Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2013, présentée pour M. B... C..., demeurant au..., par Me Thomann, avocat ;
M. C... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1200376 du 9 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 janvier 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a confirmé la décision du 22 août 2011 par laquelle l'inspectrice du travail du territoire de Belfort avait autorisé la société Norbert Dentressangle Distribution à le licencier ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la santé du 18 janvier 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les sommes de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 35 euros en remboursement de la contribution à l'aide juridique ;
M. C... soutient que :
- la décision du 18 janvier 2012 a été prise par une autorité ne justifiant pas bénéficier d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- le ministre a mal apprécié les faits de l'espèce ; après une période d'absence prolongée pour raisons médicales, son employeur a voulu lui imposer une modification de son contrat de travail ; à son retour de congés de maladie, il a été mis dans l'incapacité de reprendre ses fonctions ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 août 2013, présenté pour la société Norbert Dentressangle Distribution, ayant pour siège social les Pierrelles, à Beausemblant (26240), représentée par son dirigeant en exercice, par le cabinet d'avocats Capstan Rhône-Alpes, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. C...de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société Norbert Dentressangle Distribution soutient que :
- M.A..., directeur adjoint au directeur général du travail au ministère du travail, de l'emploi et de la santé, avait qualité pour signer la décision du 18 janvier 2012 ;
- la décision du 18 janvier 2012 comporte les considérations de droit et de fait qui la fondent ;
- M. C...n'a pas justifié son absence à l'issue de la suspension de son contrat de travail malgré deux mises en demeure ;
- la société Norbert Dentressangle Distribution n'a jamais imposé à M. C...de modification de son contrat de travail mais a uniquement envisagé une évolution de ses fonctions de chef de quai ;
Vu l'ordonnance en date du 17 septembre 2013 fixant la clôture de l'instruction le 15 octobre 2013 à 16 heures ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2014, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2014 :
- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;
1. Considérant que M. C...a été embauché le 3 septembre 2001 par la société Norbert Dentressangle Distribution en qualité de cariste ; qu'il a été promu aux fonctions de chef de quai et affecté à l'agence de Fontaine (territoire de Belfort) ; qu'il a été élu délégué du personnel titulaire à compter du 11 juin 2009 ; qu'il a été placé en congé maladie du 20 mars au 13 septembre 2010, puis du 27 octobre 2010 au 28 avril 2011 ; qu'à l'occasion de sa visite de reprise, le 29 avril 2011, M. C... a été déclaré apte sous réserves, lesquelles comportaient notamment l'exclusion de la conduite d'engins, l'interdiction du port de charges lourdes et la limitation des situations de stress ; que M. C...ne s'étant pas présenté à son poste de travail du 2 mai 2011 jusqu'au 18 juin 2011, date de sa mise à pied à titre conservatoire, la société Norbert Dentressangle Distribution a sollicité l'autorisation de le licencier ; que M. C...demande l'annulation du jugement du 9 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 janvier 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a confirmé la décision du 22 août 2011 par laquelle l'inspectrice du travail du territoire de Belfort avait autorisé la société Norbert Dentressangle Distribution à le licencier ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant, en premier lieu, qu'au soutien de sa critique du jugement attaqué, M. C... reprend, avec la même argumentation, son moyen de première instance tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 18 janvier 2012 ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 2421-5 du code du travail " la décision de l'inspecteur du travail est motivée " ; que la décision du ministre en charge du travail du 18 janvier 2012, après avoir visé les articles L. 2411-5 et R. 2421-8 du code du travail, indique que M. C...n'a apporté aucune justification à son absence du 2 mai au 18 juin 2011 et que ce fait constitue une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; que la décision attaquée comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui la fondent et est par suite suffisamment motivée ;
En ce qui concerne la légalité interne :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2411-5 du code du travail : " Le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. [...] " ;
5. Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi, et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'alors que M. C...aurait dû reprendre son travail le lundi 2 mai 2011, il ne s'est représenté à son poste au plus tôt que le 12 juin 2011 selon ses propres déclarations ; qu'au jour de la décision du ministre, il n'avait toujours pas justifié de son absence entre le 2 mai et le 12 juin 2011, alors que, par deux courriers des 12 et 20 mai 2011, son employeur lui en avait fait la demande ;
7. Considérant que M.C..., pour soutenir qu'il a été mis dans l'incapacité de reprendre son travail, fait valoir que son employeur a cherché à l'affecter à l'issue de son congé de maladie à un nouveau poste de travail impliquant une modification de ses fonctions et de son horaire de travail de nuit ; qu'il est constant que la société Norbert Dentressangle Distribution a, par un courrier du 25 octobre 2010, proposé à M. C...de l'affecter à une fonction nouvellement créée de diminution des litiges et de gestion des dossiers sécurité ; que toutefois, et contrairement aux allégations de M.C..., son employeur lui a confirmé par un courrier du 20 mai 2011 le maintien de principe de son horaire de travail de nuit ; qu'il ne ressort par ailleurs d'aucune des pièces du dossier que les tâches que l'employeur se proposait de confier à M. C... ne seraient pas en rapport avec sa qualification ; que, dans ces conditions, en refusant ce changement dans ses conditions de travail et en s'abstenant de se rendre sur son poste de travail pour ce seul motif sans justifier de son absence, M. C...a commis une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au remboursement de la contribution à l'aide juridique :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. C...les sommes qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et en remboursement de la contribution à l'aide juridique ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société Norbert Dentressangle Distribution sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Norbert Dentressangle Distribution tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à la société Norbert Dentressangle Distribution et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
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N° 13NC01039