somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société Ateliers Bois soutient que :
- la requérante n'établit pas, contrairement à ce qu'elle soutient, que le courrier du 3 mai 2001 n'était pas accompagné de l'acte d'engagement du marché ;
- en tout état de cause, le courrier lui-même a été regardé comme valant engagement de la collectivité ;
- eu égard à ses termes mêmes, par son courrier en date du 3 mai 2001, la collectivité a bien entendu notifier le marché et non la décision de la commission d'appel d'offres ;
- l'intervention de l'autorité de contrôle ne peut affecter l'existence même du marché et le visa d'approbation n'a d'autre effet que de faire rétroagir la validité de l'engagement contractuel ;
- la notification commandant l'exécution du marché, l'exposante pouvait à bon droit commencer la construction de la charpente à la réception de celle-ci ;
- il n'y a aucune imprudence dès lors que la notification a pour rôle à la fois d'informer le cocontractant sur l'entrée en vigueur du marché et de l'avertir implicitement qu'il ne peut plus y renoncer, et ceci d'autant plus que lors de la première tranche, l'ordre de service du 5 mars 2001 n'a été notifié à l'entreprise qu'en septembre ;
- le jugement est entaché de contradiction en reconnaissant, d'une part, l'absence de faute du contractant et en retenant, d'autre part, le fait que la société a procédé de façon précipitée et imprudente ;
- elle a été amenée à construire la charpente en toute bonne foi alors que rien ne laisser présager un tel revirement de l'administration ;
- au demeurant, elle a scrupuleusement informé le maître d'oeuvre de l'état d'avancement de ses travaux, comme en témoigne le courrier du 13 février 2002 qui n'a appelé aucune réaction de la part de l'administration ;
- la faute de l'administration étant entière, c'est à tort que le tribunal a limité le montant de l'indemnisation à 50 % du coût de la charpente ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2007 :
; le rapport de M. Tréand, premier conseiller,
- les observations de Me Aubert pour la SELARL Philippe Petit et associés, avocat de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY, et de Me Vilmin substituant Me Barberousse, avocat de la société Ateliers Bois,
; et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;
Après avoir pris connaissance des notes en délibéré présentées le 7 septembre 2007 pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY ;
Considérant que par un marché du 24 janvier 2001, le district de Longwy aux droits duquel vient la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY a confié à la société Ateliers Bois la réalisation du lot n° 3 charpente métallique bardage de la première tranche des travaux décidés en vue de la création d'un pôle des artisans ; que, par lettre du 3 mai 2001, le président du district a informé la société que la commission d'appel d'offres, dans sa séance du 23 avril 2001, avait également décidé de retenir l'offre présentée pour le lot n° 3 charpente métallique bardage de la deuxième tranche et lui a notifié le « marché » lui précisant que le document lui serait adressé après le visa de la sous préfecture de Briey ;
Considérant qu'aux termes de l'article 250 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au présent litige : « Sous réserve des dispositions de l'article 321, les marchés des collectivités territoriales et de leurs établissements publics sont passés sous la forme de contrats écrits dont les cahiers des charges visés à l'article 318 sont des éléments constitutifs (…) Les marchés doivent être notifiés avant tout commencement d'exécution. » ; qu'aux termes de l'article 254 du même code alors applicable : « Les offres sont établies sous la forme d'un acte d'engagement établi en un seul original par les candidats aux marchés. L'acte d'engagement est signé par l'autorité compétente de la collectivité ou de l'établissement contractant. Après signature de l'acte d'engagement et transmission au représentant de l'Etat des pièces nécessaires à l'exercice de son contrôle, le marché est notifié au titulaire par les soins du représentant légal de la collectivité ou de l'établissement. La notification consiste en une remise au destinataire contre récépissé ou en un envoi par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal ou par tout moyen permettant de donner date certaine à cet envoi. La date de notification est la date du récépissé ou celle de réception de l'avis. Le marché prend effet à cette date » ; qu'il résulte de l'instruction que l'acte d'engagement qui était joint au courrier du 3 mai 2001 n'était pas signé par un représentant de l'administration et que le marché n'avait pas à cette date, comme il était indiqué dans la lettre, été soumis au contrôle de légalité ; que, par suite, la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que par l'envoi de cette lettre du 3 mai 2001, le district devait être regardé comme ayant conclu, à la date du 3 mai 2001, un contrat pour un montant de 390 000 francs ; qu'en conséquence, la décision du 15 mai 2002, par laquelle la société a été informée que « la décision de la commission d'appel d'offre était annulée » ne pouvait pas plus être regardée comme une résiliation abusive du prétendu contrat susceptible d'engager la responsabilité de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY ;
Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Ateliers Bois devant le Tribunal administratif de Nancy ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en procédant dans un délai rapproché aux attributions des marchés, le district de l'agglomération de Longwy faisait ressortir comme certaine et indissociable la réalisation de la deuxième tranche du projet ; qu'au cours de l'avancement du chantier de la première tranche, les travaux étant conduits compte tenu de ceux envisagés pour la seconde tranche, rien ne pouvait attirer l'attention de la société Ateliers Bois sur un possible abandon du projet par le district dès lors qu'après avoir remis au maître d'oeuvre les devis concernant les modifications à intervenir sur la deuxième tranche, ceux-ci ont fait l'objet d'une approbation du maître d'oeuvre ; que si la société Ateliers Bois a fait savoir le 13 février 2002 qu'elle était en mesure de poser la charpente prévue pour la deuxième tranche des travaux, il est constant que le district n'a informé la société que le 15 mai 2002 de sa décision de ne pas donner suite à l'appel d'offres en invoquant le fait que la réalisation de la 1ère tranche n'avait pas répondu sur certains critères aux attentes et que des problèmes de subvention obligeaient à surseoir à la réalisation de la 2ème tranche ; que, cependant, dès le mois de septembre 2002, la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY, qui ne justifie pas dans ses écritures du premier motif allégué, procédait à la publication d'un nouvel appel d'offres ; que, dans ces conditions, la société Ateliers Bois est fondée à soutenir qu'après lui avoir donné, du fait de son comportement, des assurances quant à la réalisation du projet, la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY, en y renonçant sans de réels motifs d'intérêt général, a commis une faute de nature à lui ouvrir un droit à indemnité ; que, toutefois, la société Ateliers Bois ne conteste pas avoir commencé à exécuter des prestations sans attendre la signature du marché, alors qu'elle n'avait reçu aucun ordre de service et que l'acte d'engagement signé d'elle seule qui accompagnait la lettre du 3 mai 2001 mentionnait dans son article 3-1 que les délais d'intervention sont fixés à la notification du marché et rappelés par ordre de service de commencement des travaux ; qu'ainsi, la faute de la société Ateliers Bois est de nature à atténuer la responsabilité de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY ; que, dans ces conditions, ni la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY ni la société Ateliers Bois par la voie de l'appel incident, ne sont fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a condamné la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY à indemniser la société Ateliers Bois à hauteur de la moitié de son préjudice, dont la réalité ne saurait être sérieusement contestée ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY, partie perdante, puisse se voir allouer les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner la société Ateliers Bois à payer à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY les sommes qu'elle réclame à ce titre ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY et l'appel incident de la société Ateliers Bois sont rejetés.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNAUTE DE COMMUNES DE L'AGGLOMERATION DE LONGWY et à la société Ateliers Bois.
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N° 06NC01113