Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...B...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2015 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 1504581 du 14 octobre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté attaqué et a enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à Mme A...un titre de séjour.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête n° 15NC02235, enregistrée le 30 octobre 2015, le préfet du Haut-Rhin demande à la cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 14 octobre 2015.
Il soutient que le moyen tiré de l'interprétation erronée faite par les premiers juges de la situation de Mme A...au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est sérieux et justifie l'annulation du jugement attaqué.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2015, Mme D...B...épouseA..., représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît également l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
II. Par une requête n° 15NC02236, enregistrée le 30 octobre 2015, le préfet du Haut-Rhin demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 14 octobre 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Il soutient que la décision en litige ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que MmeA..., qui entre dans les catégories d'étrangers ouvrant droit au regroupement familial, ne peut prétendre à la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2015, Mme D...B...épouseA..., représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît également l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Fuchs a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que les requêtes n° 15NC02235 et n° 15NC02236, présentées par le préfet de Haut-Rhin tendent, d'une part, à l'annulation et, d'autre part, au sursis à l'exécution du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;
2. Considérant que, par un arrêté du 23 juillet 2015, le préfet du Haut-Rhin a refusé de délivrer un titre de séjour à MmeA..., ressortissante chinoise née le 6 mars 1977, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'issue de ce délai ; que le préfet du Haut-Rhin relève appel du jugement du 14 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour ;
Sur les conclusions de la requête n° 15NC02236 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
4. Considérant qu'en application des stipulations précitées, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...est mariée depuis le 27 février 2012 à un compatriote qui réside sur le territoire français depuis au moins 2006 et qui exploite, depuis le 10 juin 2014, un restaurant, activité pour laquelle il bénéficie d'un titre de séjour en qualité de commerçant ; que si la requérante n'est entrée en France que récemment, le 2 avril 2014, elle y réside depuis avec son époux, avec lequel elle a eu un enfant né sur le territoire le 26 juin 2014 ; qu'aucun de ces éléments n'est contesté par le préfet ; que, dans les circonstances de l'espèce, la décision refusant à Mme A...la délivrance d'un titre de séjour a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis, nonobstant la circonstance selon laquelle l'intéressée, qui aurait pu prétendre au bénéfice du regroupement familial, n'a pas respecté cette procédure ; que cette décision méconnaît donc, ainsi que l'a jugé le tribunal, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Haut-Rhin n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 23 juillet 2015 et lui a enjoint de délivrer à Mme A...un titre de séjour ;
Sur les conclusions de la requête n° 15NC02235 :
7. Considérant qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du préfet du Haut-Rhin n° 15NC02235, tendant au sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 14 octobre 2015, qui est devenue sans objet ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15NC02235.
Article 2 : La requête n° 15NC02236 du préfet du Haut-Rhin est rejetée.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N° 15NC02235 - 15NC02236