Vu la requête enregistrée le 22 mars 2011, présentée pour M. Yves B, demeurant ..., par Me Gartner ;
M. B demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1002451 du 24 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a, à la demande de M. C, annulé son élection à la chambre de commerce et d'industrie de la région Lorraine et à la chambre de commerce et d'industrie des Vosges, dans le collège industrie 50 salariés et plus , dont les résultats ont été proclamés le 15 décembre 2010 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C devant le Tribunal administratif de Nancy ;
Il soutient que :
- le tribunal administratif a inversé la charge de la preuve dès lors que son effectif était bien de 50 employés ;
- le tribunal administratif a commis une erreur de droit dans son interprétation de l'article R. 713-1-1 du code de commerce, dès lors que le chiffre des effectifs détenu par la commission d'établissement des listes électorales n'est pas celui transmis par le tribunal de commerce, qui doit uniquement transmettre des informations sur l'identité des entreprises ;
- en assimilant les employés aux salariés, le tribunal administratif a commis une erreur de fait ;
- en désignant un électeur supplémentaire, il n'a pas entendu déclarer un effectif de salariés ;
- il ne saurait avoir commis une manoeuvre dès lors que, lorsqu'il a rempli sa déclaration d'effectif, la chambre régionale n'avait pas encore arrêté les sous-catégories et qu'il s'est présenté dans la sous-catégorie affectée par la commission d'établissement des listes électorales ;
- à supposer qu'il ait commis une manoeuvre, elle ne saurait avoir altéré la sincérité du scrutin, dès lors que son élection était assurée ;
- la demande de première instance tend à remettre en cause la liste électorale, dont le contrôle, sauf manoeuvre, relève de la seule compétence des juridictions judiciaires ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 avril 2011, présenté pour M. C par Me Cuny, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le requérant s'est porté candidat dans la sous-catégorie professionnelle des industries 50 salariés et plus alors qu'il n'était pas éligible dans cette sous-catégorie dès lors que la SNC Tissage d'Eloyes dont il est le représentant légal compte moins de 50 salariés ;
- le requérant a donc commis une manoeuvre en rectifiant le 18 juin 2010 les informations relatives à l'effectif de salariés de la société sur le questionnaire de la CCI ;
- cette manoeuvre a eu une incidence sur l'élection ;
- l'appréciation du nombre de salariés est faite au 31 décembre 2009 ;
- les textes législatifs ou réglementaires font référence à la notion juridique de salariés et non d'employés, ce que le requérant, président de la CCI des Vosges, ne pouvait ignorer ;
- les documents produits par le requérant lui-même montrent que l'affirmation selon laquelle son entreprise bénéficiait de 12 salariés mis à disposition manque en fait ;
- en outre, les salariés prétendument mis à disposition relèvent d'une autre catégorie et ont été pris en compte pour la société mère de l'entreprise du requérant ;
- enfin, les salariés en question n'auraient pu être pris en compte qu'en proportion de leur temps de présence, ce qui ne représenterait que 2,42 salariés ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 29 avril 2011, présenté pour M. B tendant aux même fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mai 2011 :
- le rapport de M. Trottier, président,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de Me Gartner, avocat de M. B, et de Me Cuny, avocat de M. C ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 mai 2011, présentée pour M. C ;
Sur l'éligibilité de M. B :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 713-1 du code de commerce : (...) Pour l'élection des membres de chambres de commerce et d'industrie territoriales et des membres de chambres de commerce et d'industrie de région, la circonscription de vote est la circonscription de la chambre de commerce et d'industrie territoriale. Chaque électeur, au titre des deux élections précitées, vote dans sa catégorie et, éventuellement, sous-catégorie professionnelles déterminées en application de l'article L. 713-11. II.- Sont électeurs aux élections des membres des chambres de commerce et d'industrie territoriales et de région : 1° A titre personnel : a) Les commerçants immatriculés au registre du commerce et des sociétés dans la circonscription de la chambre de commerce et d'industrie, sous réserve, pour les associés en nom collectif et les associés commandités, des dispositions du III de l'article L. 713-2... ; qu'aux termes de l'article L. 713-11 du même code : Les électeurs des délégués consulaires et des membres des chambres de commerce et d'industrie territoriales et de région sont répartis dans chaque circonscription administrative entre trois catégories professionnelles correspondant respectivement aux activités commerciales, industrielles ou de services. Au sein de ces trois catégories, les électeurs peuvent éventuellement être répartis en sous-catégories professionnelles définies en fonction de la taille des entreprises. Lorsqu'il est fait application du deuxième alinéa, la chambre de commerce et d'industrie régionale et les chambres de commerce et d'industrie territoriales qui lui sont rattachées définissent des sous-catégories communes sous l'autorité de la chambre de commerce et d'industrie régionale ; qu'aux termes de l'article L. 713-13 du même code : La répartition des sièges entre catégories et sous-catégories professionnelles est faite en tenant compte des bases d'imposition des ressortissants, du nombre de ceux-ci et du nombre de salariés qu'ils emploient ; qu'aux termes de l'article R. 713-66 du même code : I.- Lors de chaque renouvellement général, ainsi qu'en cas de fusion entre chambres, la chambre de commerce et d'industrie de région et la chambre de commerce et d'industrie territoriale réalisent, chacune pour ce qui la concerne et suivant les critères fixés par les articles L. 713-11, L. 713-12 et L. 713-13, une étude économique de pondération. Cette étude détermine, d'une part l'importance économique des catégories et, le cas échéant, des sous-catégories professionnelles au sein de la chambre de commerce et d'industrie de région et de la chambre de commerce et d'industrie territoriale, d'autre part l'importance économique des circonscriptions des chambres de commerce et d'industrie territoriales au sein de la chambre de commerce et d'industrie de région à laquelle elles sont rattachées. II.- L'étude économique de pondération recueille les données statistiques permettant d'établir, par catégorie, par sous-catégorie et par circonscription de chambre de commerce et d'industrie territoriale, les données suivantes : 1° Le nombre de ressortissants de la chambre territoriale ; 2° La somme des bases d'imposition de la cotisation foncière des entreprises due par ses ressortissants ; 3° Le nombre de salariés qu'ils emploient (...) Ces données statistiques sont collectées par la chambre de commerce et d'industrie territoriale auprès des services fiscaux en ce qui concerne les bases d'imposition, lesquelles sont fournies par établissement, et auprès des unions pour le recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d'allocations familiales en ce qui concerne le nombre de salariés des établissements... ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 713-1-1 du code de commerce : I.- La liste électorale destinée à l'élection des membres de chambre de commerce et d'industrie de région, de chambre de commerce et d'industrie territoriale et, s'il y a lieu, de délégation est dressée au sein de la circonscription de la chambre de commerce et d'industrie territoriale par la commission régie par l'article R. 713-70. La commission prend en compte les informations détenues par les juridictions de première instance compétentes en matière commerciale dont les ressorts sont totalement ou partiellement compris dans la circonscription de la chambre. II.- Dans le ou les ressorts inclus dans la circonscription de la chambre, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés, assisté du greffier de la juridiction, fournit à la commission et à la chambre de commerce et d'industrie territoriale, au plus tard le 31 janvier de l'année du renouvellement, la liste des personnes physiques et morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés relevant de la circonscription et remplissant les conditions fixées au II de l'article L. 713-1. La chambre de commerce et d'industrie territoriale envoie à l'ensemble de ces personnes, avant le dernier jour du mois de février de la même année, par courrier ou par voie électronique, un questionnaire les invitant à identifier ou à désigner les électeurs investis de cette qualité en vertu des articles L. 713-1 à L. 713-3. Les questionnaires sont renvoyés par courrier ou par voie électronique à la chambre de commerce et d'industrie territoriale au plus tard le 30 avril de la même année. La chambre les transmet sans délai à la commission d'établissement des listes électorales (...) III.- La commission d'établissement des listes électorales procède à la constitution de la liste électorale, établie par catégorie et, le cas échéant, sous-catégorie professionnelle, au plus tard le 30 juin de la même année... ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 713-8 du même code : I.- Tout électeur qui remplit les conditions fixées à l'article L. 713-4 peut se porter candidat dans sa sous-catégorie ou, à défaut, dans sa catégorie professionnelle. Nul ne peut être candidat dans plus d'une sous-catégorie ou catégorie... ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les électeurs des membres des chambres de commerce et d'industrie territoriales et de région sont répartis entre trois catégories professionnelles correspondant respectivement aux activités commerciales, industrielles ou de services et, éventuellement, en sous-catégories professionnelles définies en fonction de la taille des entreprises ; que celle-ci est déterminée par le nombre de salariés qu'elles emploient recueilli dans le cadre d'une étude économique de pondération réalisée, lors de chaque renouvellement général, par la chambre de commerce et d'industrie territoriale à l'aide des données collectées auprès des unions pour le recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d'allocations familiales ; qu'une commission d'établissement des listes électorales est chargée d'établir les listes électorales par catégories et sous-catégories en fonctions des informations fournies par les tribunaux de commerce en ce qui concerne la liste des personnes physiques et morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés et par ces personnes elles-mêmes invitées à répondre à un questionnaire en ce qui concerne leur qualité d'électeur ; que tout électeur peut se porter candidat dans sa sous-catégorie telle que dressée par la commission d'établissement des listes électorales ;
Considérant que M. B, représentant légal de la SNC Tissage d'Eloyes, a été élu membre de la chambre de commerce et d'industrie des Vosges et membre de la chambre de commerce et d'industrie de Lorraine dans la sous-catégorie professionnelle des industries 50 salariés et plus ; que, s'il n'est pas contesté que la SNC Tissage d'Eloyes comportait uniquement 38 salariés au 31 décembre 2009, M. B était bien inscrit sur la liste électorale des entreprises de plus de 50 salariés ; qu'à ce titre, il était bien éligible dans cette sous-catégorie ; que, toutefois, s'il n'appartient pas au juge de l'élection d'apprécier si un électeur inscrit sur les listes électorales d'une catégorie et d'une sous-catégorie remplit effectivement les conditions exigées pour bénéficier de cette inscription, il lui incombe de vérifier si l'éligibilité ne procède pas d'une manoeuvre ;
Considérant qu'en réponse au questionnaire adressé au cours du mois de juin 2010 par la chambre de commerce et d'industrie des Vosges et destiné à déterminer la qualité d'électeur, M. B a lui-même corrigé le nombre de 39 employés figurant dans la colonne vos données actuelles et résultant de l'étude économique de pondération réalisée par la chambre de commerce et d'industrie des Vosges à l'aide des données collectées, conformément aux prescriptions contenues dans la lettre adressée par le secrétaire d'Etat chargé du commerce en date du 27 janvier 2010 aux préfets de région et de départements, au 31 décembre 2009 auprès des unions pour le recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d'allocations familiales, par celui de 50 ; que, si la chambre de commerce et d'industrie de Lorraine n'a expressément arrêté le principe d'une répartition des sièges par sous-catégories que le 31 août 2010, le requérant reconnaît lui-même dans sa requête d'appel que la chambre de commerce et d'industrie des Vosges, dont il était le président sortant, avait, dès le 29 mars 2010, préconisé une répartition des sièges en sous-catégories en fonction du nombre de salariés, répartition qui sera d'ailleurs finalement retenue ; qu'en outre, la circonstance que le questionnaire adressé par la chambre de commerce et d'industrie des Vosges fasse référence à des employés et non à des salariés est sans incidence sur la manoeuvre commise tenant en la modification du nombre de salariés permettant au représentant légal de la SNC Tissage d'Eloyes d'être électeur dans la sous-catégorie des entreprises de plus de 50 salariés dès lors que les dispositions législatives et réglementaires précitées applicables à l'organisation des élections au sein des chambres de commerce et d'industrie territoriales et de région, que le requérant ne pouvait ignorer compte tenu de ses fonctions de président sortant de la chambre de commerce et d'industrie des Vosges, font référence à la taille des entreprises expressément définie par rapport au nombre de leurs salariés ; qu'enfin, si les premiers juges ont estimé, à tort, sans pour autant inverser la charge de la preuve, que l'article L. 731-1-1 du code de commerce faisait obligation au tribunal de commerce de communiquer à la commission d'établissement des listes électorales des informations sur le nombre de salariés, cette erreur sur la source des informations relatives au nombre de salariés demeure sans incidence sur le bien-fondé de l'effectif réel, d'ailleurs non contesté, des salariés de la SNC Tissage d'Eloyes ; qu'au demeurant, le requérant n'apporte aucun élément sur le nombre de salariés de la SAS Tenthorey, société qui aurait mis des salariés à la disposition de sa filiale, la SNC Tissage d'Eloyes, pris en compte pour déterminer la qualité des électeurs aux mêmes élections que celles en litige ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé son l'élection à la chambre de commerce et d'industrie de la région Lorraine et à la chambre de commerce et d'industrie des Vosges ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner M. B à verser à M. C une somme de 1000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. BUBIEF est rejetée.
Article 2 : M. B versera à M. C une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Yves B et à M. Jean-René C.
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N° 11NC00468