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15/10/2009 | FRANCE | N°08NC01359

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 15 octobre 2009, 08NC01359


Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 2008, présentée pour Mme Chantal A née C, demeurant ..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs, Medaji et Seyni A, M. Camille A, demeurant ..., M. Luc A, demeurant ... et Mme Jeanne A, demeurant ..., par la SCP Demange et associés ;

Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600194 en date du 10 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à la condamnation du département de la Meuse à réparer les conséquences dommageables rés

ultant de l'accident mortel de la circulation survenu le 21 avril 2003 à

M...

Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 2008, présentée pour Mme Chantal A née C, demeurant ..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs, Medaji et Seyni A, M. Camille A, demeurant ..., M. Luc A, demeurant ... et Mme Jeanne A, demeurant ..., par la SCP Demange et associés ;

Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600194 en date du 10 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à la condamnation du département de la Meuse à réparer les conséquences dommageables résultant de l'accident mortel de la circulation survenu le 21 avril 2003 à

M. Bernard A ;

2°) de condamner le département de la Meuse à verser :

- à Mme Chantal A, son épouse, une somme de 3537,19 euros par mois depuis le 21 avril 2003 jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir et, à compter dudit arrêt, une somme de 677 315,92 euros au titre du préjudice patrimonial, ainsi que la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral ;

- à Mme Chantal A, en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs, la somme de 84 892,60 euros par enfant au titre du préjudice économique, ainsi que la somme de 50 000 euros par enfant au titre de leur préjudice moral ;

- à M. Camille A, M. Luc A et Mme Jeanne A, ses enfants, la somme de 30 000 euros à chacun d'eux au titre de leur préjudice moral ;

3° de mettre à la charge du département de la Meuse la somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- l'obstacle sur lequel M. A a chuté, d'une hauteur de 4 cms et portant un bord saillant, excédait largement par sa nature et son importance ceux que doivent s'attendre à rencontrer les usagers de la voie publique ;

- le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public est établi en l'absence de panneau de signalisation indiquant l'existence de cette bosse ; une signalisation a été mise en place après l'accident ;

- aucun élément d'enquête ne permet de déterminer que M. A se trouvait sur la voie de gauche au moment du choc ;

- le bord saillant sur la tranchée existait également sur la voie de droite ;

- M. A a observé un comportement prudent ;

- un autre cycliste a été victime d'un accident en franchissant le même obstacle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2009, présenté pour le département de la Meuse par Me Tadic ; le département de la Meuse conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des consorts A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, à titre subsidiaire, à être garanti par la société STT et par Electricité Réseau Distribution France d'éventuelles condamnations prononcées contre lui ; il fait valoir que :

- la surépaisseur maximale de 4 cms consécutive au remblaiement de la tranchée ne constitue pas un défaut d'entretien normal de la voirie ;

- l'accident est survenu en raison du comportement imprudent de M. A, qui roulait à une vitesse excessive et qui connaissait les lieux, dès lors qu'il était intervenu en tant que médecin auprès de la victime d'un accident survenu au même endroit une semaine avant le sien ;

- les préjudices dont les consorts A demandent réparation sont évalués de manière excessive ;

- le donneur d'ordre des travaux à l'origine de la tranchée était ERDF ;

- la mise en place de panneaux de signalisation incombait à la société STT ;

- la société STT, en charge des travaux, avait reçu des instructions relatives à la signalisation ;

Vu les observations en date du 30 mars 2009 par lesquelles la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse déclare n'avoir aucune créance à présenter ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 8 juin et 14 août 2009, présentés pour la société STT par la SCP Vilmin ; elle conclut au rejet de la requête et de l'appel en garantie formé par le département de la Meuse, ainsi qu'à à la condamnation solidaire des consorts A et du département de la Meuse à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que :

- la légère bosse à l'origine de l'accident ne peut être assimilée à un défaut d'entretien de l'ouvrage ;

- le comportement de la victime, en raison de la vitesse constatée, exonère le département et elle-même de toute responsabilité ;

- l'appel en garantie formé par le département de la Meuse est irrecevable, car fondé sur aucun argument juridique et en raison de l'absence de lien contractuel ;

- le département de la Meuse et EDF-GDF ont validé les travaux réalisés et aucune réserve n'a été émise ;

- la signalisation du chantier a été scrupuleusement respectée ;

- les demandes indemnitaires sont excessives ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 août 2009, présenté pour Electricité Réseau Distribution France (ERDF) par Me Bourgaux ; elle conclut au rejet de la requête et de l'appel en garantie formé par le département de la Meuse, ainsi qu'à la condamnation solidaire des consorts A et du département de la Meuse à lui verser la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administratif ; elle fait valoir que :

- cette légère bosse ne présentait ni un danger, ni un caractère anormal de voirie et ne constituait pas un défaut d'entretien normal ;

- la victime a été d'une imprudence manifeste en raison de la vitesse qui a été constatée ;

- la tranchée a été remblayée dans les règles de l'art ;

Vu l'ordonnance en date du 4 août 2009 par laquelle le président de la 3ème chambre de la Cour a fixé la clôture de l'instruction au 28 août 2009 à 16 heures et l'ordonnance du président de la cour en date du 25 août 2009 reportant cette date au 4 septembre 2009 à 16 heures ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 septembre 2009, présenté pour les consorts A ; ils maintiennent l'ensemble de leurs conclusions ; ils soutiennent que :

- la bosse ne faisait l'objet d'aucune signalisation ; située en bas d'une pente et la sortie d'un virage, elle était exceptionnellement dangereuse ; elle traversait bien toute la largeur de la voie ;

- aucun élément de l'enquête ne permet d'établir que M. A circulait sur la voie de gauche au moment du choc ;

- la vitesse relevée au compteur est la vitesse maximale atteinte et non celle du vélo au moment de l'accident ;

- la bosse a présenté le caractère d'un obstacle inattendu ;

- des panneaux de signalisation ont été placés depuis l'accident et la bosse aplanie ;

- le préjudice économique de Mme A doit être évalué à 677 315,92 euros et celui des deux enfants mineurs à 84 892,60 euros ;

- le préjudice moral de Mme A doit être réparé par une somme de 50 000 euros, celui de chacun des deux enfants mineurs par une somme de 50 000 euros et celui de chacun des enfants majeurs par une somme de 30 000 euros ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2009 :

- le rapport de M. Brumeaux, président,

- les conclusions de M Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Tadic, avocat du département de la Meuse, de Me Vilmin, avocat de la société STT et de Me Bourgaux, avocat d'Electricité Réseau Distribution France ;

Sur la responsabilité :

Considérant que M. A a fait une chute mortelle le 21 avril 2003 alors qu'il circulait à vélo sur la route départementale 121 en compagnie de son épouse ; qu'il a été déséquilibré par une surépaisseur de la chaussée correspondant à un raccord d'enrobé à chaud posé le 20 mars 2003 pour recouvrir une tranchée qui avait été creusée pendant l'hiver pour enfouir un câble de réseau haute tension ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de gendarmerie établi le jour même, que le revêtement en cause présentait une épaisseur de 4 centimètres englobant un bord d'attaque saillant d'1,5 cm de hauteur situé à 35 cm à gauche de l'axe médian de la voie ; qu'ainsi, il ne représentait pas un obstacle excédant ceux que doivent normalement s'attendre à rencontrer les usagers de la voie publique et contre lesquels il leur appartient de se prémunir en prenant eux-mêmes les précautions nécessaires ; que, dans ces conditions, les circonstances qu'un autre cycliste a fait un chute au même endroit une semaine auparavant et qu'aucune signalisation spécifique n'a été apposée sur la voie ne sont pas, en elles-mêmes, de nature à révéler un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ; que la circonstance qu'après l'accident, la chaussée a été aplanie et une signalisation mise en place n'établit pas plus le défaut d'entretien normal de la voie ; qu'enfin, M. A connaissait l'existence de cette saillie, étant intervenu en sa qualité de médecin pour porter secours à la victime de l'accident survenu au même endroit la semaine précédente ; que, par suite, les consorts A ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité du département de la Meuse à raison des conséquences dommageables de l'accident dont M. A a été victime ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à la condamnation du département de la Meuse à réparer les conséquences dommageables de l'accident dont a été victime M. Bernard A ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Meuse, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent les consorts A, la société STT et Electricité Réseau Distribution France au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, pour le même motif, les demandes présentées sur ce fondement par la société STT et Electricité Réseau Distribution France à l'encontre les consorts A, qui ne dirigent aucune conclusion contre celles-ci, doivent être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des consorts A la somme de 3 000 euros demandée sur le même fondement par le département de la Meuse ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête des consorts A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de la Meuse, la société STT et Electricité Réseau Distribution France en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Chantal A, M. Camille A,

M. Luc A, Mme Jeanne A, à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Meuse, au département de la Meuse, à l'entreprise STT et à Electricité Réseau Distribution France (ERDF).

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08NC01359


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01359
Date de la décision : 15/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP DEMANGE et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-10-15;08nc01359 ?
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