Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour la commune de Kerbach, représentée par son maire, par MeA... ;
La commune de Kerbach demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0900262 du 10 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à la société Soprema la somme de 5 744,38 euros sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;
2°) de rejeter la demande de première instance présentée par la société Soprema ;
3°) de mettre à la charge de la société Soprema la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la société Soprema était intervenue en dehors de toute obligation légale ou contractuelle ; que les interventions qu'elle a effectuées d'ailleurs gracieusement s'inscrivaient dans le cadre des relations contractuelles liant le titulaire du marché à son sous-traitant et dans le cadre de la garantie décennale qu'elle devait ; que le tribunal de grande instance de Sarreguemines avait au demeurant considéré, dans son jugement définitif du 22 février 2001, que ces travaux valaient reconnaissance expresse de responsabilité ;
- elle n'a bénéficié d'aucun enrichissement mais a au contraire subi des désagréments ;
- il n'y a eu ni commande ni devis ni fiche d'intervention contresignée par la commune ;
Vu le mémoire, enregistré le 31 mars 2014, présenté pour la société Soprema, par la Selas MetR avocats, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Kerbach la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la requête d'appel est irrecevable ; qu'elle n'est pas intervenue dans le cadre de la garantie de parfait achèvement ni dans celui de la garantie décennale ; que les interventions qui lui ont été demandées par la commune de Kerbach s'apparentent à des visites périodiques d'entretien ; que ces interventions sont fondées sur des commandes directes qui lui ont été passées par la commune ; que les travaux effectués dans le cadre de l'expertise et qui ont été préconisés par l'expert ne peuvent rester à sa charge ; que les prestations qu'elle a effectuées ont été utiles à la commune ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2014 :
- le rapport de M. Pommier, président,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me Keller, avocat de la société Soprema ;
1. Considérant que, par acte d'engagement du 27 juillet 1994, la commune de Kerbach a confié les travaux de construction d'un bâtiment à usage sportif et culturel à un groupement conjoint comprenant notamment la société Weiler ; que celle-ci a sous-traité à la société Soprema le lot " couverture-bardage " selon un contrat du 6 décembre 1994 ; que la réception des travaux a été prononcée sans réserve le 25 septembre 1996 ; que des infiltrations par toiture sont survenues à partir de l'année 1999 ; qu'une expertise judiciaire a été ordonnée en 2004 ; que, par un jugement du 22 avril 2008, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande indemnitaire présentée par la commune de Kerbach sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs ; que la société Soprema, qui est intervenue à plusieurs reprises en 2001, 2002, 2004 et 2005, a demandé le 19 août 2008 à la commune de lui verser la somme de 5 744,38 euros en paiement de ces prestations ; que la commune de Kerbach s'y est refusée ; qu'elle relève appel du jugement du 10 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a fait entièrement droit à la demande indemnitaire de la société Soprema, sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;
Sur la fin de non recevoir opposée par la société Soprema :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié à la commune de Kerbach le 18 avril 2013 ; qu'ainsi la requête d'appel enregistrée le 17 juin 2013 soit dans le délai de deux mois prescrit par l'article R. 811-2 du code justice administrative est recevable ;
Au fond :
3. Considérant qu'il n'est pas contesté que des infiltrations sont survenues à partir de l'année 1999 ; qu'il ressort du rapport d'expertise que des infiltrations en divers points du bâtiment ont été relevées par le maître de l'ouvrage les 27 janvier 2002, 22 décembre 2002, 2 janvier 2003, 20 février 2003, 20 octobre 2004 ; que de nouvelles infiltrations sont survenues le 11 février 2005 lors d'une visite d'expertise ; que l'expert a noté que ces infiltrations se produisaient au niveau des solins et raccords de couverture, des parties éclairantes et des lanterneaux et exutoires de fumée ;
4. Considérant que, selon un état daté du 15 septembre 2005 et remis à l'expert dans le cadre des opérations d'expertise alors en cours, la société Soprema est intervenue sur la couverture du bâtiment en mars et septembre 2001, les 18 et 19 décembre 2002 à la demande de la commune de Kerbach, ainsi qu'en juillet 2004, mars et septembre 2005 à la demande de l'expert ;
Sur les interventions effectuées en 2001 et 2002 :
5. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les interventions dont la société Soprema demande paiement à la commune de Kerbach auraient été effectuées à la demande de l'entreprise Weiler, titulaire du marché, et dans le cadre des obligations découlant du contrat de sous-traitance les liant ; qu'il ressort au contraire des pièces du dossier et notamment des diverses correspondances produites par la société Soprema que la commune s'est adressée directement à elle afin de faire procéder aux travaux de reprise de la couverture ;
6. Considérant qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que la société Soprema aurait accepté de réaliser les travaux d'entretien en cause au titre de sa responsabilité décennale, dont elle aurait estimé qu'elle était engagée ; que le tribunal administratif de Strasbourg a au demeurant estimé par un jugement du 22 avril 2008 devenu définitif que les désordres résultant des infiltrations ne relevaient pas de la garantie décennale due par les constructeurs au maître de l'ouvrage ;
7. Considérant que, comme le fait valoir la commune, il résulte des déclarations mêmes de la société Soprema qu'elle est intervenue au cours des années 2001 et 2002 à titre gracieux et commercial ; qu'elle n'a transmis ni devis ni facture à la commune et que ce n'est qu'ultérieurement, dans le cadre des opérations d'expertise, qu'elle a adressé à l'expert un détail des sommes correspondant à ces interventions ainsi qu'à celles réalisées à la demande de ce dernier puis en a réclamé paiement à la commune ; que, de plus, et ainsi qu'il a été dit, les infiltrations se sont poursuivies et il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'elles auraient concerné d'autres points que ceux sur lesquels la société Soprema était intervenue ; que la seule mention du rapport d'expertise selon laquelle " les interventions de Soprema depuis 1999 (...) sont certainement également pour quelque chose " dans la disparition des infiltrations n'est pas de nature à établir que les travaux de reprise effectués en 2001 et 2002 auraient effectivement remédié aux infiltrations alors constatées ; que, par suite, la commune de Kerbach est fondée à soutenir que les interventions effectuées en 2001 et 2002 ne lui ont procuré aucun enrichissement et que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les sommes correspondant à ces interventions étaient dues à la société Soprema sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;
8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Soprema devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
9. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la société Soprema est intervenue gracieusement au cours des années 2001 et 2002 ; que, par suite, et en tout état de cause, elle ne peut utilement faire valoir, pour demander paiement des sommes qu'elle estime lui être dues en contrepartie de ces prestations, que les demandes d'intervention de la commune révèleraient la conclusion de contrats tacites ayant pour objet l'entretien de la toiture ou que la commune aurait commis une faute en omettant de conclure des contrats pour lesdits travaux ;
Sur les interventions effectuées en 2004 et 2005 :
10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 6, la commune de Kerbach ne peut se prévaloir de ce que les travaux de reprise effectués par la société Soprema procèderaient d'une obligation contractuelle ou légale ;
11. Considérant que les travaux préconisés par l'expert et réalisés par la société Soprema à la suite des réunions d'expertise des 24 juin 2004 et 11 février 2005 ont permis de remédier aux désordres ; que ces travaux ont donc été utiles à la commune de Kerbach ; que la réalité de ces prestations a été constatée par l'expert lors des réunions des 11 février et 20 septembre 2005 ; que la société Soprema est ainsi en droit d'obtenir paiement des sommes respectives de 647 et 773,81 euros TTC correspondant aux frais de main-d'oeuvre et de déplacement ; que ne saurait y être ajoutée une quelconque somme au titre des dépenses de petites fournitures, dès lors que la société Soprema les a évaluées, sans en justifier, à la somme globale d'" environ 350 euros HT " pour ses différentes interventions effectuées en 2001, 2002 et 2004 ; que la société Soprema a également droit au paiement de la somme de 682,91 euros TTC correspondant aux travaux de démontage de la bande de recouvrement effectués lors de la réunion d'expertise du 20 septembre 2005 et qui ont permis, outre la vérification de la conformité de la réalisation, d'enlever des objets et cailloux coincés sous cette bande et empêchant le bon écoulement des eaux pluviales ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Kerbach est seulement fondée à demander que l'indemnité mise à sa charge par le jugement attaqué soit ramenée à la somme de 2 103,72 euros TTC ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Kerbach, qui n'est pas la partie principalement perdante dans la présente instance, la somme que la société Soprema demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Kerbach et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La somme de 5 744,38 euros que la commune de Kerbach a été condamnée à verser à la société Soprema par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 10 avril 2013 est ramenée à 2 103,72 euros TTC.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 10 avril 2013 est réformé en ce qu'il de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Kerbach est rejeté.
Article 4 : La société Soprema versera la somme de 1 000 euros à la commune de Kerbach au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Commune de Kerbach et à la société Soprema entreprises.
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