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23/04/2019 | FRANCE | N°18NC02349

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 23 avril 2019, 18NC02349


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés des 25 et 27 juillet 2018 par lesquels le préfet des Ardennes, d'une part, l'a obligée à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée et, d'autre part, l'a assignée à résidence.

Par un jugement n° 1801636 du 31 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Pr

océdure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 août 2018, Mme A...B..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés des 25 et 27 juillet 2018 par lesquels le préfet des Ardennes, d'une part, l'a obligée à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée et, d'autre part, l'a assignée à résidence.

Par un jugement n° 1801636 du 31 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 août 2018, Mme A...B..., représentée par Me Segaud, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 31 juillet 2018 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet des Ardennes des 25 et 27 juillet 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- les arrêtés litigieux ne sont pas suffisamment motivés ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- si elle n'a pas présenté de demande de titre de séjour dans un délai de deux mois suivant l'anniversaire de ses dix-huit ans mais seulement le 27 juillet 2018, elle justifie ce retard par le fait qu'elle se trouvait en période de révision et d'examen ; elle avait tenté de présenter une demande de titre de séjour lorsqu'elle était mineure ;

- le préfet n'établit pas qu'elle présentait un risque de fuite justifiant qu'un délai de départ volontaire lui soit refusé ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a méconnu les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire, enregistré le 22 mars 2019, le préfet des Ardennes conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 septembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Haudier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., ressortissante kosovare née le 18 avril 2000, est entrée en France en 2013 avec ses parents. Par un arrêté du 25 juillet 2018, le préfet des Ardennes, l'a obligée à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Par un second arrêté du 27 juillet 2018, le préfet l'a assignée à résidence. Mme B...relève appel du jugement du 31 juillet 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.

Sur la légalité des arrêtés litigieux :

2. Il ressort des pièces du dossier que, depuis son arrivée en France à l'âge de 13 ans, MmeB..., qui parle couramment le français, a été scolarisée. Elle n'a jamais redoublé et a obtenu, au mois de juin 2018, un brevet d'études professionnelles spécialité " métiers des services administratifs ". Mme B...justifie ainsi d'un parcours scolaire sérieux et indique souhaiter poursuivre des études supérieures en France. Il est, par ailleurs, constant que l'intéressée n'est pas retournée au Kosovo depuis qu'elle est arrivée en France. Enfin, si elle n'a pas présenté de demande de titre de séjour dans les deux mois suivant son dix-huitième anniversaire conformément aux dispositions du 2° de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle fait valoir qu'elle avait tenté de régulariser sa situation au mois de janvier 2018 mais qu'on lui avait indiqué, lorsqu'elle s'était rendue au rendez-vous fixé par les services de la préfecture, que cette demande était prématurée. Elle produit, à l'appui de ses dires, la convocation qui lui avait été adressée à la suite de sa demande de rendez-vous ainsi qu'une attestation d'une bénévole de la Cimade qui l'accompagnait dans ses démarches. Elle indique également qu'elle n'a eu dix-huit ans qu'à la fin du mois d'avril 2018 et explique l'absence de démarches auprès de la préfecture en mai ou juin 2018, en faisant valoir qu'elle se trouvait alors en période de révision et d'examen. Dans ces conditions, alors même que ses parents ont fait l'objet d'obligations de quitter le territoire et ont ainsi vocation à quitter le territoire français, Mme B...est fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

3. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en annulation de la décision par laquelle le préfet l'a obligée à quitter le territoire français ainsi que, par voie de conséquence, des décisions lui refusant un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et l'assignant à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ".

5. Il y a lieu d'enjoindre au préfet de réexaminer la situation de Mme B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer durant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Son avocat peut, par suite, se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Segaud, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Segaud de la somme de 1 200 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1801636 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 31 juillet 2018 et les arrêtés du préfet des Ardennes des 25 et 27 juillet 2018 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Ardennes de procéder au réexamen de la situation de Mme B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, durant ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me Segaud une somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Segaud renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Ardennes.

2

N° 18NC02349


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC02349
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : SEGAUD JULIE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-04-23;18nc02349 ?
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