Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F...E..., néeB..., a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy de prescrire une expertise médicale afin de déterminer les causes et conséquences sur son état de santé de sa prise en charge, le 25 mai 2012, par le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nancy.
Par une ordonnance n° 1800358 du 7 mai 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 25 mai 2018, et un mémoire en réplique enregistré le 26 juin 2018, MmeE..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 7 mai 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;
2°) de déclarer que sa demande d'expertise est également opposable au Docteur Blanchot, praticien libéral ;
3°) de faire droit à sa demande d'expertise.
Elle soutient que :
- sa demande en tant qu'elle est dirigée contre le docteur Blanchot, médecin libéral, est recevable ;
- les premiers experts désignés ont commis des erreurs factuelles de date et de lieux qui ont eu une incidence sur leurs conclusions ;
- les experts ont occulté sa première admission, le 29 décembre 2012, au service des urgences du CHRU de Nancy ;
- son accident vasculaire cérébral a débuté le 29 décembre 2012 sans qu'elle soit prise en charge jusqu'au 4 janvier 2013 ;
- l'accident vasculaire cérébral dont elle a été victime le 4 janvier 2013 aurait pu être évité si les médecins n'avaient pas commis une erreur d'interprétation de l'IRM du 12 juin 2012 ;
- les experts n'ont pas tiré les conclusions de leurs propres constations en ce qui concerne la perte de chance, le taux de déficit fonctionnel permanent et les autres séquelles ;
- l'expertise ne comporte pas les éléments nécessaires à une appréciation objective de sa demande ;
- elle demande une nouvelle évaluation de son déficit permanent et de la perte de chance après rectification des erreurs matérielles qui ont entaché les conclusions des experts ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2018, le Docteur Patrick Blanchot, représenté par MeD..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête de MmeE... ;
2°) de mettre à la charge de Mme E...une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête de Mme E...est irrecevable ;
- aucun médecin neurologue / ou neuroradiologue ne vient étayer l'argumentation de la requérante ;
- le rapport des deux experts est circonstancié ;
- la requérante n'apporte aucun élément sérieux de nature à remettre en cause la première expertise.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2018, le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nancy et le centre hospitalier de Toul, représentés par MeG..., demandent à la Cour de rejeter la requête de MmeE....
Ils soutiennent que :
- MmeE..., sous couvert d'inexactitudes du rapport d'expertise, entend en réalité contester les conclusions des experts et solliciter une contre-expertise ;
- Mme E...ne soutient pas que les experts n'auraient pas intégralement rempli leur mission ;
- les erreurs matérielles de l'expertise relevées par Mme E...sont sans incidence ;
- les experts se sont prononcés sur les divers manquements reprochés lors des différentes hospitalisations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Par décision du 11 avril 2018, la présidente de la Cour a désigné M. H...C..., comme juge de référés en application des dispositions de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E...a été adressée, le 25 mai 2012, par son médecin traitant au service des urgences du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nancy pour une suspicion d'accident vasculaire cérébral (AVC). Une imagerie par résonnance magnétique encéphalique a été réalisée le 12 juin suivant par le Docteur Blanchot au centre d'imagerie Jacques Callot. Le 29 décembre 2012, l'intéressée a de nouveau été adressée au service des urgences du CHRU de Nancy. Le 3 janvier 2013, elle s'est rendue au service des urgences au centre hospitalier (CH) de Toul où un scanner a été effectué. Le 4 janvier, elle a été transférée par le SAMU au CHRU de Nancy où une imagerie par résonnance magnétique a révélé l'existence d'un AVC ischémique. Mme E... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI) de Lorraine d'une demande de règlement amiable contre le CHRU de Nancy, le CH de Toul, le CH de Commercy, le centre d'imagerie Jacques Callot et le docteur Blanchot. La CCI a diligenté une expertise confiée au professeur Chiras, spécialisé en neuroradiologie, et au docteur Chedru, spécialisé en neurologie, qui ont déposé leur rapport le 1er décembre 2015. La CCI a rendu son avis le 2 février 2016 aux termes duquel la réparation des préjudices subis par Mme E... incombe au docteur Blanchot à hauteur de 15 % et au CHRU de Nancy à hauteur de 35 %, et la liste des préjudices à indemniser a été établie. L'intéressée interjette appel de l'ordonnance du 7 mai 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à prescrire une nouvelle expertise afin de déterminer les causes et conséquence, sur son état de santé, de sa prise en charge par le CHRU de Nancy, le 25 mai 2012.
2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) ". La prescription d'une mesure d'expertise en application de ces dispositions est subordonnée au caractère utile de cette mesure. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande d'expertise dans le cadre d'une action en responsabilité du fait des conséquences dommageables d'un acte médical, d'apprécier son utilité au vu des pièces du dossier, notamment du rapport de l'expertise prescrite par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux s'il existe, et au regard des motifs de droit et de fait qui justifient, selon la demande, la mesure sollicitée.
3. Il ressort clairement des écritures de Mme E...que sa demande de prescription d'une expertise est destinée à faire une nouvelle évaluation de son déficit fonctionnel permanent et de la perte de chance qui ont été expertisés. Dans ces conditions, la requérante doit être regardée comme contestant les conclusions des experts désignés par la CCI de Lorraine.
4. Il résulte de l'instruction que les experts, dont aucun manque d'objectivité n'a été démontré, ont examiné l'ensemble des pièces médicales du dossier de l'intéressée et ont apporté une réponse à tous les point de leur mission, notamment sur l'appréciation des soins qui lui avaient été prodigués dans les différents établissements dans lesquels elle a été prise en charge et leurs conséquences sur son état de santé, ainsi que l'évaluation des dommages qu'elle a subis. Si Mme E...fait valoir que le rapport d'expertise est entachée d'erreurs factuelles et entend contester les conclusions des experts, celles-ci pourront être discutées contradictoirement lors d'une instance au fond devant le tribunal administratif éventuellement saisi. Dans ces conditions et ainsi que l'a considéré le premier juge, l'expertise sollicitée par la requérante ne revêt pas, en l'état de l'instruction, un caractère utile au sens des dispositions précitées de l'article R. 532-1 du code de justice administrative tel que défini au point 2 et il reste loisible au juge du fond d'ordonner toute mesure utile qu'il estimera nécessaire.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions de la requérante à l'encontre du Docteur Blanchot, que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande d'expertise sollicitée. Par suite, sa requête ne peut qu'être rejetée.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le Docteur Blanchot sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du Docteur Blanchot présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme F...E..., au centre hospitalier régional universitaire de Nancy, au centre hospitalier de Toul, au centre d'imagerie Jacques Callot, au docteur Patrick Blanchot et à Mut'est.
Fait à Nancy, le 3 juillet 2018
Le juge des référés
Signé : Jean-Jacques C...
La République mande et ordonne à la ministre des solidarité et de la santé, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme
Le Greffier,
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18NC01577