La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/2009 | FRANCE | N°08NC01733

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 26 novembre 2009, 08NC01733


Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2008, présentée par le PRÉFET DE L'AUBE ;

Le PRÉFET DE L'AUBE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801717 du 16 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé son arrêté en date du 17 juin 2008 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné, et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de

la notification de ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le...

Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2008, présentée par le PRÉFET DE L'AUBE ;

Le PRÉFET DE L'AUBE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801717 du 16 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé son arrêté en date du 17 juin 2008 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné, et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal a considéré que l'arrêté attaqué avait porté au droit de M. A au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, alors que l'intéressé n'établit ni sa date d'entrée effective sur le territoire français ni le caractère continu de sa présence en France depuis l'année 2004 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 juin 2009, présenté pour M. A, demeurant ..., par Me Bilendo ; M. A conclut à titre principal à ce que la Cour constate que l'instance a perdu son objet et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête comme tardive ou, plus subsidiairement, comme infondée ;

Il soutient que :

- il a déjà été mis fin à l'instance par l'ordonnance n° 08NC01733 du 27 janvier 2009 par laquelle le président de la Cour a rejeté la requête du préfet de l'Aube ;

- le jugement ayant été notifié le 20 octobre 2008 au préfet, l'appel qu'il a formé le 1er décembre 2008 est tardif ;

- c'est à juste titre que le Tribunal a annulé l'arrêté attaqué en retenant qu'il avait été adopté en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 juillet 2009, présenté par le PRÉFET DE L'AUBE, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par le même moyen et fait en outre valoir que :

- l'ordonnance n° 08NC01733 rendue le 27 janvier 2009 par le président de la Cour a été déclarée nulle et non avenue par arrêt de la Cour rendu le 30 avril 2009 sur recours en rectification d'erreur matérielle ;

- il résulte de ladite ordonnance que la requête n'est pas tardive ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2009 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Bilendo, avocat de M. A ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu présentées par M. A :

Considérant que si M. A fait valoir qu'il a déjà été mis fin à l'instance par l'ordonnance n° 08NC01733 du 27 janvier 2009 par laquelle le président de la Cour de céans a rejeté la requête du PRÉFET DE L'AUBE, ladite ordonnance a été déclarée nulle et non avenue par arrêt de la Cour de céans rendu le 30 avril 2009 à la suite d'un recours en rectification d'erreur matérielle présenté par le préfet ; qu'il y a lieu, dès lors, de statuer sur ladite requête ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que la Cour de céans a jugé dans l'arrêt précité rendu le 30 avril 2009 qu'eu égard à la circonstance que le délai d'appel d'un mois fixé par l'article R. 775-10 du code de justice administrative n'a commencé à courir qu'à compter de la réception le 30 octobre 2008 par le PRÉFET DE L'AUBE du jugement attaqué, la requête présentée par celui-ci au greffe de la Cour le 1er décembre 2008 était recevable ; qu'il s'ensuit que la fin de non recevoir tirée par M. A de la tardiveté de la requête doit être écartée ;

Sur la légalité de l'arrêté du 17 juin 2008 :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A, ressortissant turc né le 22 juin 1978, fait valoir qu'il est entré en France au cours de l'année 2004 pour y rejoindre son épouse, titulaire d'une carte de résident depuis le 7 octobre 1999, et que de leur union sont issus deux enfants, nés en France le 21 avril 2005 et le 23 juin 2008 ; que, toutefois, ni les avis d'imposition à l'impôt sur le revenu se rapportant aux années 2004 à 2006, dont les mentions ne permettent pas d'établir que les revenus déclarés par M. et Mme A proviennent de l'activité en France de M. A et non de celle de son épouse, qui exerçait une activité salariée au cours de la période en cause, ni les attestations, rédigées en termes très généraux, concernant sa présence et son intégration en France, ni l'ordonnance médicale en date du 11 février 2005 établie à son nom, ni les factures et l'avis d'imposition à la redevance audiovisuelle et à la taxe d'habitation, se rapportant à l'année 2007, qu'il verse au dossier, ne permettent à M. A de justifier de sa présence habituelle en France depuis l'année 2004, alors que, dans un courrier adressé le 20 avril 2007 au ministre chargé de l'emploi, Mme A indiquait que son époux ne résidait pas en France de manière habituelle et qu'elle lui rendait régulièrement visite en Turquie pendant les vacances d'été ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la possibilité dont dispose son épouse de solliciter, à son bénéfice, le regroupement familial, l'arrêté du PRÉFET DE L'AUBE en date du 17 juin 2008 n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, c'est à tort que le Tribunal s'est fondé, pour annuler ledit arrêté, sur la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que s'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant en première instance qu'en appel par M. A, il ressort des pièces du dossier que ce dernier n'a pas présenté d'autres moyens à l'encontre de l'arrêté contesté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PRÉFET DE L'AUBE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, d'une part, annulé l'arrêté du 17 juin 2008 par lequel il avait refusé de délivrer un titre de séjour à M. A, en lui faisant obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0801717 du 16 octobre 2008 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à M. Salih A.

''

''

''

''

4

N° 08NC01733


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01733
Date de la décision : 26/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : JUGNOT - BILENDO - HIS ; ; JUGNOT - BILENDO - HIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-11-26;08nc01733 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award