Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 18 février 2013 du maire de Meistratzheim leur refusant un permis de construire.
Par un jugement n° 1303646 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 mars 2014 et le 15 avril 2014, M. et Mme A...B..., représentés par Mes Amiet et Graff, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1303646 du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;
2°) d'annuler le refus de permis de construire du 18 février 2013 ;
3°) d'enjoindre à la commune de leur délivrer un permis de construire sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de la commune le versement de la somme de 2 500 euros pour la première instance et de 1 500 euros pour l'appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est entaché d'omission à statuer ;
- en se bornant à se référer à des demandes précédentes de permis de construire, l'avis du gestionnaire de la voie ne comporte pas de précisions suffisantes ; le maire ne pouvait se référer à un avis insuffisamment motivé sans vice de procédure ;
- ils n'ont pas été informés des commentaires ajoutés par le maire à leur dossier en réponse aux demandes de complément d'information de la part du gestionnaire de la voie ;
- le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation en se fondant sur la dangerosité des accès alors qu'il n'existe aucun risque pour les usagers de la voie publique ;
- c'est à tort que le maire a considéré que leur présence permanente sur leur exploitation agricole n'était pas nécessaire ;
- la décision, prise par mesure de rétorsion à leur égard, est entachée de détournement pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2014, et un mémoire complémentaire du 18 juin 2014, la commune de Meistratzheim, représentée par Me Bourgun, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des époux B...la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'appel est tardif et par suite irrecevable ;
- l'avis du gestionnaire de la voirie est légal ;
- les allégations relatives à l'influence qu'aurait eue le maire sur l'avis du service gestionnaire de la voirie ne sont pas démontrées ;
- le maire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard du risque présenté par l'accès du projet pour les usagers de la route ;
- il n'est pas démontré que la construction d'une maison d'habitation est indispensable pour l'exploitation agricole ;
- le détournement de pouvoir allégué n'est pas démontré ;
- le prononcé d'une astreinte ne serait en aucun cas justifié.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me Amiet, avocat de M. et MmeB..., ainsi que celles de Me Bourgun, avocat de la commune de Meistratzheim.
Sur la recevabilité de la requête :
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1 (...) " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué du tribunal administratif de Strasbourg a été notifié à M. et Mme B...le 25 janvier 2014 ; qu'ainsi, l'appel enregistré au greffe de la cour le 24 mars 2014 n'est pas tardif, contrairement à ce que soutient la commune de Meistratzheim ; que la requête est, dès lors, recevable ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant que le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur le moyen, opérant, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le maire de Meistratzheim en rejetant la demande de permis de construire présentée par les requérants en raison des risques présentés par les accès pour les usagers de la voirie, manque en fait, le tribunal administratif ayant répondu à ce moyen au point 2 de son jugement ;
Sur la légalité du refus de permis de construire :
4. Considérant, d'une part, que l'article 2A du plan local d'urbanisme de Meistratzheim autorise dans la zone Ac, dans laquelle se trouve le terrain litigieux, " les constructions et installations (...) directement liées et nécessaires à l'activité des exploitations agricoles, y compris les éventuelles activités commerciales et touristiques (...) telles que la vente de produits agricoles ou horticoles, les fermes auberges, les gîtes ruraux et les campings à la ferme, à condition que ces constructions soient situées à proximité immédiate des bâtiments agricoles existants " ; qu'aux termes de l'alinéa 2 du même article : " Les constructions à usage d'habitation et leurs annexes sont autorisées uniquement lorsqu'elles sont destinées au logement des personnes dont la présence sur les lieux de l'exploitation est liée et nécessaire à l'activité de l'exploitation. Le nombre de logement est limité à un par unité foncière. Les bâtiments doivent être regroupés sur la même unité foncière " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la maison d'habitation, objet de la demande de permis de construire en litige, est destinée au logement de M. et Mme B..., exploitants, ainsi qu'à celui d'un de leurs employés, personnes dont la présence est liée à l'activité de l'exploitation agricole située sur la même parcelle ; que cette exploitation comporte diverses cultures de céréales et de plantes maraîchères, un magasin de vente de pissenlits, asperges, fraises et légumes, ainsi qu'une activité de cueillette de fraises par les acheteurs, qui nécessitent une présence constante des exploitants ; qu'elle comprend, en outre, sur la parcelle où la construction est projetée, un élevage de 4 500 poules et 450 coqs qui requiert le ramassage des oeufs trois fois par jour, chaque jour, la nourriture des animaux et leur surveillance étroite pour les maintenir en bonne santé ; que, dans ces conditions, la présence de M. et Mme B...et de leur employé sur les lieux de l'exploitation doit également être regardée comme nécessaire à l'activité de l'exploitation au sens de l'article 2A du plan local d'urbanisme ; que si la chambre d'agriculture, qui a émis un avis favorable à la demande de permis de construire en litige, a noté cependant que la surface hors oeuvre nette " de 245 m² " de la maison " l'écartait quelque peu de sa fonction première de logement de fonction " et devrait être " revue à la baisse ", il ressort des pièces du dossier que la surface habitable est de 180 m² et que la maison n'est destinée qu'aux exploitants et à leur famille ; qu'ainsi, c'est à tort que le maire de Meistratzheim a refusé le permis de construire demandé au motif qu'il méconnaissait les exigences de l'article 2A du plan local d'urbanisme ;
6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 3 A du plan local d'urbanisme de Meistratzheim relatif aux accès et voirie : " La desserte des installations et occupations du sol autorisées sera assurée par un accès unique depuis la voie départementale (...) / La sécurité des usagers et de toute voie nouvelle qui sera ouverte à la circulation automobile devra être garantie (...) " ;
7. Considérant que pour rejeter la demande de permis de construire présentée par M. et MmeB..., le maire de Meistratzheim a également retenu que l'accès direct de la parcelle à la RD 426 présentait des risques pour la sécurité des usagers de cette route ; qu'il s'est fondé à tort sur l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme, inapplicable en vertu de l'article R. 111-1 du même code dans une commune dotée d'un plan local d'urbanisme, sans invoquer les dispositions du plan en vigueur ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que la parcelle support du projet de construction comporte déjà l'exploitation agricole de M. et Mme B...et que l'accès à la RD 426 prévu pour la maison d'habitation projetée, qui ne sera pas une voie nouvelle, est celui de cette exploitation, déjà emprunté par l'exploitant et ses employés pour rejoindre leur domicile ou dans le cadre de l'exploitation, ainsi que par les particuliers qui viennent effectuer des achats ou cueillir des fruits ; que, dans ces conditions, la construction de la maison d'habitation de M. et Mme B... sur cette parcelle, qui conduira en outre à réduire leurs déplacements dès lors que leur domicile se situera sur la parcelle, n'est pas de nature à aggraver les dangers de l'accès unique pour les usagers de la route départementale ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le maire de Meistratzheim s'est fondé sur ce motif pour rejeter la demande de permis de construire ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les deux motifs de refus du permis de construire opposés par le maire de Meistratzheim à M. et Mme B...sont entachés d'illégalité ; que les requérants sont donc fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 18 février 2013 ; que pour l'application de l'article L. 600-4 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens présentés à l'appui de leur requête par M. et Mme B... ne paraît de nature à fonder l'annulation de la décision contestée ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce et alors que la commune ne fait état d'aucun autre motif susceptible de justifier le refus du permis de construire litigieux, l'exécution du présent arrêt implique que le maire de Meistratzheim délivre à M. et Mme B... le permis de construire demandé ; qu'il y a lieu de lui enjoindre de délivrer ce permis de construire dans un délai de deux mois, sans qu'il soit nécessaire de prononcer une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la de M. et MmeB..., qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la commune de Meistrazheim au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Meistratzheim le versement à M. et Mme B...d'une somme globale de 1 500 euros au titre des frais qu'ils ont exposés tant en appel qu'en première instance ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 janvier 2014 et le refus de permis de construire opposé le 18 février 2013 par le maire de Meistratzheim à M. et Mme B...sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au maire de Meistratzheim de délivrer à M. et Mme B... le permis de construire demandé, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : La commune de Meistratzheim versera une somme globale de 1 500 € (mille cinq cents euros) à M. et Mme B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés en appel et en première instance.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Meistratzheim relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et à la commune de Meistratzheim.
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14NC00517