Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2015 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé.
Par un jugement n° 1502276 du 9 octobre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2015 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé.
Par un jugement n° 1502275 du 9 octobre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I - Par une requête, enregistrée le 15 mars 2016, sous le n° 16NC00469, M. B... A..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1502276 du 9 octobre 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Moselle du 27 janvier 2015 pris à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir au besoin sous astreinte ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, Me E..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- le préfet, qui n'était pas dispensé de procéder à l'examen de sa situation individuelle, a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation en estimant que le Monténégro présentait le caractère d'un pays d'origine sûr pour lui ;
- il remplit les conditions prévues à l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnait également l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours, le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2016, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
II - Par une requête, enregistrée le 15 mars 2016, sous le n° 16NC00470, MmeC... A..., représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1502275 du 9 octobre 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Moselle du 27 janvier 2015 pris à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir au besoin sous astreinte ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, Me E..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle fait valoir les mêmes moyens que ceux exposés par son époux à l'appui de la requête n° 16NC00469.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2016, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.
M. et Mme A...on été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 25 février 2016.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D...a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. et MmeA..., nés respectivement en 1982 et 1986, de nationalité monténégrine, ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que par deux arrêtés en date du 27 janvier 2015, le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer les titres sollicités, a assorti ces refus d'obligations de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'éventuelles mesures d'éloignement forcé ; que M. et Mme A... relèvent chacun appel des jugements du 9 octobre 2015 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés pris à leur encontre ;
2. Considérant que les requêtes n° 16NC00469 et n° 16NC00470 portent sur la situation d'un même couple de ressortissants étrangers et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt ;
Sur les conclusions dirigées contre les décisions portant refus de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes des arrêtés contestés que le préfet de la Moselle a visé les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation des requérants ainsi que stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il a également exposé les raisons pour lesquelles il estimait que les intéressés ne remplissaient pas les conditions pour être admis au séjour sur le territoire national en qualité d'étranger malade, en relevant notamment qu'il existait des traitements appropriés à leur état de santé au Monténégro et que les refus de séjour ne portaient pas atteinte à leur droit à mener une vie familiale normale ; qu'ainsi, le préfet a énoncé les considérations de droit et de fait sur lesquelles il s'est fondé pour rejeter les demandes de titres de séjour dont il était saisi ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les décisions de refus de séjour litigieuses ne seraient pas suffisamment motivées doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort ni des termes des arrêtés contestés ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Moselle n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. et de Mme A... avant de rejeter leurs demandes de titres de séjour ;
5. Considérant, en troisième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ;
6. Considérant que si M. et Mme A...avaient sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de demandeurs d'asile puis en qualité de parents d'un enfant malade, les demandes qu'ils ont présentées le 26 mai 2014 s'agissant de Mme A...et le 18 octobre 2014 s'agissant de M. A...portaient uniquement sur la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que, par les arrêtés attaqués, le préfet de Moselle, s'il a rappelé les demandes de titres antérieures, s'est uniquement prononcé sur la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il en résulte que M. et Mme A...ne peuvent pas utilement invoquer les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 741-2 et L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre des refus opposés à leurs demandes de titre de séjour qui n'ont pas été présentées sur le fondement de ces articles ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A...ne sont entrés en France qu'au mois de mars 2013 ; que s'ils soutiennent être dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine où ils ont vécu jusqu'à l'âge respectivement de 31 ans et 27 ans, ils n'établissent pas ce qu'ils allèguent ; qu'ils n'établissent pas davantage être insérés en France du fait de la naissance de leur troisième enfant sur le territoire français et de la scolarisation en France de leurs deux autres enfants qui parlent le français ; que, dans ces conditions, les décisions portant refus de séjour n'ont pas porté au droit de M. et Mme A...au respect de leur vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ;
9. Considérant que si M. et Mme A...se prévalent de leur état de santé, il ressort des pièces du dossier que par deux avis émis le 18 août 2014, le médecin de l'agence régionale de santé de Lorraine a indiqué qu'ils pouvaient bénéficier d'un traitement approprié à leur état de santé au Monténégro ; que, par suite, en refusant de les admettre au séjour, le préfet de la Moselle n'a pas entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leur situation personnelle ;
10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;
11. Considérant que rien ne fait obstacle à ce que les enfants de M. et MmeA..., qui ont vocation à suivre leurs parents, poursuivent leur scolarité au Monténégro ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet aurait méconnu l'intérêt supérieur de leurs enfants en refusant de leur délivrer un titre de séjour ;
Sur les conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
12. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre les décisions de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de ces décisions invoquée par M. et Mme A...à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;
13. Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que le refus de titre de séjour est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle de la décision de refus de séjour ; que les arrêtés en litige mentionnent le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, ainsi qu'il a été dit au point 3, les décisions de refus de titre de séjour sont suffisamment motivées ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français seraient entachées d'un défaut de motivation doit être écarté ;
14. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) " ;
15. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 9, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les traitements nécessaires aux pathologies de M. et Mme A...sont indisponibles au Monténégro ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 doit être écarté ;
16. Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 8 ;
Sur les conclusions dirigées contre les décisions relatives au délai de départ volontaire :
17. Considérant que le délai de trente jours accordé à un étranger pour exécuter une obligation de quitter le territoire français constitue le délai de départ volontaire de droit commun prévu par les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si les requérants font valoir qu'en ne leur accordant qu'un délai de trente jours le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à leur état de santé, ils n'établissent pas ce qu'ils allèguent dès lors, ainsi qu'il a été dit, qu'ils pourront bénéficier d'un traitement médical approprié au Monténégro ;
Sur les conclusions dirigées contre les décisions fixant le pays de destination :
18. Considérant que les décisions en litige, après avoir notamment visé l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionné la nationalité monténégrine de M. et MmeA..., indiquent que les intéressés ne font état d'aucun élément permettant d'établir qu'ils encourraient des risques de tortures, de peines ou de traitement inhumain ou dégradant auxquels, en application de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales nul ne peut être soumis ; qu'ainsi, les décisions contestées comportent les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement et sont suffisamment motivées ;
19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes n° 16NC00469 et n° 16NC00470 présentées par M. et Mme A...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 16NC00469,16NC00470